Les réseaux hydrographiques
Publié le 31/12/2018
Extrait du document
UN INSTRUMENT AU SERVICE DES POLITIQUES DE L'EAU
Pour le profane, un réseau hydrographique, c'est un fleuve et ses affluents.
Pour les spécialistes, c'est l'ensemble hiérarchisé des chenaux naturels ou artificiels qui assurent le drainage permanent ou temporaire vers l'exutoire des eaux provenant des sources et des ruissellements de surface d'un bassin-versant donné. Étant entendu que la notion de bassin-versant s'applique aussi bien à l'échelle d'un affluent qu'à celle du réseau hydrographique complet d'un fleuve, et que tout bassin est la partie superficielle d’un hydrosystème comportant aussi écoulements souterrains et nappes profondes.
La rigueur de la définition n'est pas gratuite. Généralisés à la planète, des phénomènes préoccupants comme l'accroissement des besoins et parallèlement des pollutions, la déforestation et la réduction des zones humides, l'aggravation des dommages causés par les crues dans les zones urbanisées ont fait de la connaissance des réseaux hydrographiques un enjeu central dans la mise en place de politiques de l'eau.
La modélisation du réseau hydrographique à travers la notion de bassin-versant répond à deux impératifs vitaux concomitants : prévenir les risques et pérenniser la ressource. Elle repose sur la mise en corrélation des multiples facteurs intervenant dans le fonctionnement des cours d'eau.
RÉSEAUX ET CYCLE DE L'EAU
0,02 °/o : c'est la part des réseaux hydrographiques dans les eaux de la Terre, contenues à 97,39 % dans les océans et les mers, à 2,01 % dans les inlandsis, le permafrost et les glaciers, à 0,58 % dans le sol et les nappes profondes.
La modestie de cette quantité est compensée par le rythme de son recyclage. Le temps de résidence (vitesse de renouvellement) des eaux est de 30000 ans pour les océans, 16000 ans pour les calottes glaciaires, 300 ans pour les nappes souterraines ; il n'est que de 10 à 20 ans pour les lacs et de quelques semaines pour les cours d'eau.
Comme toutes les eaux terrestres, les eaux de ruissellement sont soumises au cycle hydrologique.
Lé CYCLE HVDROLOGIQUE
Régi par le soleil, il comporte les phases suivantes :
• Évaporation des eaux océaniques et à moindre part des eaux continentales.
• Condensation de cette masse humide en nuages transportés par les vents.
• Précipitations météoritiques (pluie, neige, grêle) ou « occultes » (rosée, gelées blanches, givre).
• Évaporation et évapotranspiration (restitution à l'atmosphère de l'eau interceptée par les sols et les plantes), infiltration superficielle, percolation et stockage souterrain, ruissellement des eaux précipitées.
• Restitution de l'eau aux océans par les calottes glaciaires,
les écoulements souterrains et les réseaux hydrographiques. Des échanges de 40000 km3/an équilibrent entre phase océanique et phase continentale du cycle un bilan évaporation/précipitations à peu près nul. L’océan contribue pour 86 % à l'évaporation et pour 78 % aux précipitations. La différence de 8 % se retrouve sur les continents dans l'excès des précipitations sur l'évaporation et est à l'origine des écoulements. Sa distribution, qui obéit à des facteurs climatiques et géomorphologiques, est loin d'être homogène.
Répartition des réseaux
Des régions du globe, totalement ou partiellement arides, sont dépourvues de réseaux. D'autres, bien arrosées, drainent des quantités d'eau considérables. Le Canada
(30 % des réserves mondiales d'eau douce) recueille 6 % des eaux de ruissellement ; le bassin amazonien déverse 5 % du total des eaux rendues aux océans par l'ensemble des réseaux. Les variations du rapport entre les trois grandes composantes de la phase
«
de
l'interaction entre oscillations
régulières ou exceptionnelles de
la pluviométrie et de l'évaporation
et facteurs d'écoulement : cadre
morphologique et géologique, pente,
couvert végétal, dégel d'amont ou
d'aval (phénomènes d'embâcle et
de débâcle en Sibérie et au Canada).
• " Simple », il comporte annuellement
une seule alternance de basses eaux ou
maigres et de hautes eaux (Amazone).
"C omplexe », il en connaît plusieurs.
la complexité est « originelle » quand
elle s'applique à tout le cours (rivières
pyrénéennes et méditerranéennes
au régime influencé selon les saisons
par la neige, la pluie et l'évaporation).
le régime est " complexe changeant »
quand les cours moyen et inférieur
d'un fleuve acquièrent un régime
différent de celui du cours supérieur
(Rhône, Rhin, Danube, Congo).
Par ailleurs, l'intégration des données
météorologiques et géographiques
(latitude et altitude) affine la typologie :
régime nival de plaine des fleuves
sibériens, régime pluvial tropical
de montagne (Mékong), régime
évapo-pluvial de plaine (Seine), etc.
• les crues sont différentes selon les
régimes : " crues éclair » de fin d'été
de type cévenol, avec précipitations
massives et brèves sur sol sec et
ruissellement rapide vers le collecteur ;
crues hivernales de redoux, avec
précipitations sur sol imperméabilisé
par le gel ; crues estivales de fonte des
glaciers, crues de superposition : fonte
estivale des glaces dans le haut cours
du Mékong + mousson automnale
dans le cours inférieur.
• les notions de « crue décennale »
et « centennale » indiquent un ordre
de fréquence et sont sans valeur
prédictive dans le temps ; déterminées
par référence aux plus hautes eaux
observées, elles ne donnent qu'un
ordre de grandeur quant à l'ampleur
des futurs épisodes.
LES RÉSEAUX ET LES HOMMES
À tous ces paramètres complexes et
interagissants s'ajoute l'Impact humain
sur la dynamique des écoulements et
sur la qualité des eaux rendues après
utilisation, parfois sur la pérennité
des systèmes hydrographiques.
CRUES ET INONDATIONS
Nécessaires à l'équilibre dynamique
du cours d'eau, au maintien des milieux
humides limitant les maigres (basses
eaux) et à la recharge de la nappe
alluviale, ces phénomènes naturels
sont affectés par les modifications
qui touchent l'écoulement (retenues,
canalisation du lit), le ruissellemen�
l'infiltration et le stockage, mais aussi
l'évapotranspiration (changement
des pratiques culturales, déforestation,
urbanisation).
La crue
l'importance de la crue et la vitesse
de propagation de l'onde de crue
dépendent de différents facteurs : •
l'alimentation et la pente ont
un effet évident.
• la géométrie du réseau (notion se
superposant à celle de structure) joue
un rôle selon qu'on est en « feuille de
chêne », avec un système complexe
d'affluents et de sous-affluents
tout au long du cours principal ;
en " peuplier», avec des affluents
simples régulièrement répartis ;
en " pin parasol », avec des tributaires
regroupés dans le cours supérieur.
Pour un épisode pluvieux affectant
tout le réseau, les crues se succèdent
(1" cas) ou se superposent (3' cas).
• les réservoirs naturels ou artificiels,
libérant l'eau graduellement,
« écrêtent» la crue -selon leur
importance.
Au Canada, la rivière
Saskatchewan, alimentée par un petit
nombre de lacs, a un débit maximal de
59 fois son débit minimal.
En revanche,
�--�:;�-:--- - '-
�- ·--...,
��- .....
_.,_,__
le débit maximal du Sa/nt-Laurent,
qui draine les Grands lacs, n'est
que de 2 fois son débit minimal.
la construction de barrages
hydroélectriques ou écrêteurs
a le même effet.
• la nature des sols et des pratiques
culturales influent dans la mesure où
l'infiltration et la percolation réduisent
le ruissellement Ainsi, un manteau
imperméabilisé par la sécheresse ou
l'urbanisation favorise le ruissellement,
amplifie la crue et accélère sa vitesse.
Il en va de même des cultures peu
rétentrices (par exemple la vigne),
ou perpendiculaires aux courbes
de niveau, de la suppression des haies
ou des labours sur grandes parcelles
à la saison des pluies.
• la rétention par le couvert végétal
(forêt de feuillus et de conifères :
30 •Jo; prairies : 25% ; cultures : 15 %)
produit un retardement de la réaction
hydrologique perçue à l'exutoire.
L'inondation
le phénomène est multiple.
• l'inondation des terres avoisinant
le lit d'un cours d'eau permet
mécaniquement l'expansion de
la crue et la ralentit, l'infiltration
et l'évapotranspiration en diminuant
également le volume.
Au contraire,
l'endiguement ou la canalisation
du cours reporte la totalité de la crue
en aval ; il augmente aussi les risques
d'inondation en cas de rupture.
• En milieu urbain, le sous
dimensionnement de la voirie
souterraine, alors même que le
coefficient de ruissellement est élevé,
peut provoquer par engorgement
une inondation des quartiers bas.
la canalisation du cours dans la
traversée des agglomérations entraîne
ainsi une hausse du niveau de la crue
et le risque d'une mise en charge des
ouvrages d'art par des débris végétaux
ou autres, avec embâcle et inondations
collatérales.
la réalisation de réservoirs
écrêteurs en amont des villes perme�
dans une certaine mesure, de protéger
celles-ci (Paris n'a jamais été inondé
depuis la crue centennale de 1911) -
sans aucune certitude, néanmoins,
concernant l'avenir.
CRUES
ET INONDATIONS :LES LEÇONS À nRER complexes
: application des objets
fractals pour dégager des lois de
puissance des résea ux ; modélisation
de la pluviométrie et de l'écoulement
(indice de densité du drainage,
rapport de confluence, indices
•
24 août 1987 -la crue du bassin
de la Reuss (Suisse) atteint 125 %
du volume de la crue centennale
et fait s'écrouler digues et remblais
d'autoroute et de chemin de fer.
Dès 1991, les autorités fédérales
prennent la décision de dévier
à l'avenir les crues vers des terres
agricoles, pour mettre à l'abri villes
et zones industrielles.
la répétition
en 1993 et 2000 d'épisodes similaires,
attribués par certains observateurs
au réchauffement climatique, leur
donne à l'évidence raison.
..
.
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..........
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-
........
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• 22 septembre 1992 -V• lsoii -1•
R-/ne est dévastée par la crue
de I'Ouvèze.
Bilan humain : 36 morts.
les précipitations sur le massif des
Baronnies (300 mm en 6 heures)
n'avaient pourtant rien de bien
exceptionnel : sept épisodes de
même importance avaient eu
lieu depuis 1915, sans entraîner
de crue d'une telle violence et des
conséquences si tragiques.
Mis en
cause : la modification du couvert
végétal des versants (remplacement des
oliviers par les vignes et la
lavande, arrachage de haies) ; le
calibrage du lit ; l'augmentation de
l'Imperméabilisation des sols par la
voirie urbaine ; le défaut d'entretien
des berges ; la plantation, à la place
d'aulnes, de peupliers déracinables,
responsables de la mise en charge
des ouvrages d'art ; la construction
dans le lit majeur d'habitations, de
surfaces commerciales, industrielles
ou de loisir.
Remèdes : la réalisation de
dérivations, l'interdiction de construire
en zone inondable ...
et un système
d'alerte plus performant- système
qui fera la preuve de son efficacité
en 2004.
• Hiver 2001 -le bassin de la Somme
connaît deux longs mois d'inondation.
l'accusation est lancée d'un
détournement des eaux du bassin
adjacent de la Seine pour épargner
Paris.
le Bureau des recherches
géologiques et minières (BRGM)
dément et met en évidence l'impact
sur l'Inondation du niveau élevé
des nappes souterraines après des
hivers pluvieux et la diminution de
la capacité de stockage des terrains,
habituellement insaturés, situés
entre la surface du sol et l'aquifère .
la conclusion tirée est la mise sous
surveillance du niveau des nappes
afin de corréler à l'avenir données
hydrologiques et hydrographiques.
de
pente, hydrogrammes de crue) ;
représentation du bassin en 3 D
(modè le numérique de terrain) ;
cartographie par satellite du couvert
végéta l et de l'occupation des sols,
pour estimer la propension au
ruissellement d'un versant et
le transfert précipitations-débit;
construction de modèles hydrologiques
en zone urbaine, etc.
l'étude du bassin
hydrologique, incluant écoulement
et nappes souterraines (surveillance
piézo-électrique du niveau des nappes,
bilan hydrologique), complète cette
batterie.
DES POLITIQUES DE BASSIN
les politiques dites " de bassin »
consistent à associer tous les
utilisateurs d'un bassin-versant en vue
d'une gestion raisonnée des risques
et de la ressource.
la France a eu en
l'occurrence un rôle pionnier, avec
la création de six comités de bassin
et agences de l'eau correspondantes
(loi de 1964).
Ces politiques s'appuient sur une
mise en observation des réseaux
par des stations hydrométriques et
météorologiques, la construction
d'ouvrages écrêteurs ou de dérivation,
f--------------,---------------l la publ ication de cartes des zones
• Enfin, la conjonction d'une crue du
réseau et d'une crue de nappes avec
saturation des couches superficielles
produit des inondations de longue
durée, comme dans la Somme
durant l'hiver 2001.
lEs ATTEINTES À lll IESSOUICE
Citons quelques exemples parmi
d'innombrables cas.
• Sans conteste le plus spectaculaire,
avec ses conséquences climatiques:
l'assèchement partiel de la mer d'Aral
suite au pompage de ses tributaires,
Amou-Daria et Syr-Daria, pour irriguer
les cultures de coton.
• Moins connu, mais non moins
dramatique, est le cas du bassin du
Magdalena {241 000 km'; 8 100 m'/s)
en Colombie.
les villes de Cali, Bogota,
Barranquilla et Cartagena s'alimentent
en eau dans les tributaires de ce fleuve
et y rejettent leurs effluents.
En aval
de Bogota (4,5 millions d'habitants),
la rivière portant le nom de la capitale,
la Bogota, conflue avec le Magdalena
et rend son eau totalement impropre
à la consommation.
•
Au Brésil, enfin, où l'Amazone était inondables.
Elle a aussi pour but la
préservation de la qualité des eaux de
ruissellement et des nappes profondes.
En la matière, l'Union européenne a
adopté en 2000 une loi-cadre qui tient
compte du caractère transfrontière des
bassins et a valeur contraignante pour
l'épuration des eaux usées.
Au plan
international, la Convention sur les
zones humides (Ramsar, Iran, 1971),
dont la dernière conférence remonte
à
son étiage historique en octobre
2005, certains incriminent les coupes
massives dans la forêt amazonienne,
les projets de barrages faisant craindre
une profonde perturbation du système
climatique de l'Atlantique si le rejet
d'eau douce dans l'océan (300 km de
pénétration) diminuait durablement.
LE BASSIN -VERSANT à
1999, fonde ses recommandations
sur " les bassins hydrographiques
Ces multiples problèmes ont entraîné,
au plan tant national qu'international, ou
bassins-versants », notant que
" la mise en valeur rapide et non
durable des zones humides et des
bassins hydrographiques [ ...
]est
facteu r de perturba tion pour les cycles
hydrologiques naturels, avec bien
souvent une fréquence et une gravité
accrues des inonda tions, des
sécheresses et de la pollution ».
la
mise en place de politiques de
bassin.
À leur service, une modélisation
toujours plus pointue du bassin-versant.
UNE MODtliSIITION POUSS�E
Les instruments utilisés en la matière
par les spécialistes sont nombreux et
PAlMARÈS DES GRANDS BASSINS
Par surface
1 Amazone : 6 950 ooo km'
Congo : 3 800 ooo km'
Mississippi : 3 229 000 km'
4 Nil : 2 849 ooo km'
Ienisseï : 2 554000 km'
6 Ob : 24 80000 km'
7 lena : 24 20000 km'
8 Para na : 2 340 ooo km'
9 Yangzi Jiang : 1 960 000 km'
10 Amour : 1 930 000 km'
11 Mackenzie : 1 800 000 km'
12 Volga : 1 380 000 km'
13 Zambèze: 1 350000 km'
14 Niger : 1 100 ooo km'
15 Orénoque : 1 080000 km'
16 Gange : 1 070 000 km'
17 Murray : 1 070 000 km'
18 Nelson : 1 070 000 km'
19 Saint-laurent : 1 030 ooo km'
20 Indus : 950 ooo km' Par
débit : débit moyen -débit spécifique
1 Amazone : 185 000 m'/s -30 Ifs/km'
2 Congo : 42 ooo m'/s- 11,1 Ifs/km'
Yangzi Jiang : 34 000 m'/s -17,6 1/s/km'
4 Orénoque : 31 000 m'fs -28,5 Ifs/km'
Brahmapoutre : 20 000 m'/s -30 Ifs/km'
6 Mississippi : 18000 m'/s- 5,61/s/km'
Ienisseï : 17 400 m'/s -6,7 Ifs/km'
Tocantins : 16 200 m'/s -191/s/km'
9 Gange : 16100 m'/s- 151/s/km'
10 Parana: 16000 m'fs- 6,81/s/km'
11 Mékong : 15 500 m'/s -19,5 1/s/km'
12 lena: 15400 m'/s- 6,41/s/km'
13 Irrawaddy: 13000 m'/s- 30,21/s/km'
14 Ob : 12 500 m'/s - 51/s/km'
15 Xi Jiang : 12000 m'/s- 27,21/s/km'
16 Amour : 11 000 m'fs- 61/s/km'
17 Saint-laurent : 10 300 m'fs -10 Ifs/km'
18 Magdalena : 81 00 m'/s- 30,81/s/km'
19 Volga : 80 00 m'/s- 5,81/s/km'
20 Columbia : 7 soo m'fs -11,2 1/s/km'.
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