Devoir de Philosophie

Pierre de RONSARD : Ciel, air et vents, plains et monts découverts

Publié le 17/01/2022

Extrait du document



Ciel, air et vents, plains et monts découverts,
Tertres vineux et forêts verdoyantes,
Rivages torts et sources ondoyantes,
Taillis rasés et vous bocages verts,

Antres moussus à demi-front ouverts,
Prés, boutons, fleurs et herbes roussoyantes,
Vallons bossus et plages blondoyantes,
Et vous rochers, les hôtes de mes vers,

Puis qu'au partir, rongé de soin et d'ire,
A ce bel oeil Adieu je n'ai su dire,
Qui près et loin me détient en émoi,

Je vous supplie, Ciel, air, vents, monts et plaines,
Taillis, forêts, rivages et fontaines,
Antres, prés, fleurs, dites-le-lui pour moi.

Explication littérale : Plains : plaines ; tertres vineux : coteaux couverts

de vignes. — tors : sinueux. — Roussoyantes : couvertes de rosée, qu'on écrivait alors rousée. — Plages blondoyantes : plaines dorées par les blés mûrs. Comparez au vers de du Bellay : « Les ondoyants cheveux du sillon blondissant «. — Soin : tourment ; ire : colère (en latin : ira).


Variantes. Nous avons cité le texte de 1587 ; le sonnet avait subi de nombreux remaniements, qui tendaient à lui donner plus de cohésion et de mouvement. Tertres vineux a remplacé avantageusement tertres fourchus; coteaux vineux, qui reprenait tertres fourchus a cédé la place à Vallons bossus. Le quatrième vers du second quatrain a été changé plusieurs fois. Ronsard avait d'abord écrit : « Gastine, Loir, et vous, mes tristes vers «, qui devient en 1578 : « Et vous, rochers, écoliers de mes vers « avant d'atteindre l'expression définitive : « Et vous, rochers, les hôtes de mes vers «, nettement supérieure : les rochers abritant le poète en train de composer sont ses hôtes; on ne voit pas bien comment ils pourraient être ses « écoliers «.

M. Vianey, dans son livre Le Pétrarquisme en France (éd. Coulet, Montpellier), révèle que ce sonnet est imité du poète italien Bevilacqua : « Herbes Heureuses, heureuses prairies qui servez souvent de siège à mon auguste Abscentia... «, mais il ajoute avec raison que le mouvement du sonnet de Ronsard est magnifique et surpasse de loin son modèle.

Liens utiles