TERRE UNE VUE D'ENSEMBLE La Terre est la cinquième planète du Système solaire quant à la masse (que l'on estime à 5,976 x 1024 kg), son diamètre est de 12 756 km et sa circonférence de 40 000 km, soit près de 40 fois la distance Paris-Rome. Sa densité moyenne est d'environ 5 g/cm3. Cela veut dire que la Terre est cinq fois plus lourde qu'une sphère d'eau de la même dimension. Sa forme évoque celle d'une poire très arrondie et écrasée, présentant deux renflements, l'un au niveau de l'océan Pacifique, l'autre au niveau de l'océan Atlantique. Cette forme imparfaitement ronde est due à des irrégularités dans sa composition interne, qui déterminent des variations locales du champ de gravité. L'aplatissement polaire causé par la rotation terrestre provoque une déformation permanente de l'équateur, qui n'est pas circulaire mais elliptique. La température moyenne à la surface de la planète est de 12 °C, une température comprise entre le point d'ébullition et le point de congélation de l'eau, l'élément qui occupe plus des deux tiers de la surface terrestre. Aux pôles, la température locale a favorisé la formation d'une solide calotte de glace permanente. Le tiers restant de la surface est constitué par les terres émergées. Au-dessus de la surface se trouve l'atmosphère, dont les constituants principaux sont la vapeur d'eau, le gaz carbonique, l'oxygène et l'azote. Les plus légers, tels que l'hydrogène et l'hélium, s'échappent facilement dans l'espace et sont produits de façon constante par les réactions chimiques et nucléaires de la surface. Dans l'ensemble, 90 % de la Terre est constitué de quatre éléments : le fer, l'oxygène, le silicium et le magnésium. La surface de la Terre est remodelée en permanence. Le 27 août 1883, après une éruption qui dégagea une énergie égale à celle de 100 millions de tonnes de T.N.T., une grande partie du volcan Krakatoa fut volatilisée, faisant place à une dépression sous-marine de 300 m de profondeur. Ainsi, l'aspect de la zone, le détroit de la Sonde qui sépare Java de Sumatra, s'en est trouvé modifié. Ce n'est là qu'un exemple entre bien d'autres des changements subis par la Terre au cours des âges, car les déformations de la croûte, les tremblements de terre et les éruptions volcaniques ne cessent d'engendrer des reliefs, tandis que les pluies, les éboulements et les rivières tendent à la niveler par les processus d'érosion. Le principal agent érosif est l'eau, à travers le ruissellement, la dissolution karstique ou par l'alternance cyclique du gel et du dégel, mais la turbulence de l'atmosphère - le vent - joue aussi un rôle important. Les phénomènes célestes, aussi, déterminent des variations, cycliques parfois, comme dans le cas, par exemple, de la position de la Lune qui engendre le soulèvement périodique des mers responsable des marées. La surface de la Terre est fragmentée en une douzaine de plaques lithosphériques de grandes dimensions, une division qui ne correspond pas du tout à celle des continents et des nations introduites par l'homme. Tout au plus reflète-t-elle, dans quelques cas, les divisions naturelles que représentent, par exemple, les chaînes de montagnes. Les plaques ont une épaisseur de quelque 100 km et couvrent toute la Terre. Leur présence conditionne le développement des phénomènes géologiques superficiels et a conditionné aussi dans le temps la distribution des organismes vivants. Les plaques, par ailleurs, se déplacent l'une par rapport à 1 l'autre, expliquant le fait que des zones géographiques aujourd'hui très éloignées étaient, il y a des millions d'années, soudées l'une à l'autre. Selon les reconstructions actuelles, l'histoire de notre planète a commencé il y a 4,6 milliards d'années. De la matière interstellaire froide commença à s'amasser en une espèce de « nuage », qui avec le temps a fini par former un corps céleste primitif. L'impact d'autres corps planétaires contribua par la suite à en augmenter les dimensions et à la réchauffer. En effet, un « petit » corps céleste de 5 t par exemple, se déplaçant à la vitesse de 30 km/s pouvait libérer, en entrant en collision avec l'embryon de la Terre, ou Prototerre, une énergie égale à celle d'une explosion nucléaire d'une kilotonne. Une autre partie de l'énergie provint de la désintégration des éléments radioactifs présents dans le corps céleste, et cela détermina son réchauffement progressif, moindre dans la zone superficielle à cause du froid sidéral extérieur. C'est à ce stade que se produisit la stratification des éléments chimiques que l'on observe aujourd'hui. Les minéraux les plus denses, constitués d'éléments lourds tels que le fer et le nickel, précipitèrent vers le centre, où ils constituèrent l'embryon du noyau de la Terre, tandis que les éléments moins denses, constitués d'éléments légers comme le silicium, le sodium, l'aluminium et le calcium, restèrent à l'extérieur ou migrèrent vers la surface pour constituer le manteau et la croûte. Cette stratification conduisit à la formation de la croûte terrestre, à la naissance des continents et à la libération de gaz de l'intérieur et, ainsi, à la formation de l'atmosphère et des océans. L'INTÉRIEUR DE LA TERRE LES MÉTHODES D'ÉTUDE Il existe plusieurs façons d'obtenir des informations sur l'intérieur de la Terre. L'une est constituée par les forages profonds d'exploration, entreprises lancées dans les années 70 dans l'ex-Union Soviétique et en Allemagne. Le sondage le plus profond foré par l'homme, celui de Kola situé dans la péninsule homonyme de la Russie, a atteint 15 km de profondeur. Il a permis de recueillir de nombreuses informations pas seulement d'intérêt géologique. Contrairement à ce que l'on attendait, l'augmentation de température avec la profondeur s'est révélée plus faible que prévu. On a découvert aussi des micro-organismes fossiles dans des roches très anciennes. Le problème est que 15 km ne sont presque rien par rapport aux 6 370 km du rayon de la Terre. Ils ne représentent qu'une petite tranche superficielle très fine, même si sa perforation pose de gros problèmes techniques. Par exemple, il est très difficile de forer en se maintenant parfaitement à la verticale, comme de conserver un diamètre constant à cause des fortes pressions, et il est très onéreux de ramener à la surface des échantillons avec les 15 000 m de tiges de sondage. Un autre moyen d'étude est représenté par les volcans, de véritables « puits naturels », dont les magmas arrivent souvent de dizaines de kilomètres de profondeur. Le matériau qui se trouve à l'intérieur de la Terre doit ressembler d'une façon ou d'une autre à celui qui sort des volcans, même si ce n'est pas le même, parce qu'avant d'arriver à la surface, il traverse des kilomètres de roches différentes 2 qui en modifient sa composition (c'est ce qu'on appelle la contamination) ou qui font office de « filtres ». En tout état de cause, il doit être le fils du matériau originel. On a une idée des minéraux qui composent l'intérieur de la Terre grâce à trois possibilités : la remontée de matériaux profonds lors de certaines éruptions volcaniques ; l'observation de terrains formés en profondeur et remontés en surface lors de grands mouvements tectoniques ayant conduit à la formation de chaînes de montagnes, et affleurant pour former ce que l'on appelle des ophiolites ; des expériences de laboratoire où l'on observe la stabilité des minéraux en fonction des conditions de pression et de température qui règnent à l'intérieur de la Terre à différentes profondeurs. De très nombreuses données, enfin, proviennent de l'étude des tremblements de terre (sismologie). Les premiers à les utiliser comme moyen d'enquête furent les sismologues d'Europe et des États-Unis, frappés par le fait que les ondes acoustiques des séismes ayant eu lieu en différents points du monde, même s'ils étaient très distants l'un de l'autre, arrivaient en même temps. À cette occasion, on découvrit que les ondes sismiques ne sont pas toutes identiques, mais qu'il existe des ondes de compression et des ondes de cisaillement. Quand la Terre est sollicitée pendant une période très courte, comme dans le cas d'un tremblement de terre, elle réagit comme une corde tendue qui, quand on la pince, vibre et génère à l'intérieur des ondes élastiques. Comme toutes les ondes, celles-ci aussi se propagent à une vitesse différente selon, par exemple, la densité du sol. Dans le sable, elles sont moins rapides que dans des roches comme les calcaires ou les laves, et cette différence revêt une certaine importance quand les ondes sismiques sont enregistrées à la surface. En pratique, à partir de la différence de vitesse des ondes, on peut remonter au type de matériau qui se trouve en profondeur. La vitesse, en outre, dépend de la nature solide ou liquide du matériau, de la température, et augmente, comme presque toutes les caractéristiques physiques, avec la profondeur. LE MODÈLE EN « OIGNON » Selon les données actuelles, l'intérieur de la Terre est semblable à un ensemble de sphères concentriques, séparées par des discontinuités dans lesquelles on enregistre des changements nets et « soudains » de l'une ou de toutes les propriétés physiques ou minéralogiques typiques de notre planète. La croûte terrestre La croûte terrestre est la pellicule superficielle, froide, de la lithosphère ; la géosphère la plus externe du globe terrestre. Comme le reste de la lithosphère, elle est solide. La croûte est séparée du manteau lithosphérique par une discontinuité sismique brusque (les vitesses des ondes élastiques passent d'environ 7 km/s à 8 km/s) traduisant un changement dans la composition chimique des roches : c'est la discontinuité de Mohorovicic (géophysicien yougoslave) ou en abrégé, le «Moho». Les géophysiciens distinguent deux types de croûtes à l'histoire et aux caractéristiques complètement différentes. 3 La croûte continentale Elle forme l'assise des continents et de leurs marges submergées (marges continentales) sur une superficie qui représente environ 40 % de celle de la planète. Cette croûte est relativement légère (densité : environ 2,7) et flotte sur le manteau supérieur. Étant insubmersible, la croûte continentale préserve pratiquement toutes les étapes de sa formation (elle est seulement érodable sur certaines de ses marges par les zones de subduction ou peut être refondue par en dessous et redigérée par le manteau) et peut avoir un âge considérable (jusqu'à près de 4 milliards d'années au centre des vieux boucliers). L'épaisseur moyenne de la croûte continentale est de 35 km, avec des extrêmes de 15 à 20 km dans les zones en forte extension et de 70 à 80 km dans les chaînes de collision. Dans sa partie supérieure, la croûte continentale, lorsqu'elle est soumise à des déformations, réagit de manière cassante ou fragile. À plus grande profondeur, avec l'augmentation de la température elle se comporte de manière ductile. La croûte océanique Elle recouvre le reste de la Terre. Créée à l'axe des dorsales d'accrétion océanique, elle est très peu épaisse (5 à 7 km) et sa densité (environ 3) croît avec l'âge ; elle finit par être absorbée (avec le reste de la lithosphère dont elle est solidaire), dans le manteau asthénosphérique, voire plus profondément encore (mésosphère). Il en résulte que l'âge de la croûte océanique qui forme le plancher des océans n'est jamais plus vieille que 200 millions d'années environ. La croûte océanique est constituée de roches de nature basaltique issues de la fusion partielle des péridotites du manteau. La croûte continentale s'est formée à partir de processus de différenciation magmatique du basalte océanique dans les arcs insulaires par le biais de la subduction ; elle est formée de roches métamorphisées en profondeur - dont la composition est voisine de celle du granite. À environ 2 900 km de profondeur se trouve la « discontinuité de Gutenberg », qui sépare le manteau du noyau terrestre. Le noyau, enfin, présente une surface de discontinuité interne qui sépare un noyau externe « liquide » d'un noyau interne « solide ». Comme on l'a vu précédemment, la température augmente avec la profondeur et l'on estime qu'au centre de notre globe (à plus de 6 300 km), elle est de l'ordre de 5 000 °C. On pense aujourd'hui que les discontinuités qui caractérisent l'intérieur de la Terre se succèdent de manière régulière, autrement dit la Terre ressemblerait à un oignon. En revanche, ces discontinuités ne semblent pas statiques comme on le pensait autrefois. Le Moho, par exemple, est déterminé par les géophysiciens du monde entier, mais dans certaines zones, à des profondeurs deux ou trois fois plus grandes que dans d'autres. Cela signifie que ces discontinuités elles aussi ont une histoire, et qu'on peut en rencontrer de « fossiles », et que d'autres se formeront. Les discontinuités découvertes par l'analyse des ondes sismiques séparent des portions de la Terre qui ont une composition et un état physique différents. Il s'agit de trois ou quatre « couches » d'épaisseur variable - lithosphère, manteau, noyau externe et noyau interne - qui occultent la réponse à de nombreuses questions et, en particulier, à l'une d'elles : de quoi la Terre est-elle faite ? Qu'y a-t-il exactement sous nos pieds ? 4 Même si jusqu'à présent il n'a pas été possible de savoir quels matériaux cache l'intérieur de la Terre, on peut faire certaines suppositions sur la base des caractéristiques physiques de la planète, en l'imaginant en particulier comme un corps solide quelconque. Le paramètre le plus caractéristique est probablement la densité, qui n'est pas la même partout. Dans les roches de la partie la plus superficielle, elle est en moyenne de 2,8 g/cm3 seulement. Il s'agit donc d'une valeur inférieure à la valeur moyenne globale terrestre, et cela signifie que les matériaux qui se trouvent à plus grande profondeur ont une densité plus grande, autour de 10-13 g/cm3. Des matériaux si lourds doivent être composés principalement de fer et de nickel, mais en théorie n'importe quel élément présentant cette densité pourrait constituer l'intérieur de la Terre. En passant des 3 g/cm3 des roches superficielles aux valeurs élevées du manteau et du noyau, la densité augmente considérablement, mais probablement pas de façon continue. Tout comme la densité, la vitesse des ondes sismiques augmente en général selon la profondeur. La lithosphère C'est l'enveloppe externe de la Terre, solide et rigide (d'où son nom qui vient du grec lithos: pierre, et sphère) contrairement au manteau, relativement visqueux. La lithosphère est constituée de deux couches : en surface, la croûte terrestre (océanique et continentale) ; en profondeur, la partie la plus superficielle du manteau. La différence entre la lithosphère et le manteau asthénosphérique sous-jacent, n'est donc pas de nature chimique ou minéralogique, mais imputable à un changement d'état physique : de part et d'autre de cette discontinuité rhéologique (rhéologie, étude de la déformation des matériaux), on trouve le même manteau péridotitique, mais qui a subi, en dessous de cette limite, une fusion partielle. L'épaisseur moyenne de la lithosphère est d'une centaine de kilomètre, mais peut atteindre quelque 150 km sous certaines portions de continents, ou au contraire être réduite à quelque kilomètre sous les dorsales d'accrétion océanique (ou rides médio-océaniques) où se forme la croûte océanique par remontée, près de la surface, de l'asthénosphère partiellement fondue. En s'éloignant de la dorsale, donc en prenant de l'âge, la lithosphère océanique se refroidit progressivement et s'épaissit aux dépens de l'asthénosphère et s'enfonce dans le manteau où elle est recyclée. La lithosphère est découpée en calottes sphériques mises en mouvement sous l'effet de la circulation des cellules de convection qui brassent l'asthénosphère ; ce processus est appelé tectonique des plaques, et conduit à la formation des grands reliefs structuraux de la planète. La lithosphère, même si elle est rigide, peut se comporter de manière élastique quand elle est soumise à une surcharge ou - au contraire - quand elle est localement allégée par l'érosion : c'est le phénomène de l'isostasie. La lithosphère a une composition variable. Au-dessous des continents et sous les roches sédimentaires de couverture, elle est composée de roches métamorphiques et de roches ignées comme les granites. La lithosphère océanique est formée principalement de roches basiques comme les basaltes, les gabbros et, dans la partie la plus profonde, de péridotites. Plus en surface, elle est couverte par des dépôts sédimentaires (boues siliceuses, boues calcaires, argiles...) dont l'épaisseur 5 est d'autant plus grande que l'on s'éloigne de l'axe de la dorsale d'accrétion océanique où la lithosphère a été créée. De par sa composition, son épaisseur et ses caractéristiques dynamiques, il s'agit d'une croûte très différente de la croûte continentale. Une différence importante entre la lithosphère océanique et la lithosphère continentale tient à ce que la seconde se présente partout mal stratifiée et non homogène, tandis que la première se trouve toujours répartie en trois grosses « couches », appelées 1, 2 et 3, dont la composition est constante et varie selon la profondeur, mais est bien reconnaissable en chaque lieu de la Terre. En outre, la lithosphère supérieure océanique présente une épaisseur assez constante, beaucoup plus faible que l'épaisseur, plus variable, de la lithosphère continentale. En plus des différences d'âge dont nous avons déjà parlé, la croûte océanique est beaucoup moins déformée que la croûte continentale, elle ne présente pas de plissements (orogenèse) ni de déformations importantes et, enfin, a une activité ignée beaucoup plus développée. Asthénosphère et isostasie L'asthénosphère (du grec asthenos : sans force, et sphère) est la partie la plus visqueuse du manteau terrestre. Pendant longtemps les géophysiciens ont assimilé l'asthénosphère avec le manteau supérieur (jusqu'à une profondeur de 670 km), le manteau inférieur étant appelé mésosphère (du grec mesos : milieu) ; mais actuellement certains chercheurs ont tendance à restreindre cette couche supérieure à la zone de plus faible vitesse du manteau, là où elle est le plus plastique. Quoi qu'il en soit, le manteau supérieur est constitué de péridotites à olivine (de la famille des péridots, où l'atome de silicium est entouré de quatre atomes d'oxygène), de pyroxène et de grenat, jusque vers 400 km. Après une zone de transition, la composition cristalline de la partie sous-jacente du manteau supérieur, se modifie sous l'accroissement de la pression ; l'olivine est remplacée par une structure spinelle, plus dense, et le pyroxène et le grenat, par la majorite. À partir de 670 km la transition avec le manteau inférieur est encore plus brutale ; les minéraux précédents ne sont plus stables et sont remplacés par des structures cristallographiques encore plus denses : silicates de structure pérovskite (un atome de silicium entouré de six atomes de silicium) et magnétowüstites (oxydes de fer et de magnésium). Le manteau inférieur est alors 50 fois moins visqueux que le manteau supérieur. C'est grâce aux progrès récents obtenus en physique des hautes pressions qu'il fut possible de reproduire ces transformations de phase cristalline. Les plans de subduction ne pouvaient apparemment pas dépasser la limite de l'asthénosphère (ou du manteau supérieur) avec le manteau inférieur. Cependant selon certains travaux, certains de ces plans de subduction plongeraient jusqu'à la base du manteau. L'isostasie L'isostasie (du grec isos : égal et stasis : arrêt, équilibre ; terme introduit par l'Anglais Dutton en 1889) est la tendance naturelle à la compensation de type hydrostatique pour les reliefs de la croûte (lithosphère) terrestre qui perturbent le 6 géoïde. Ce dernier est la surface du globe terrestre correspondant au niveau moyen des mers et du prolongement estimé de celles-ci à l'intérieur des continents. Cette surface est normale en tous points à la verticale. Elle est équipotentielle de pesanteur (égale à la valeur de la gravité terrestre) et correspond conventionnellement à l'altitude zéro. Un excès (ou défaut) de masse introduit par un relief (ou un creux) est naturellement compensé par une anomalie de densité sous-jacente de symétrie opposée. L'isostasie implique que la lithosphère continentale, relativement légère, réagisse de manière élastique à une surcharge, parce qu'elle est rigide et qu'elle surmonte une asthénosphère, plastique, ductile, déformable. Si une contrainte tectonique n'intervient pas, il y a équilibre isostatique, tout comme le tirant d'eau d'un bateau varie avec son chargement. Les deux théories sur l'isostasie À l'origine de ces théories, il y a les observations faites sur les anomalies du fil à plomb dans le nord de l'Inde, naturellement dévié par la forte masse de l'Himalaya (comme le veut la théorie de l'attraction universelle de Newton) mais moins que ne l'indiquaient les calculs théoriques. L'Himalaya était donc moins lourd que prévu. Deux Anglais, Sir George Bridell Airy et l'archidiacre John Henry Pratt émettent la même année (1855) deux hypothèses différentes pour expliquer ce phénomène. Pour Airy, la compensation du relief est assurée par la présence d'une « racine » de même densité que celui-ci, mais plus légère que « l'encaissant » dans laquelle elle est plongée, l'asthénosphère. On sait maintenant que c'est ce phénomène qui se produit sur les continents. Pour Pratt, les variations d'altitude sont compensées par des variations latérales de densité au-dessus d'une surface de profondeur constante, la surface de compensation. Cette théorie n'a plus de valeur, aujourd'hui, pour les chaînes de montagnes, mais peut s'appliquer aux continents, pris dans leur ensemble, plus hauts (de près de 5 km) et plus légers que le fond des océans. Le modèle du Hollandais Vening-Meinesz reprend celui d'Airy mais fait intervenir une extension latérale de la racine sur un espace plus étendu que le relief. Le bouclier scandinave Un bel exemple de mécanisme isostatique est fourni par le bouclier scandinave. Englacé sous un inlandsis de plusieurs kilomètres d'épaisseur pendant plusieurs dizaines de milliers d'années, cette région du continent européen s'est affaissée, sous la surcharge, jusqu'à l'équilibre isostatique. La fonte des glaces en revanche fut rapide (entre environ - 15 000 ans et - 8 000 ans), de sorte que le nouvel équilibre isostatique n'est pas encore réalisé : au centre du golfe de Botnie la vitesse de remontée du socle est de 9 mm/an, alors qu'à Copenhague ou Saint Pétersbourg, sur les marges de l'ancien glacier, l'équilibre est déjà atteint (aucun mouvement vertical). Le manteau 7 C'est parmi les quatre géosphères formant l'intérieur du globe terrestre (croûte, manteau, noyau externe et graine), l'enveloppe la plus importante, représentant 84 % du volume et 68 % de la masse de ce dernier. Situé immédiatement en dessous de la mince croûte terrestre, le manteau descend jusqu'à 2 991 km de profondeur, à la limite avec le noyau. On distingue un manteau supérieur jusqu'à - 670 km et ensuite un manteau inférieur. À l'exception de sa couche la plus superficielle (le manteau lithosphérique descendant jusqu'à 100 km de profondeur environ), qui est solide et rigide, le reste du manteau est solide, mais, à l'échelle des temps géologiques il est déformable et plastique. Le manteau est constitué de roches silicatées, du type péridotite (composées essentiellement de péridots - comme l'olivine - et de pyroxènes, silicates ferromagnésiens avec une proportion plus réduite de calcium et d'aluminium), que l'on retrouve en surface dans les ophiolites ou dans les enclaves remontées lors de certaines éruptions volcaniques. Les cellules de convection dans le manteau Par suite de la désintégration radioactive de l'uranium, du thorium et du potassium qu'il renferme en son sein, le manteau produit de la chaleur. Il subit donc une fusion partielle, c'est-à-dire qu'une petite partie (rarement plus de 20 %) des péridotites se transforme en liquide (le magma primaire), ce qui lui confère une certaine plasticité (ou viscosité). Cette chaleur se dissipe en remontant (à raison de quelques cm/an) la matière chaude sous la lithosphère, et qui, refroidie, redescend ensuite. Il se forme ainsi des cellules de convection. La disposition de ces cellules reste encore largement hypothétique. Sont-elles arrangées en deux couches : l'une dans le manteau supérieur où ces cellules constituent le moteur de la tectonique des plaques, l'autre dans le manteau inférieur ? Il est probable qu'en réalité, leur disposition est beaucoup moins géométrique, avec des cellules brassant localement la couche supérieure, d'autres la couche inférieure, et d'autres encore circulant dans toute l'épaisseur du manteau. En effet, en tomographie sismique (étude des anomalies de transmission des ondes sismiques provoquées par des différences de température), on observe que certains plans de subduction (décelables à cause de leur température plus basse) plongent jusqu'à la frontière avec le noyau. La combinaison de la tomographie sismique, de la géodésie, de la physique des matériaux et de la modélisation numérique, permet de visualiser ces hétérogénéités de température et de densité à l'intérieur du manteau et à la surface duquel elles se manifestent par des déformations de 400 m d'amplitude. La couche D" À la base du manteau, existe une enveloppe anormale de quelque 200 km d'épaisseur, plus chaude, la couche D" qui assure un certain couplage thermique entre le noyau et le manteau. On estime que les points chauds les plus puissants y prennent naissance pour remonter, à une vitesse de quelques décimètres par an, 8 jusqu'à la surface du globe où ils engendrent de volumineux systèmes volcaniques comme ceux de l'archipel des îles Hawaï. La composition du manteau s'adapte au fait que la température et la pression augmentent proportionnellement à la profondeur. À quelques centaines de kilomètres de profondeur, la péridotite devrait être beaucoup plus compacte, autrement dit elle devrait présenter peu d'espaces vides entre les molécules, précisément pour mieux s'adapter aux fortes pressions exercées par la charge des roches sus-jacentes. Le noyau Si l'accès à la connaissance de la composition du manteau terrestre est difficile, comme on l'a vu plus haut, celle du noyau, situé sous la discontinuité sismique de Gutenberg, l'est encore plus. Et l'on doit faire appel à des méthodes indirectes basées sur la sismicité, le champ de gravité terrestre et l'étude des météorites. Le noyau est, comme l'indique son nom, la partie centrale de la sphère terrestre dont il représente 16 % en volume et environ 31 % en masse. Le noyau est séparé du manteau (silicaté), vers 2 991 km de profondeur, par la discontinuité chimique et physique la plus brutale de la planète : la discontinuité de Gutenberg où l'on passe brusquement d'une densité d'un peu moins de 5, à la base du manteau, à 9,9. À partir de considérations complexes faisant intervenir la propagation des ondes sismiques (par exemple les ondes S ne traversent pas les milieux liquides), le champ de gravité et la composition des météorites, on en déduit que le noyau est constitué essentiellement de fer auquel s'ajouteraient quelques éléments diluants comme le silicium (7 %), le nickel (5 %), l'oxygène (4 %), le soufre (2 %). Le noyau se subdivise en deux sous-ensembles : une enveloppe ou noyau externe, liquide, épaisse de 2 259 km, et la graine, solide, d'un rayon de 1 221 km avec une densité de 13,1 en son centre. C'est au sein du noyau que prend naissance le champ magnétique terrestre de la Terre. La rotation de notre planète et les mouvements de convection (thermique, et/ou due à des différences de composition) affectent la masse métallique (conductrice) liquide du noyau externe et créent des écoulements suivant des colonnes hélicoïdales parallèles à l'axe de rotation. Les mouvements engendrent des courants électriques qui, à leur tour, induisent un champ magnétique dipolaire qui s'auto-entretient : c'est la géodynamo. Les changements des caractéristiques du champ magnétique terrestre, et notamment les renversements périodiques de sa polarité (inversion magnétique des pôles), seraient attribuables à des perturbations de l'écoulement de ces courants de convection à l'intérieur du noyau externe. Une inversion magnétique peut se produire en quelques milliers d'années. LA CHALEUR DE LA TERRE La Terre est un corps chaud en équilibre thermique, c'est-à-dire qu'elle ne se transforme pas en une énorme boule incandescente parce qu'elle disperse la chaleur qu'elle produit. 9 Le flux thermique transporté de l'intérieur vers la surface est mesuré au moyen de forages. Les échantillons recueillis permettent de déterminer la conductibilité thermique, c'est-à-dire qu'on mesure combien de chaleur ces roches sont en mesure de transmettre. Au-delà de 100 m de profondeur, la température augmente constamment, d'à peu près 33 °C chaque kilomètre. De ce point de vue, on peut distinguer des zones à flux de chaleur normale (environ 99 %), avec des valeurs situées autour de 0,50-0,60 W/m2, et des zones thermiquement actives (ou thermales, environ 1 %), dans lesquelles le flux dépasse parfois 1 KW/m2, mais où il est, en général, d'environ 1 W/m2. Le gradient thermique de 33 °C/km n'est pas toujours constant. Si c'était le cas, à 1 000 km la température serait de 2,5 x 104 K, ce qui serait évidemment impossible puisque, à ces températures, il ne peut pas exister de matière à l'état solide. Cette chaleur est produite par la désintégration d'éléments radioactifs (radioactivité) comme l'uranium, le thorium et le potassium, contenus dans les minéraux du manteau. Elle est transportée en surface sous forme de courants de matière ascendants très lents où elle se dissipe sous forme mécanique (mouvement des plaques) et de flux de chaleur. Le refroidissement qui s'en suit provoque la formation de courants descendants froids en direction de l'intérieur du manteau. L'ensemble de cette circulation thermique forme ce que l'on appelle des cellules de convection. Une autre manifestation de ces transports thermiques profonds est représentée par les points chauds (hot-spots en anglais), où la chaleur remonte à la verticale sous forme de panaches chauds (hot-plumes en anglais) indépendamment du système des cellules de convection. On pense que les points chauds les plus puissants proviennent d'une zone thermique instable, la couche D'', située vers 2 900 km de profondeur à la limite manteau/noyau. Ces points chauds sont à l'origine d'un volcanisme particulier, généralement puissant, lui-même à l'origine par exemple, de l'île de La Réunion (volcan du piton de la Fournaise) ou d'Hawaii (volcans Kilauea et Mauna Loa). On estime que les points chauds les plus puissants sont relativement fixes les uns par rapport aux autres et servent de système de référence pour déterminer le mouvement absolu des plaques. Par la succession des constructions volcaniques qu'ils engendrent sur la plaque lithosphérique qu'ils perforent, on peut reconstituer la vitesse et la direction du déplacement de cette dernière. Par exemple, le point chaud qui est à l'origine de l'actuel volcanisme du Mauna Loa et du Kilauea, aux îles Hawaii, a également produit le volcan éteint de Kauai, au nord-ouest des îles Hawaii, et d'autres volcans sous-marins eux aussi éteints. Les volcans, de plus en plus vieux au fur et à mesure que l'on s'éloigne du lieu où se produit le volcanisme de nos jours, témoignent ainsi du mouvement de la plaque Pacifique au-dessus d'un point chaud stable et de sa position actuelle sous la grande île d'Hawaii. LE CHAMP MAGNÉTIQUE TERRESTRE En 1600, un médecin qui travaillait à la cour de la reine Élisabeth Ire d'Angleterre, William Gilbert, publia le livre De magnete, dans lequel il expliquait le fonctionnement de la boussole, en soutenant que « toute la Terre est un gros aimant », dont le champ fait sentir ses effets sur le petit aimant de l'aiguille de la boussole qu'il aligne selon l'axe nord-sud. Aujourd'hui, la plupart des chercheurs pensent que le champ magnétique ...