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Taine écrit dans les « Nouveaux essais de critique et d'histoire »: « Nous avons vu dans La Bruyère un éloge du peuple, des réclamations en faveur des pauvres, une satire amère contre l'inégalité des conditions et des fortunes, bref les sentiments qu'on appelle aujourd'hui démocratiques.» Que pensez-vous de ce jugement ?

Publié le 22/02/2012

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histoire
On peut à la rigueur développer ce sujet en approuvant entièrement le jugement de Taine ; en montrant qu'il y a bien dans les Caractères une satire contre l'inégalité des conditions et des fortunes (chapitres des Grands, du Mérite personnel, des Biens de fortune), des réclamations en faveur des pauvres et un éloge du peuple (mêmes chapitres et ici ou là). Mais si on y regarde de près, on s'apercevra qu'il ne faut pas exagérer l'éloge du peuple. La Bruyère a bien écrit : « Je veux être peuple »; mais le mot est certainement pris dans un sens très général; on distingue, au XVIe siècle, la noblesse, le clergé et le tiers état ou le peuple, c'est-à-dire tous ceux qui ne sont ni nobles, ni prêtres. Le mot de La Bruyère veut donc dire : Je préfère n'être ni noble, ni riche, mais être ce que je suis, un roturier peu fortuné. -Il ne faudrait pas non plus exagérer les sentiments démocratiques de La Bruyère. La Bruyère est un homme très certainement respectueux de toutes les traditions; il est profondément pieux; il croit à la monarchie de droit divin ; à aucun moment il n'a nu songer non seulement à une révolution mais encore à une transformation politique. Nous n'avons aucune raison de croire qu'il ait été en son for intérieur plus hardi que ne seront les philosophes : les Voltaire, les d'Alembert, les Diderot, etc. Il demande seulement que ceux qui ont légitimement le pouvoir n'en abusent pas; il voudrait un gouvernement qui, tout en restant absolu, serait juste et paternel.

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