Soliman le Magnifique
Publié le 09/02/2013
Extrait du document
1 | PRÉSENTATION |
Soliman le Magnifique (v. 1494-1566), sultan de l’Empire ottoman (1520-1566).
Conquérant, administrateur, protecteur des arts et des lettres, Soliman — surnommé le Législateur (Kanuni) par les Turcs et le Magnifique par les Occidentaux — s’est imposé comme le plus prestigieux des sultans pour avoir porté à son apogée la puissance et la splendeur de l’Empire.
2 | UN SOUVERAIN CONQUÉRANT |
Né à Trébizonde (aujourd’hui Trabzon, en Turquie), Soliman ou Suleyman est le fils de Sélim le Cruel qui accède au sultanat en 1512 sous le nom de Sélim Ier. Associé au pouvoir du vivant de son père — gouverneur de province dès 1513 —, Soliman devient naturellement, à la mort de ce dernier, le dixième sultan ottoman. Malgré le peu d’opposition à son accession au trône, le nouveau sultan doit faire face dès les premières années de son règne à une révolte dans la province de Syrie et Palestine qu’il fait sévèrement mater (1520-1521). De même, lorsqu’il congédie le grand vizir de son père, Piri Mehmed Pacha, pour le jeune favori Ibrahim Pacha (1523), le deuxième vizir Ahmed Pacha, également remercié, se retire en Égypte où il se fait proclamer sultan ; les troupes ottomanes dépêchées sur place soumettent rapidement le rebelle (1524).
2.1 | Début des hostilités envers les Habsbourg |
Contrairement à son père qui s’est tourné vers le monde arabe, Soliman opte dès le début de son règne pour une expansion aux dépens de l’Europe chrétienne. L’occasion lui est donnée lors de son accession au pouvoir : son ambassadeur à Buda (Budapest) est reçu avec peu d’égard par le roi Louis II de Hongrie. Aussi, en mai 1521, il mène la première expédition de son règne, en Hongrie, et s’empare de deux places fortes du sud du royaume : Šabac et Belgrade (août 1521). L’année suivante, il entreprend la conquête de l’île de Rhodes où il vainc le 20 décembre 1522, après un siège de plusieurs mois, les chevaliers de l’ordre de Saint-Jean-de-Jérusalem. La Méditerranée orientale, à l’exception de Chypre acquise à Venise, est désormais totalement sous domination ottomane.
En 1526, le sultan mène une nouvelle expédition en Hongrie. Le 29 août, l’armée de Soliman emporte une victoire décisive sur les troupes de Louis II de Hongrie lors de la bataille de Mohács — au cours de laquelle périssent le souverain hongrois et plus de 20 000 de ses hommes. La ville de Buda est mise à sac en septembre suivant. Louis II n’ayant pas de descendance, une querelle s’ouvre pour la succession au trône de Hongrie ; le sultan soutient Jean Ier Zápolya, voïvode de Transylvanie, tandis que l’archiduc Ferdinand d’Autriche (futur Ferdinand Ier du Saint Empire) reçoit les faveurs de son frère aîné Charles Quint. Jean Zápolya, en contrepartie de l’aide apportée par le sultan, reconnaît la suzeraineté ottomane sur la plus grande partie des territoires hongrois. Soliman prend Buda aux Impériaux le 8 septembre 1529, fait couronner Jean Zápolya roi de Hongrie et pousse l’avantage jusqu’à Vienne, capitale de la dynastie des Habsbourg où s’est retiré Ferdinand d’Autriche, qu’il assiège (vainement) du 27 septembre au 15 octobre 1529. Les hostilités reprennent en 1532 mais l’arrivée de l’hiver contraint les Ottomans à choisir la voie de la négociation : Ferdinand d’Autriche et Jean Zápolya conservent leurs territoires respectifs à la condition de payer chacun un tribut au sultan.
2.2 | Domination sur les Safavides |
Dans les années qui suivent, Soliman étend la domination ottomane sur la presque totalité du monde musulman. En 1534, lors d’une campagne contre la Perse (sur laquelle règnent les Safavides chiites), il enlève l’Azerbaïdjan, l’Irak et même Tabriz, la capitale iranienne de l’État chiite. Les États barbaresques, à l’exception du Maroc et de Tunis, prêtent allégeance aux Ottomans, dont la suzeraineté a été également acceptée par l’Arabie. La Méditerranée est désormais dominée par les corsaires à la solde des Turcs, dirigés par le premier amiral de Soliman, Barberousse.
2.3 | Dernières expéditions contre le Saint Empire |
En Afrique du Nord comme en Europe, Soliman le Magnifique menace les intérêts de l’empereur germanique, Charles Quint. En 1535, le sultan scelle contre ce dernier une alliance avec le roi François Ier de France, lequel obtient un régime privilégié dans l’Empire ottoman (le régime des capitulations).
Puis, lorsqu’en 1540 Jean Ier Zápolya meurt, la lutte entre l’Autriche et l’Empire ottoman reprend. Sous prétexte de protéger les intérêts du fils et successeur du souverain défunt, Soliman lance plusieurs expéditions contre les Austro-Hongrois. En août 1541, le souverain ottoman se rend maître de Pest (Budapest) avant d’annexer la Hongrie orientale, plaçant à sa tête un gouverneur turc. Le traité de paix signé en juin 1547 — par lequel l’Autriche obtient la Hongrie occidentale en échange d’un tribut annuel aux Ottomans — ne suffit pas à mettre un terme au conflit. En 1565, le nouvel empereur Maximilien II relance les hostilités et le sultan lance une expédition qui aboutit au siège puis à la prise de la ville hongroise de Szeged (8 septembre 1566). Cependant, Soliman, malade, meurt deux jours avant la victoire ottomane.
3 | SOLIMAN « LE LÉGISLATEUR « |
Sous le règne de Soliman le Magnifique, l’Empire ottoman a atteint sa plus grande expansion territoriale. L’État prospère grâce au contrôle des voies commerciales et à un système d’imposition abouti : droits de douane, tributs payés par les territoires vassalisés, dîmes versées par les sujets musulmans, capitations pour les non-musulmans. Cette richesse permet d’entretenir la plus puissante armée, forte de 300 000 hommes, assurant la protection de l’Empire, et une marine, élément essentiel de l’hégémonie turque. Au sein de ce corps, les janissaires forment une élite de quelque 12 000 soldats.
C’est à la même époque que les institutions administratives et gouvernementales qui évoluent depuis le XIVe siècle sont formalisées en une série de codes qui demeurent les bases de la loi ottomane jusqu’à la fin de l’Empire. Le sultan, souverain autoritaire, s’appuie pour gouverner sur un appareil administratif centralisé. Le gouvernement est dirigé par le grand vizir assisté de ministres, également appelés vizirs. Ils ont à leur disposition un corps de fonctionnaires bien organisé, un soin particulier étant accordé à l’administration des finances.
Toute velléité de révolte ou d’indépendance est violemment réprimée. Ainsi, deux des fils de Soliman, Mustafa et Bayazid, s’étant rendus coupables de rébellion, sont respectivement exécutés en 1553 et 1558 sur décision de leur père. De même, son compagnon d’enfance Ibrahim Pacha (grand vizir de 1523 à 1536), meurt étranglé dans des conditions mal élucidées. En revanche, son épouse Haseki Hürrem (connue en Occident sous le nom de Roxelane) exerce une grande influence durant son règne et parvient à faire de leur fils Sélim l’héritier au trône.
4 | SOLIMAN « LE MAGNIFIQUE « |
La richesse de l’empire est également utilisée par Soliman pour la splendeur des arts et des lettres. Le sultan, qui compose des vers sous le pseudonyme de Muhibbi, s’intéresse particulièrement aux poètes — c’est à cette époque qu’ont notamment vécu Fuzuli (v. 1490-1556) et Baki (1526-1600). Soliman se passionne également pour la calligraphie et aime à regarder le peintre et dessinateur persan Shahquli (mort v. 1555) dans son travail.
S’il s’entretient régulièrement avec l’architecte royal Sinan, la plupart des grands chantiers durant son règne résultent de la commande de ses vizirs, de la sultane Roxelane ou de sa fille Mihrimah. Il n’en demeure pas moins que le quatrième sultan installé à Istanbul enrichit sa capitale de nouveaux joyaux architecturaux, dont l’œuvre majeure reste la mosquée qui porte son nom, la mosquée Süleymaniye, érigé par Sinan entre 1550 et 1557. À sa mort, le sultan est enterré dans un jardin clos situé au sud de la mosquée.
Les successeurs de Soliman, son fils Sélim II et son petit-fils Murat III n’ont pas son charisme et, à la suite de revers militaires et de révoltes, l’empire tombe dans ce que les historiens appellent « la période des catastrophes «.
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