TD – Droit constitutionnel général : Séparation des pouvoirs et interdépendance des organes
Publié le 20/07/2010
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« Le pouvoir doit se définir par la possibilité d’en abuser « nous dit André Malraux. Puisque l’essence même de la définition du pouvoir est puisée dans l’abus, existe-t-il alors un pouvoir sans abus ? Car on ne pourrait ainsi définir le pouvoir que par les limites qu’on lui donne. Le pouvoir aurait alors besoin de limites, sans quoi il se transformerait en abus de pouvoir. C’est en partant de ce postulat que Montesquieu dit que « pour qu’on ne puisse pas abuser du pouvoir, il faut, que, par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir «. Ainsi, le pouvoir nécessiterait une certaine autolimitation. J. Locke puis Montesquieu, auteurs respectivement des XVIIe et XVIIIe siècles, édictent alors le principe de séparation des pouvoirs. De cette théorie sont nés les organes nécessaires à l’administration de ces pouvoirs. Il a fallu alors définir comment les relations sont définies et applicable dans un régime séparant les pouvoirs. Or, comme nous pourrons le voir, la multitude d’applications divergentes de cette théorie à travers le monde montre à quel point l’interdépendance des organes d’administration des pouvoirs est, d’une part, capitale, d’autre part, susceptible d’interprétations diverses. On définit généralement le pouvoir par la capacité dévolue à une autorité ou une personne, d'utiliser les moyens propres à exercer la compétence qui lui est attribuée soit par la Loi, soit par un mandat dit aussi "procuration". En parlant de la séparation des pouvoirs, on désigne par « pouvoirs «, ceux de l’Etat dans l’objectif de la délégation que la Nation lui a donné par la voie de la représentation. Ainsi, ce n’est pas le pouvoir attribué à un homme que nous chercherons à définir, mais les différents pouvoirs octroyés à l’Etat pour diriger une Nation. Puisque la création d’organes chargés de pouvoir est consubstantielle à l’application de la théorie de séparation des pouvoirs, il nous appartiendra de définir tant cette théorie que les effets qu’instruit son application. Ainsi, comment, de la théorie à la pratique, la séparation des pouvoirs est devenue un principe obligatoire dans l’organisation des pouvoirs d’un pays démocratique ? S’il est un principe obligatoire, sont application n’en est pour autant pas aussi certain. Il est évident alors qu’il nous faudra alors prouver que la séparation des pouvoirs est un principe démocratique (I) et que l’interdépendance des organes de pouvoirs et l’effet obligatoire de la théorie (II). La séparation des pouvoirs : un principe démocratique La théorie de la séparation des pouvoir, introduit par Montesquieu, semble s’affirmer comme une nécessité (I) pour éviter l’abus de pouvoir que connait l’application des régimes de confusion des pouvoirs (II). En réaction face à l’absolutisme de l’Ancien Régime, les philosophes des Lumières, comme Montesquieu, ont émis la théorie de séparation des pouvoirs. Montesquieu recherche un régime qui puisse exprimer la liberté politique, qui n’est pas de faire ce que l’on veut, mais de se préserver de ce qui a habité toute la période d’avant la Révolution, c’est-à-dire le règne du pouvoir arbitraire du Roi. Pour lui, « tout homme qui a du pouvoir est porté à en abuser «. Ainsi, il faut que le pouvoir arrête le pouvoir, c’est une nécessité au nom de la liberté politique. Pour cela, il est évident que l’ensemble des pouvoirs ne doit pas se trouver entre les mêmes mains afin d’éviter que ces mêmes mains puissent agir de façon abusive. C’est alors que, dans le but de ne pas abuser du pouvoir, il faut le diviser, en séparer chacun de ses constituantes. C’est alors qu’est née la théorie de la séparation des pouvoirs. Mais, s’il faut séparer le pouvoir, que peut-on en dissocier ? Montesquieu détermine les trois grands pouvoirs que possède, par l’intermédiaire de ses représentants, l’Etat. Au nombre de trois, l’auteur les nomme « puissance législative, puissance exécutrice de l’Etat, puissance de juger «. Alors que la première fait les lois, les modifie et les abroge, la seconde s’occupe de la sûreté, des ambassades, de la Défense, dans le respect et l’application des choses édictées par la première. La dernière, considérée comme « nulle « par le philosophe, concerne le pouvoir de « punir les crimes ou de juger les différends entre particuliers «. Il est important alors que ces trois puissances qui forment ensemble le pouvoir arbitraire de l’Etat ne soient pas attribuées à la même entité, dans le respect des libertés. Mais Montesquieu n’exige pas au travers de sa théorie que les trois pouvoirs soient disposés en trois organes distincts, mais qu’ils ne soient pas tous réunies au sein d’une même personne ou d’un même corps. Ainsi, la séparation des pouvoirs évite que le représentant de l’Etat abuse des pouvoirs qui lui sont conférés. L’exemple même de la nécessité de cette théorie est les régimes de la confusion des pouvoirs. Ces régimes ont la particularité de rassembler en un seul organe l’ensemble des pouvoirs suscités. Les deux plus importants sont le gouvernement d’assemblée et la dictature. Dans le gouvernement d’assemblée, la confusion des pouvoirs s’opère au profit de l’Assemblée, qui est titulaire du pouvoir législatif et exécutif. Ainsi, le gouvernement est, ce que l’on pourrait appeler, le commis de l’assemblée. Car, il est nommé par l’assemblée qui détermine ses membres, mais aussi contrôle ses actes. Le gouvernement doit se plier aux demandes de l’assemblée, sans démissionner, et sans posséder un seul moyen de pression sur l’assemblée. L’exemple le plus probant du régime d’assemblée est celui introduit sous la Convention en France, lorsque la Constitution de 1793 était suspendue, où l’exécutif était confié à un conseil qui agissant suivant les injonctions de l’assemblée. Sous apparence fonctionnelle, ce type de régime cache souvent dans ses arcanes un autre type de régime de confusion des pouvoirs, la dictature de l’exécutif. La dictature de l’exécutif est un autre exemple de la nécessité de la séparation des pouvoirs dans un but démocratique. Ce type de régime, souvent appliquer, d’un point de vue politique, dans des temps de crise, réunit le pouvoir législatif et exécutif en un seul homme. La dictature, par sa caractéristique autoritaire, marque souvent un déclin du droit car il pose alors les bases d’un régime où l’application des règles étant arbitraire, la liberté des membres de la Nation n’est plus protégée par le juge. Généralement, le seul fondement de ce type de régime est l’aliénation du droit idéologique de chacun des membres du peuple au profit de la pensée commune prônée par le dictateur. Et il dispose de tous les pouvoirs ainsi pour mettre en place cette politique. La confusion du pouvoir a ainsi amené à un régime antidémocratique. L’archétype de la dictature est celle imposée par Adolf Hitler qui, investit de tous les pouvoirs, a été à même de mettre en place une dictature de l’exécutif et une propagande idéologique imposante. Ainsi, si la séparation des pouvoirs semble une nécessité démocratique, comment peut-elle être mise en place au travers des organes investis ? L’interdépendance des organes : l’effet obligatoire de la théorie La théorie de séparation des pouvoirs impliquant la division de ceux-ci, la création d’organes disposant de ces pouvoirs est inévitable. Mais comment ces organes s’organisent-ils entre eux (I) et comment l’application de la théorie est un exemple d’interdépendance des organes (II). La séparation des pouvoirs, même si elle indique dans son fondement que les pouvoirs doivent être bien différenciés et exercés séparément, n’implique pas un isolement imperméable des pouvoirs entre eux. Tout d’abord, dans sa théorie, Montesquieu écarte la puissance de juger en la considérant comme « nulle «. Mais de la théorie à la pratique, le pouvoir judiciaire s’est sans cesse établi de plus en plus comme un pouvoir propre de l’Etat qui possède son importance dans la capacité de régir l’Etat de droit en usant du contrôle de constitutionnalité. Ainsi, cette puissance a les capacités d’agir sur le pouvoir législatif. Par exemple, alors qu’au temps de Montesquieu, le Royaume-Uni ne possédait pas d’organe propre titulaire du pouvoir de juger, le Constitutionnal Act de 2005 a institué la création de Cour suprême, la séparant du pouvoir législatif. Mais les relations les plus importantes sont celles entre exécutif et législatif. Elles reposent sur le fait que les titulaires du pouvoir ont la « faculté de statuer « et la « faculté d’empêcher «, d’après Montesquieu. C’est ces capacités qui permettent l’autolimitation du pouvoir. Car si le pouvoir législatif statue sur les lois, l’exécutif peut empêcher l’application de celles-ci. Et si l’exécutif émet des règlements – statue en droit –, le législatif peut avoir la faculté de s’y opposer – d’empêcher. L’exemple le plus probant est celui des lois votées en France par le Parlement et qui ne seront jamais appliquées, faut de décret d’application signé par l’exécutif. Ainsi, l’organe législatif a besoin de l’organe exécutif et inversement. On pourrait s’attendre à une paralysie du pouvoir, mais la protection de la liberté étant plus importante, la stagnation est plus envisageable que l’autorité arbitraire du pouvoir. Ainsi, dans le but de préserver les libertés, il est nécessaire d’entretenir une cohésion et une entente permanente entre les différents organes du pouvoir, pour éviter les abus. Il y a donc interdépendance des organes. L’application de la théorie de séparation des pouvoirs montre bien cette dépendance des organes entre eux. Les régimes de séparation des pouvoirs sont de deux ordres : le régime présidentiel, et le régime parlementaire. Dans le régime présidentiel, l’exécutif et le législatif sont fortement indépendants. Ainsi, ils disposent chacun d’un mandat, d’une légitimité et d’une responsabilité propre. L’un ne peut, a priori, intervenir sur l’autre. De même, chacun des pouvoirs possède la possibilité de statuer, la théorie de Montesquieu. Mais là s’arrête l’indépendance des pouvoirs. Car dans ce type de régime, les organes possèdent la possibilité d’agir l’un sur l’autre, en restant dans le schéma de Montesquieu, par la faculté d’empêcher. Ce schéma induirait ainsi une paralysie du système des pouvoirs si les pouvoirs n’était en mesure de dialoguer afin d’atteindre des compromis. Là est la dépendance des pouvoirs entre eux dans les régimes présidentiels. L’exemple archétypique est les Etats-Unis, qui dispose du Congrès et du président, respectivement représentants du pouvoir législatif et exécutif, qui peuvent agir l’un sur l’autre au moyen consentement aux nominations pour l’un, et de veto pour l’autre. Ainsi, mais s’il semble que la séparation des pouvoirs est importante dans le régime présidentiel, l’interdépendance des organes est notable. Dans le deuxième régime de séparation des pouvoirs, l’interdépendance des organes est aussi présente. Ce régime, appelé parlementaire, fait collaborer le pouvoir exécutif et législatif, de sorte que le gouvernement est responsable face à l’assemblée. Le gouvernement est en place grâce à la confiance que lui accorde le chef d’Etat et le Parlement, et doit s’accorder aux deux. Le pouvoir législatif peut adopter les lois. Dans ce régime, par la collaboration des pouvoirs, l’interdépendance est encore plus frappante. Tout d’abord, l’exécutif a droit d’entrée et de parole au Parlement et peut engager sa responsabilité devant elle. Mais surtout, le chef de l’Etat peut opérer la dissolution de l’Assemblée. Ce qui fait trois moyens de pressions de l’exécutif sur le législatif. A l’inverse, la motion de censure oblige un gouvernement à démissionner lorsque leur responsabilité est remise en cause par le Parlement. Ce qui rend l’exécutif dépendant du législatif. Cette trop grande collaboration entraînant une trop grande interdépendance des organes législatif et exécutif a souvent posé problème, par exemple sous la IVe République en France, lorsque le gouvernement était sans cesse révoqué. Ce régime demeure viable tant qu’il reste équilibré. Il est ainsi l’archétype de l’interdépendance des organes dans l’application de la théorie de la séparation des pouvoirs. De la théorie de la séparation des pouvoirs de Montesquieu est issue les régimes de séparation des pouvoirs, nécessaires pour la démocratisation d’un système de pouvoir dans un Etat. Malgré cette séparation, l’interdépendance des organes est visible fortement au sein de ces régimes. Il serait intéressant de découvrir comment la Constitution est la gardienne jalouse du principe de séparation des pouvoirs.
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de tous les pouvoirs, a été à même de mettre en place une dictature de l'exécutif et une propagande idéologiqueimposante.
Ainsi, si la séparation des pouvoirs semble une nécessité démocratique, comment peut-elle être mise enplace au travers des organes investis ?L'interdépendance des organes : l'effet obligatoire de la théorie La théorie de séparation des pouvoirs impliquant ladivision de ceux-ci, la création d'organes disposant de ces pouvoirs est inévitable.
Mais comment ces organess'organisent-ils entre eux (I) et comment l'application de la théorie est un exemple d'interdépendance des organes(II).
La séparation des pouvoirs, même si elle indique dans son fondement que les pouvoirs doivent être bien différenciéset exercés séparément, n'implique pas un isolement imperméable des pouvoirs entre eux.Tout d'abord, dans sa théorie, Montesquieu écarte la puissance de juger en la considérant comme « nulle ».
Mais dela théorie à la pratique, le pouvoir judiciaire s'est sans cesse établi de plus en plus comme un pouvoir propre del'Etat qui possède son importance dans la capacité de régir l'Etat de droit en usant du contrôle de constitutionnalité.Ainsi, cette puissance a les capacités d'agir sur le pouvoir législatif.
Par exemple, alors qu'au temps de Montesquieu,le Royaume-Uni ne possédait pas d'organe propre titulaire du pouvoir de juger, le Constitutionnal Act de 2005 ainstitué la création de Cour suprême, la séparant du pouvoir législatif.Mais les relations les plus importantes sont celles entre exécutif et législatif.
Elles reposent sur le fait que lestitulaires du pouvoir ont la « faculté de statuer » et la « faculté d'empêcher », d'après Montesquieu.
C'est cescapacités qui permettent l'autolimitation du pouvoir.
Car si le pouvoir législatif statue sur les lois, l'exécutif peutempêcher l'application de celles-ci.
Et si l'exécutif émet des règlements – statue en droit –, le législatif peut avoir lafaculté de s'y opposer – d'empêcher.
L'exemple le plus probant est celui des lois votées en France par le Parlementet qui ne seront jamais appliquées, faut de décret d'application signé par l'exécutif.
Ainsi, l'organe législatif a besoinde l'organe exécutif et inversement.
On pourrait s'attendre à une paralysie du pouvoir, mais la protection de laliberté étant plus importante, la stagnation est plus envisageable que l'autorité arbitraire du pouvoir.
Ainsi, dans lebut de préserver les libertés, il est nécessaire d'entretenir une cohésion et une entente permanente entre lesdifférents organes du pouvoir, pour éviter les abus.
Il y a donc interdépendance des organes.
L'application de la théorie de séparation des pouvoirs montre bien cette dépendance des organes entre eux.
Lesrégimes de séparation des pouvoirs sont de deux ordres : le régime présidentiel, et le régime parlementaire.Dans le régime présidentiel, l'exécutif et le législatif sont fortement indépendants.
Ainsi, ils disposent chacun d'unmandat, d'une légitimité et d'une responsabilité propre.
L'un ne peut, a priori, intervenir sur l'autre.
De même,chacun des pouvoirs possède la possibilité de statuer, la théorie de Montesquieu.
Mais là s'arrête l'indépendance despouvoirs.
Car dans ce type de régime, les organes possèdent la possibilité d'agir l'un sur l'autre, en restant dans leschéma de Montesquieu, par la faculté d'empêcher.
Ce schéma induirait ainsi une paralysie du système des pouvoirssi les pouvoirs n'était en mesure de dialoguer afin d'atteindre des compromis.
Là est la dépendance des pouvoirsentre eux dans les régimes présidentiels.
L'exemple archétypique est les Etats-Unis, qui dispose du Congrès et duprésident, respectivement représentants du pouvoir législatif et exécutif, qui peuvent agir l'un sur l'autre au moyenconsentement aux nominations pour l'un, et de veto pour l'autre.
Ainsi, mais s'il semble que la séparation despouvoirs est importante dans le régime présidentiel, l'interdépendance des organes est notable.Dans le deuxième régime de séparation des pouvoirs, l'interdépendance des organes est aussi présente.
Ce régime,appelé parlementaire, fait collaborer le pouvoir exécutif et législatif, de sorte que le gouvernement est responsableface à l'assemblée.
Le gouvernement est en place grâce à la confiance que lui accorde le chef d'Etat et leParlement, et doit s'accorder aux deux.
Le pouvoir législatif peut adopter les lois.
Dans ce régime, par lacollaboration des pouvoirs, l'interdépendance est encore plus frappante.
Tout d'abord, l'exécutif a droit d'entrée etde parole au Parlement et peut engager sa responsabilité devant elle.
Mais surtout, le chef de l'Etat peut opérer ladissolution de l'Assemblée.
Ce qui fait trois moyens de pressions de l'exécutif sur le législatif.
A l'inverse, la motionde censure oblige un gouvernement à démissionner lorsque leur responsabilité est remise en cause par le Parlement.Ce qui rend l'exécutif dépendant du législatif.
Cette trop grande collaboration entraînant une trop grandeinterdépendance des organes législatif et exécutif a souvent posé problème, par exemple sous la IVe République enFrance, lorsque le gouvernement était sans cesse révoqué.
Ce régime demeure viable tant qu'il reste équilibré.
Il estainsi l'archétype de l'interdépendance des organes dans l'application de la théorie de la séparation des pouvoirs.De la théorie de la séparation des pouvoirs de Montesquieu est issue les régimes de séparation des pouvoirs,nécessaires pour la démocratisation d'un système de pouvoir dans un Etat.
Malgré cette séparation,l'interdépendance des organes est visible fortement au sein de ces régimes.
Il serait intéressant de découvrircomment la Constitution est la gardienne jalouse du principe de séparation des pouvoirs..
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