Devoir de Philosophie

Un économiste aux allures de monarque

Publié le 17/01/2022

Extrait du document

17 juin 2001 SIMÉON avait six ans quand son père, le roi Boris, est mort dans des circonstances restées peu claires au lendemain d'une convocation par Hitler, qui l'avait sommé en vain d'envoyer des troupes bulgares sur le front russe. « Je suis devenu adulte à six ans, a-t-il déclaré récemment. Alors, maintenant, je me sens comme Mathusalem. » Il a fêté très discrètement ses soixante-quatre ans à la veille de l'élection, en cette journée dite de « réflexion » pendant laquelle toute campagne électorale est proscrite et où il est interdit de servir de l'alcool dans les lieux publics. Sa mère, Giovanna de Savoie, et lui ont quitté la Bulgarie en 1946, sans qu'il ait abdiqué formellement, alors que les soviéto-communistes prenaient le contrôle du pays. Sa longue vie d'exil l'a conduit, entre autres, au Victoria College d'Alexandrie, où il a étudié au côté d'Hussein de Jordanie. Mais c'est en Espagne qu'il a passé l'essentiel de son existence. Il est devenu le familier du roi Juan Carlos et de la plupart des familles royales d'Europe, le plus souvent liées comme lui à la lignée des Saxe-Cobourg-Gotha. Parlant couramment six ou sept langues, il a fait des études d'économie et a occupé des postes d'administrateur dans plusieurs grandes sociétés. Il a exercé, pendant vingt ans, les fonctions - réelles ou honorifiques - de président de la filiale espagnole de Thomson Consumer Electronics. Il a épousé une Espagnole et a cinq enfants, qui ne parlent pas le bulgare. Quand la question a été évoquée, dimanche soir, Siméon II a répondu avec humeur que ses enfants parlent beaucoup d'autres langues et que, s'ils n'avaient pas appris le bulgare, c'est qu'il ne pensait pas que le régime communiste allait s'effondrer si vite. MYSTÉRIEUSES INTENTIONS Lui-même a attendu 1996 - soit plus de six ans après la chute du régime - pour revenir dans son pays, exactement cinquante ans après son départ. Mais il ne s'y est pas établi et a continué, jusqu'à ces derniers mois, à passer l'essentiel de son temps à Madrid. Avec une voix claire, une mince couronne de cheveux, des yeux perçants, un nez fort et une silhouette fine et très droite, Siméon a des allures très naturellement aristocratiques mais aussi des manières simples et aimables. Pourtant, il n'aime pas que ses ambitions soient contrariées. C'est après que la Cour constitutionnelle a décidé, au début de l'année, qu'il n'était pas éligible à la présidence de la République qu'il a lancé rapidement le « mouvement » qui vient de triompher aux élections législatives. Mais si ses intentions ultimes restent mystérieuses - peut-être d'ailleurs ne sont-elles pas fixées dans son esprit -, ses réflexes, son attitude à l'égard de la politique, sont bien un peu ceux d'un monarque. « L'important, a-t-il dit en français au soir de l'élection, c'est qu'il y eut bien cette synergie, cette communication entre moi et le peuple. » JAN KRAUZE

Liens utiles