Féminisation de la migration
Publié le 23/03/2022
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PERCEPTIONS ET IMAGINAIRES SUR LA FEMME MIGRANTE : CAS DU SENEGALS
Pour mieux appréhender les perceptions et les imaginaires géographiques des candidats au départ,
il faut passer en revue la motivation de départ qui n’est pas simplement toujours liée à la précarité
et à la pauvreté.
Elle s’appuie sur un imaginaire fécond d’aspects symboliques liés au départ qui
poussent les candidats à constater l’urgence de migrer.
Cela résulte du fait qu’il est en proie en un
imaginaire social qui fait de la migration son seul espoir d’amélioration.
Il y a des attentes de
reconnaissance sociale dans leur pays d’origine, leur déplacement est source de mobilité sociale,
un rêve d’ascension sociale et avec comme volonté implicite de retourner au pays après
l’expérience migratoire et la réussite financière, donc sociale.
C’est pour cela que depuis les années 1990, dans la société sénégalaise, la tendance est que de
femmes mariées à des émigrés ont vécu des moments très difficiles non seulement elles sont
éloignées du mari, mais le poids de la société à leur égard est insoutenable.
Les relations
matrimoniales restent généralement codifiées par des normes sociales et religieuses (religion
musulmane, culture et tradition wolof) qui confèrent une certaine prédominance de l’homme sur la
femme.
Se faisant, quand l’homme migre, les règles de patrilocalité exigent souvent à la femme
qui « reste »de co-résider avec le reste du ménage et dans certains cas avec la famille élargie.
Des
tensions liées non seulement à la cohabitation avec la belle famille, aux rumeurs et commérages et
mais aussi à la surveillance de la part des autres membres, constituent des épreuves qui rythment
la vie de ces femmes.
Des situations de précarité autour de l’accès aux ressources qui marquent
une certaine dépendance des femmes à l’égard de leur mari.
Parallèlement, la féminisation croissante de la migration sénégalaise a produit des effets au sein de
la société.
Le départ de ces femmes a été à l’origine de processus de « négociation des places »
dans de nombreuses familles sénégalaises, tout en suscitant des perceptions socioculturelles
négatives à leurs égards.
Dans ces cas, la migration a souvent été associée à des pratiques
« contre nature » voire « risquées » souvent considérées comme outrage aux mœurs sociétales.
En prenant en compte ces analyses anthropologiques et sociologiques, deux positionnements
peuvent se formuler : en premier, la migration de l’homme et celle de la femme n’a pas la même
signification au sein de la société sénégalaise.
Deuxièmement, bien que l’appartenance socioculturelle influe fortement sur les relations de couples séparés par la migration, cette influence
n’est toutefois pas bénéfique aux femmes, qu’elles « partent » ou « restent ».
Nous allons articuler notre analyse sur le cas des femmes mariées à des « Modou-Modou » et
vivant au Sénégal ; ensuite sur le cas des migrantes qui vivent en Europe, laissant leur conjoint et
leurs enfants au Sénégal et enfin de celles célibataires ou jeune fille.
La migration de la femme peut découler de son mari : c’est le recours au regroupement familial.
Mais la complexification des mesures de regroupement familial dans le contexte européen influe
ainsi grandement sur le choix, généralement des migrants, de faire venir leur conjointe ou pas.
Les
procédés de regroupement familial représentent pour nombre de migrants des dispositifs parsemés
d’obstacles juridiques, économiques et sociaux.
Pour faire venir sa conjointe ou son conjoint, le
migrant ou la migrante doit non seulement avoir un permis de séjour régulier mais justifier de
ressources économiques suffisantes prouvant sa capacité d’accueil (conditions matérielles et de
logement, stabilité de l’emploi, etc.).
Or, pour ceux et celles qui sont en situation irrégulière ou qui
disposent d’un emploi précaire (commerçants ambulants, agriculteurs, travailleurs au noir, sans
papiers etc.), le regroupement familial devient quasiment improbable.
Les ModouModou constituent le groupe le plus concerné par cette situation.
Généralement commerçants
ambulants, leurs pratiques liées au travail les inscrivent souvent dans une mobilité entre différents
espaces au gré des opportunités de vente.
Dans leurs discours, hormis les contraintes
réglementaires auxquelles ils doivent faire face, la réticence au regroupement familial se justifie
par des choix résidentiels marqués par la colocation ou l’hébergement.
Cette stratégie leur permet
dès lors de dégager une épargne substantielle destinée à l’entretien des autres membres de la
famille restés au pays.
Au-delà du seul cadre juridique et réglementaire de la procédure de
regroupement familial, cette démarche fait écho à d’autres contraintes.
Dans leur calcul
des avantages comparatifs en contexte migratoire, le regroupement familial n’est pas rentable et
génère même des coûts supplémentaires qui supplantent de loin les envois mensuels d’argent au
Sénégal.
La prise en charge de la famille sur place n’exclut pas celle des autres membres de la.
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