LES ANNÉES Son - La radio de 1920 à 1929 : Histoire
Publié le 01/01/2019
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Les années vingt, ce sont les «années son» : les pittoresques pavillons-volubilis ornent alors de leurs formes végétales tous les phonographes et commencent à remplacer les écouteurs de TSF. Ils vont fleurir dans tous les lieux publics et envahir les foyers un tant soit peu aisés. Il est difficile d’imaginer l'extraordinaire tintamarre de borbo-rygmes et de grésillements, de voix grêles ou vociférantes, de chuintements et de gazouillis qui sert d’aubade à ces deux nouveaux membres de la famille que sont le tourne-disque et la radio... Deux inventions dont les principes étaient au point avant le début du siècle, mais qui n'auront trouvé leur place dans la vie sociale qu'une fois dissipées les horreurs de cette Grande Guerre que l'on croit être «la der des ders»...
Radio days
C’est pourtant dans les tranchées (allemandes) que la TSF a recruté ses premières troupes d’auditeurs, dont Berlin soutenait le moral à coup de concerts beethovéniens. Mais c'est aux États-Unis que la radio moderne trouve sa voix : le 2 novembre 1920, à côté de Pittsburgh, un ingénieur de Westinghouse Electric and Manufacturing Company, Frank Conrad, retransmet en direct la débâcle de Wilson aux élections. Un orchestre, d'une tente voisine, ponctue les résultats de ses cuivres patriotiques. La station s'appelle KDKA, et elle servira de modèle pratiquement immuable à toutes celles qui se créeront par la suite (dont RCA qui met en service sa première station le 1er octobre 1921) : dans les décennies qui suivent, il n’y aura guère de radio américaine qui ne portera pour seul nom d’hermétiques initiales et qui ne se distinguera des autres que par la proportion de musique et d’information brute dans un flot ininterrompu.
En effet, les émissions musicales ont d'emblée investi les ondes. Une statistique de 1927 évalue à 74 % la part qu'elles occupent dans l'ensemble des émissions américaines. Dès 1881, un certain Adler avait eu l’idée géniale de retransmettre les soirées de l'Opéra de Paris... par téléphone! Et en 1910, quelques radioamateurs new-yorkais avaient pu capter la première émission lyrique sans fil depuis le Metropolitan Opéra où Caruso chantait Paillasse. À partir de 1921, la station KYW fait entendre régulièrement à ses auditeurs les spectacles du Chicago Civic Opéra; par la suite, ces retransmissions de prestige joueront un rôle dans la concurrence acharnée entre les grands réseaux qui se mettent en place : NBC, CBS et surtout RCA qui lancera en 1928 l'émission Educational Hour où le chef d'orchestre Walter Damrosch s’efforce «d'initier les enfants américains à la tradition musicale européenne».
Le jazz naissant occupe très vite une place essentielle dans les programmes : une fois encore, KDKA fait figure de pionnier, avec, dès 1922, une émission, «Jazz versus Classics». Plutôt que de jazz «hot», authentique, il s’agit généralement de jazz symphonique et de musique légère aux accents jazzy, au mieux des jazzmen blancs les plus célèbres : ainsi, six ans après avoir enregistré le premier disque de jazz, l’Original Dixieland Jass Band bénéficie du premier «broadeast» en direct, depuis le Copley-Plaza de Boston en 1923. Mais peu à peu, les ondes incolores défient la ségrégation : à partir de 1925, les radios américaines diffuseront très patriotiquement «leur» jazz, noir ou blanc, vers la Grande-Bretagne, l’Australie et l'Afrique du Sud. Deux ans plus tard, un câble radio est installé en permanence au Cotton Club de Harlem, et ainsi débute l'épopée du «jazz broadeast» qui ouvrira la «swing cra». Mais c'est le disque commercial qui est déjà la manne du «radio business», d’autant plus qu'à l’inverse de ce qui se passera en Europe, ce sont les mêmes compagnies privées qui trustent pêle-mêle la fabrication des émetteurs, récepteurs et phonographes, la majeure part de la production discographique et les stations de radio. La «toile d'araignée» de CBS et de NBC passera de 64 à 150 stations entre 1928 et 1930. Et, dans la même période, la publicité à la radio — qui a fait sa timide apparition dès 1922 à New York — a pris une telle importance que Ford dépense 1 000 dollars par minute pour le lancement de sa «model A». Il faut dire qu'en 1930 on recense aux États-Unis 12 millions de récepteurs et trois fois plus d’auditeurs contre seulement 4 millions de récepteurs en 1925.
Pourtant les radiophobes ne manquent pas : curieusement, les plus convaincus sont les radioamateurs, indignés de tout ce braconnage mercantile sur les espaces infinis qu'ils ont élus comme chasse gardée. Ils sont bien loin de partager l’enthousiasme de ce chroniqueur de San Francisco qui écrit en 1924 : «Il y a de la musique radiophonique sur les ondes partout, jour et nuit, et tout le monde peut l’écouter chez soi sur un récepteur que l’on peut monter en une heure.» Ce genre de poste en kit coûte quand même la bagatelle de 100 dollars; encore rudimentaire, il utilise une pointe en cristal de galène, et les premières «lampes» — assez puissantes pour servir de lampes de chevet! — ne s’allument qu’en 1925...
Malgré leur dépit, les radioamateurs se multiplient et continuent de jouer leur rôle de pionniers : ce sont eux qui développent l’usage des ondes courtes et c’est ainsi que le 27 novembre 1923 deux «sans-filistes» répondant aux doux noms d’appel de 1MO et 8AB réussissent la première liaison entre l'Amérique et l'Europe...
Sur le Vieux Continent, à cette date, la radio professionnelle en est à scs premiers balbutiements. C'est qu'elle a encore pour les autorités un arrière-goût de secret militaire, à tel point qu’en Allemagne la possession d’un récepteur à titre privé est punie de prison jusqu’en 1923! Le 15 juin 1920, la première émission européenne homologuée (une retransmission de concert à Chelmsford, en Grande-Bretagne) vaut à son auteur une plainte en bonne et due forme du «General Post Master» de Sa Majesté. Au mois de février 1922, c'est le général Ferrié qui, perché sur la tour Eiffel, envoie aux Parisiens leur première émission élaborée : au menu la météo, la Bourse et un radio-concert. La grande dame de fer sera pour longtemps la déesse des ondes et c'est de ses étages et de son antenne que viendront les premiers bulletins financiers (6 janvier 1923) et le premier «journal parlé» de Maurice Privât (3 novembre 1925). Mais dès février 1922, Émile Girardeau, un fabricant de matériel radio, est revenu des États-Unis enthousiasmé par la TSF «à l’américaine». Il fonde 79, boulevard Haussmann (avec émetteur à Levallois-Perret) la première station européenne homologuée (la Société française radioélectrique: SFR), qui diffuse son premier «cocorico» le 6 novembre, coiffant au poteau la BBC qui n'émettra que le 14. Ce minuscule
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LES
ANNÉES SON.
Naissance de la radio modeme: la compagnie
KDKA mransmer en di reer la défaire de Wilson à l'élecrion
présidemielle amériwine de novembre 1920.
© Tire Bettmann arclril'.
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