Que pensez-vous de ce jugement d'Anatole France sur André Chénier : « Loin d'être un initiateur, André Chénier est la dernière expression d'un art expirant... Il est le moins romantique des poètes. »

Vous avez ,à analyser deux idées, celle de l'art expirant et celle de la poésie romantique. Et cette analyse vous conduit à discerner une série de problèmes subordonnés les uns aux autres. L'art expirant est celui de la poésie classique qui considérait l'inspiration poétique comme subordonnée à une raison impersonnelle chargée de choisir le sujet parmi des sujets généraux en éliminant les impressions purement individuelles, de développer ce sujet et de l'ordonner selon des règles, de choisir le style et la langue façonnés par un idéal de « noblesse » et de « bienséance ». La conception des poètes romantiques est opposée sur tous les points à la conception classique; elle met à la place de cette raison l'imagination et la sensibilité du poète, absolument libres, même si elles sont exceptionnelles et singulières, surtout si elles le sont. D'autre part, est-il vrai qu'il y ait dans les poèmes de Chénier cet ordre raisonnable des classiques et non l'imagination et la sensibilité romantiques? Assurément. Mais cette confirmation du jugement d'Anatole France nous conduit nécessairement à un troisième problème. Il n'y a pas, pendant le règne de l'esprit classique, un seul grand poète lyrique. Si Chénier est tout classique, comment donc se fait-il qu'il soit, lui, un grand poète? Nous répondrons que c'est par son art. Il a eu le génie des belles formes, des visions harmonieuses; il a créé de la beauté, c'est-à-dire de la poésie, qui pouvait s'accommoder de l'esprit classique. 2° La comparaison des idées. Ce procédé si fécond de la comparaison vous permet : de mieux définir les idées en précisant ce qu'elles ne sont pas, de quoi elles diffèrent ; de déterminer leur nouveauté par rapport à ce qui existait avant elles, soit en montrant qu'elles sont entièrement nouvelles, soit en distinguant les parties nouvelles et celles qui ne le sont pas ; de mesurer leurs conséquences, leur influence, en les rapprochant de ce qu'elles ont amené soit directement, soit indirectement.