Prix Goncourt pour Barbusse (1916): Barbusse est récompensé pour sa description des tranchées

Première Guerre Mondiale. Henri Barbusse, bien que dispensé de service actif à la suite d'une maladie pulmonaire, s'engage volontairement pour le front, qu'il rejoint en décembre 1914, avec le 231e régiment d'infanterie. Il y passe vingt deux mois, au cours desquels deux citations lui sont décernées. "Le Feu", écrit dès 1915, paraît d'abord, sous forme d'un feuilleton quotidien, dans "L'Œuvre", à partir du 3 août 1916, avant d'être publié par Flammarion. Premier livre à décrire sans ambages la réalité de la guerre, celle des combattants, et non pas celle affichée par les "embusqués", "Le Feu", dès sa parution, déclenche une querelle entre ceux qui louent son messianisme pacifiste et ceux qui dénoncent les dangers du développement de la conscience révolutionnaire des masses. Henri Barbusse dépeint les poilus de son escouade : des gens humbles, issus du peuple, et venus des quatre coins de la France. "Nos âges ? Nous avons tous les âges... Nos races ? Nous sommes toutes les races... Nos métiers ? Un peu de tout, dans le tas." Mais pas d'intellectuels... "Et pis, si j'suis comme je suis, c'est que j'le veux bien. D'abord, j'ai pas d'dents. Le major m'a dit d'puis longtemps : T'as pus une seule piloche. C'est pas assez. Au prochain repos, qu'il m'a dit, va donc faire un tour à la voiture estomalogique". Ainsi s'exprime Blaire, métayer dans le civil, originaire de la Brie. L'écrivain décrit aussi le cadre dans lequel ils évoluent : "Sur les vingt-cinq kilomètres de largeur qui forment le front de l'armée, il faut compter mille kilomètres de lignes creuses : tranchées, boyaux, sapes. Et l'armée française a dix armées. Il y a donc, du côté français, environ dix mille kilomètres de tranchées et autant du côté allemand... Et le front français n'est à peu près que la huitième partie du front de la guerre sur la surface du monde. Dans tout ça, tu vois ce qu'on est, nous autres... des grains de poussière dans la plaine..." Henri Barbusse attaque l'une après l'autre les valeurs morales prônées par l'extrême droite, dont Charles Maurras, Maurice Barrès, et Léon Daudet se sont faits les chantres.