Wade, Abdoulaye
Publié le 07/04/2013
Extrait du document
1 | PRÉSENTATION |
Wade, Abdoulaye (1926- ), homme politique sénégalais élu président du Sénégal en 2000.
2 | UNE FORMATION UNIVERSITAIRE PRESTIGIEUSE |
Né à Saint-Louis selon une biographie officielle contenant de nombreuses zones d’ombre (dont, en premier lieu, sa date de naissance), Abdoulaye Wade est en réalité originaire de Kébémer, petite ville située dans la province de Louga (sur le territoire de l’ancien royaume de Cayor), entre Dakar et Saint-Louis — son père, ancien combattant de la Première Guerre mondiale, l’aurait fait enregistrer à Saint-Louis pour lui assurer la citoyenneté française. Issu d’une famille de notables, il fait ses études secondaires à l’école normale fédérale William Ponty de Sébikotane (Dakar). Muni d’une bourse d’études, il quitte le Sénégal pour la France où il fréquente les classes préparatoires scientifiques du lycée Condorcet de Paris (1951-1952). Il poursuit ses études de mathématiques, puis s’initie à la psychologie, à l’université de Besançon, où il est l’un des premiers étudiants africains — il y rencontre sa femme, Viviane, une Française, qui sera de toutes ses luttes politiques. Il se fixe sur les sciences sociales et obtient son doctorat de droit et sciences économiques à Grenoble en 1959.
3 | DU BARREAU À L’ASSEMBLÉE NATIONALE |
De retour au Sénégal en 1960, Abdoulaye Wade enseigne le droit à l’université de Dakar puis ouvre un cabinet d’avocats dans la capitale et devient avocat à la cour d’appel. Son pays vient d’accéder à l’indépendance et sa formation, combinée à une éloquence qui utilise à merveille les formules incisives, fait de lui une des personnalités les plus en vue du Sénégal.
Toutefois, la scène politique nationale est occupée par un homme de poids, Léopold Sédar Senghor, qui tient en main la seule formation autorisée, le Parti socialiste (PS). Abdoulaye Wade attend son heure, œuvrant en tant qu’expert et consultant pour des organismes internationaux publics et privés (Organisation de l’unité africaine, Banque africaine de développement, sociétés industrielles…). Le début de démocratisation instauré dans les années 1970 autorise l’existence de quatre tendances politiques : le socialisme, le progressisme, le libéralisme et le conservatisme. Le socialisme étant « déjà pris «, Abdoulaye Wade opte pour le libéralisme, alors que ses convictions le portent plutôt vers le travaillisme, et fonde en 1974 le Parti démocratique sénégalais (PDS). Il est élu député lors des élections législatives multipartites de 1978.
4 | UN PARCOURS D’OPPOSANT HISTORIQUE |
Lors de l’élection présidentielle de 1978, Abdoulaye Wade échoue face au président Senghor, qui s’inquiète de son activisme et le surnomme Ndiombor, « le lièvre « , en raison de son intelligence politique. Après sa décision de se retirer de la vie politique, en 1981, Senghor désigne Abdou Diouf, secrétaire général adjoint du Parti socialiste, pour assurer l’intérim jusqu’en 1983. Jusqu’au choix définitif de ce dauphin, Abdoulaye Wade croira pouvoir accéder à la magistrature suprême. Dès lors, une lutte politique sans merci s’engage entre les deux hommes qui se trouvent être originaires de la même région — Abdou Diouf est de Louga, une ville importante à une quarantaine de kilomètres de Kébémer. Abdoulaye Wade perd une première bataille lors de l’élection présidentielle de 1983.
La campagne présidentielle de 1988 est émaillée d’incidents sérieux et Abdoulaye Wade, qui accuse le pouvoir de fraude électorale, est arrêté dès le lendemain du scrutin. Ne cessant de critiquer le pouvoir, il écarte toute forme d’opposition violente et préconise au contraire le combat démocratique. En 1991, il accepte la proposition du président Diouf d’entrer dans la « majorité présidentielle «. De retour dans l’opposition dès l’année suivante, il connaît la prison à plusieurs reprises pour « flagrant délit continu «. En 1995, il entre une nouvelle fois au gouvernement, illustrant ce que les Sénégalais appelle la « transhumance politique «, et qu’il justifie autant par l’intérêt qu’il porte à son pays, qui l’engage au compromis avec le parti au pouvoir, que par la volonté de « ne pas être associé aux turpitudes du pouvoir «, qui le pousse à abandonner le gouvernement.
5 | L’ACCESSION À LA MAGISTRATURE SUPRÊME SOUS LE SIGNE DU CHANGEMENT |
Sous le mot d’ordre du sopi (« changement « en wolof), Abdoulaye Wade regroupe une grande partie de la jeunesse et les opposants de longue date à l’ancien parti unique. En mars 2000, il concourt pour la cinquième fois consécutive à l’élection présidentielle. À la tête de la coalition Alternance 2000, il affronte avec succès Abdou Diouf : avec plus de 58 p. 100 des suffrages au second tour du scrutin, Abdoulaye Wade accède finalement à l’investiture suprême et incarne la première alternance politique au Sénégal.
Les difficultés que le nouveau président sénégalais a à affronter au plan intérieur sont ceux d’un pays du tiers-monde : chômage, dette, hausse du prix des produits de base, baisse de celui des matières premières (arachide), dégradation des services (écoles, transports, électricité, santé publique, drogue). Il entend aussi faire face à l’insécurité grandissante et, surtout, au problème de la Casamance, où sévit depuis 1982 une sanglante rébellion indépendantiste.
Au niveau international, le président sénégalais est l’un des initiateurs du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD), et son intransigeance en matière de morale politique en fait l’un des grands porte-parole de l’Afrique subsaharienne. Cet engagement n’est pas sans irriter la population sénégalaise, qui reproche à son président d’être plus obnubilé par sa stature internationale que par la solution des problèmes du pays.
6 | UNE RÉÉLECTION SUR UN BILAN MITIGÉ |
Au terme de son premier septennat, Abdoulaye Wade doit faire face aux « déçus du sopi « (en particulier parmi les jeunes), qui lui reprochent de ne pas avoir tenu ses promesses en matière d’éducation et d’emploi notamment. S’il a multiplié les efforts en faveur de l’amélioration des infrastructures scolaires et lancé de « grands projets « (autoroute à péage pour désengorger Dakar, aéroport, plate-forme industrielle, modernisation du parc électrique, développement de l’exploitation minière), son bilan économique et social, affaibli par une crise de l’agriculture et de l’industrie, ne permet pas de réduire significativement la pauvreté et d’améliorer l’accès de la population aux services de base. Dans un contexte politique de plus en plus tendu — marqué notamment par l’emprisonnement en 2006 d’Idrissa Seck, ancien Premier ministre (2002-2004) et dauphin d’Abdoulaye Wade —, ses opposants dénoncent aussi une dérive autoritaire, une série de scandales financiers liés aux grands travaux ainsi qu’un État de plus en plus gangrené par la corruption et le népotisme. En Casamance, malgré la signature d’un accord de paix avec la rébellion en 2004, les affrontements reprennent dès 2006.
Le 25 février 2007, face à quatorze adversaires, le président sortant est toutefois réélu dès le premier tour avec près de 56 p. 100 des suffrages, à l’issue d’un scrutin entaché d’irrégularités mais valide selon les missions d’observation internationales. Réélu pour un mandat de cinq ans, il nourrit l’ambition de hisser le Sénégal au niveau d’un pays émergent grâce à une « stratégie de croissance accélérée « portée notamment par l’agriculture et l’industrie agroalimentaire, le secteur tertiaire (tourisme, téléservices), l’exploitation minière (minerai de fer) et la construction.
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