Recul communiste en Finlande
Publié le 17/01/2022
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2 juillet 1948 - Conformément aux pronostics, les élections finlandaises marquent un échec pour les communistes. Le Parti démocrate populaire, qui groupe communistes et socialistes communisants, perd plus de 60 000 voix, tombant de 398 000 à 331 000. Il n'aura plus que 38 sièges, contre 49 aux élections de 1945. Les sociaux-démocrates passent de 50 à 54 sièges, les agrariens de 49 à 56, les conservateurs de 28 à 33. Les partis moins importants, suédois et libéraux, perdent 5 sièges.
Ce résultat fait suite à la résistance énergique que les partis non communistes et le président Paasikivi opposèrent à deux reprises à l'offensive de Moscou : dans le traité qui lui fut imposé par l'URSS, la Finlande sut obtenir des concessions appréciables; dans la crise qui éclata en mai, au cours de laquelle Mme Leino-Kuusinen, leader communiste, menaçait la Finlande du sort de la Tchécoslovaquie, le vote de défiance contre le ministre de l'intérieur communiste fut suivi d'un geste énergique du président, qui le destitua et résista à toutes les pressions, formation de comités d'action, grèves, etc., en vue d'imposer un communiste comme son successeur.
Ce ministère, si important à la veille des élections, échappa aux totalitaires, et le scrutin de ces jours derniers put se dérouler dans l'ordre et la liberté.
Une campagne vigoureuse fut menée par les communistes, qui demandaient la nationalisation de l'industrie du bois et des banques, et prônaient l'amitié avec l'URSS comme le seul moyen d'assurer l'avenir de la Finlande. Moscou vint à la rescousse en réduisant le montant en dollars des réparations finlandaises. Mais l'argument n'impressionnait qu'à moitié, ces réparations étant payables en nature à des prix fixés par l'URSS, ce qui permet toujours d'augmenter les quantités de marchandises à livrer en baissant les prix. D'ailleurs les grèves provoquées par les communistes entraînaient une perte de production de 300 millions de marks finlandais.
Le coup de barre à droite, sans être violent, est sensible. Il assure la première place aux agrariens, qui gagnent 7 sièges, les sociaux-démocrates en gagnant 4 et passant ainsi à la seconde place.
Le succès des agrariens serait dû au fait que les petits propriétaires, qui s'étaient ralliés en partie aux démocrates populaires, ont vu leur situation s'améliorer et se sont éloignés du communisme. La politique d'agitation, les grèves politiques, ont également déplu au peuple calme, discipliné et laborieux que sont les Finlandais.
Il y a lieu de croire que la composition du gouvernement sera à peine affectée par l'issue des élections. Si les communistes et leurs alliés ne représentent plus que 24 % du corps électoral, si tous les autres partis sont unis contre eux dans la défense des libertés démocratiques, ces partis hésiteront à les exclure du gouvernement : ce serait là un geste inamical à l'égard de l'URSS. Le nouveau gouvernement, quel qu'il soit, ne pourra que mettre en tête de son programme le maintien de bonnes relations avec elle.
Une discussion pourrait cependant s'engager si les communistes renouvelaient leurs prétentions sur le ministère de l'intérieur, que leurs adversaires seront moins disposés que jamais à leur céder.
La Finlande a montré ce que peut faire un petit peuple courageux résolu à sauver son indépendance et dont les chefs, contrairement à d'autres, ne se laissent pas intimider.
BULLETIN DE L'ETRANGER
Le Monde du 6 juillet 1948
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