Occupation allemande
Publié le 19/02/2013
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1 | PRÉSENTATION |
Occupation allemande, nom donné à la période durant laquelle la Wehrmacht a occupé la France lors de la Seconde Guerre mondiale.
L’occupation officielle commence pour la France le 22 juin 1940, lorsque est signé l’armistice de Rethondes. Elle cesse entre le 6 juin 1944 et le 8 mai 1945, du débarquement de Normandie à la reddition allemande. Elle connaît deux grandes périodes : jusqu’au 11 novembre 1942, elle est différentielle, très présente en zone occupée, plus discrète en « zone libre « ; à partir de cette date, elle est globale et considérablement durcie.
2 | CONSÉQUENCE DE LA DÉBÂCLE |
L’Occupation, en premier lieu, est la conséquence directe de la débâcle de l’armée française. Celle-ci, après la « drôle de guerre «, est disloquée en quelques semaines par les divisions blindées allemandes : Sedan tombe le 13 mai 1940, Paris est pris le 14 juin. Seule l’armée britannique peut partiellement se sauver en résistant à Dunkerque (voir Dunkerque, évacuation de), ce qui permet le rembarquement des troupes (26 mai-2 juin). L’infériorité franco-britannique est pourtant relative : les fantassins sont plus nombreux que du côté allemand ; seule l’aviation allemande a une supériorité incontestable. La désorganisation de l’armée, les désaccords stratégiques au sein de l’état-major, la fixation de la majorité des troupes sur la frontière orientale (la célèbre « ligne Maginot «) et la remarquable cohérence de la stratégie allemande de la Blitzkrieg expliquent largement la débâcle française, encore accentuée par la gêne que les troupes éprouvent dans leurs déplacements : plusieurs millions de Français prennent en effet la route de l’exode pour fuir les Allemands. À peine plus d’un mois après le déclenchement de la campagne de France, le maréchal Pétain, président du Conseil, décide le jour même de sa nomination, la signature de l’armistice.
3 | L'ARMISTICE DE RETHONDES ET L'ENTREVUE DE MONTOIRE |
L’armistice de Rethondes définit les cadres de l’occupation allemande en France. Le territoire est en principe préservé ; cependant, le 24 juillet, les Allemands annexent de fait l’Alsace-Lorraine — annexion officialisée le 30 novembre 1940 — et, le 15 septembre 1940, ils intègrent le Nord et le Pas-de-Calais à la Belgique sous administration allemande. L’occupant instaure enfin une zone interdite à tous les habitants ayant fui durant l’exode, depuis la Picardie jusqu’à la Franche-Comté. La division en deux zones du territoire laisse, au sud, une certaine autonomie au gouvernement de Vichy (cependant sommé de livrer les Allemands réfugiés en France depuis 1933) ; au nord, l’Occupation est directe même si l’administration et la police françaises restent actives et doivent collaborer « d’une manière correcte « avec les autorités allemandes. Cette occupation doit théoriquement cesser avec la défaite britannique. L’Empire colonial français est laissé au gouvernement de Vichy ; mais, pour tous les déplacements de troupes et de marchandises, les Allemands sont seuls maîtres dans la zone occupée. L’entretien des troupes est à la charge des Français, dont les armées sont évidemment démantelées, à l’exception de la partie nécessaire au maintien de l’ordre public.
L’occupant fixe à 400 millions de francs par jour le montant du paiement des frais d’occupation (portés à 500 millions en 1942), double le taux de change du mark et fait de la France « le joyau « du « Grand Reich « — et son « Luna Park « (Jean-Pierre Azéma). La France approvisionne l’Allemagne en produits agricoles et en articles de mode, selon les directives allemandes de juillet 1940 ; l’entrevue de Montoire, le 24 octobre 1940, entre Pétain et Hitler, officialise cette politique qu’Hitler accepte.
Le rapport à l’Occupation varie évidemment selon que l’on est puissant ou misérable, marqué politiquement ou non, parisien ou savoyard, en zone libre ou occupée. C’est une période pénible pour la majeure partie des Français ; cependant, pour certains commerçants de bouche et paysans, elle est relativement faste. Elle n’entraîne pas, jusqu’en 1943 tout au moins, une baisse de fréquentation des lieux de culture. De Henry de Montherlant à Jean-Paul Sartre, d’Édith Piaf à Alfred Cortot, de Marcel Carné et Jacques Prévert à Sacha Guitry, d’Aristide Maillol à Serge Lifar, tous les artistes peuvent bénéficier de l’ostentatoire amour de l’art des occupants. Mais l’Occupation, entre le rationnement et les multiples peurs nées d’un climat de suspicion généralisée, est dure pour les ouvriers, pour les petits employés et, bien sûr, insupportable aux Juifs : ceux-ci ont été livrés par le pouvoir français, qui promulgue de sa propre initiative une série de statuts juifs dès l’automne 1940.
4 | LE TOURNANT : L'ANNÉE 1942 |
L’année 1942 est un véritable tournant, tragique, dans l’histoire de l’Occupation : avec le retour de Pierre Laval au pouvoir et l’occupation de la zone libre, commencent les années les plus dures de la période. Multipliant les exécutions d’otages à partir de 1941, les Allemands reçoivent, dans la lutte contre les « terroristes « de la Résistance, l’aide de Vichy qui appuie également la politique d’extermination des Juifs décidée en janvier 1942 par la conférence de Wannsee. La chasse aux Juifs se perfectionnant, l’opération « vent printanier « permet, par exemple, de rafler 12 884 hommes, femmes et enfants dans la nuit du 16 au 17 juillet 1942, et de les envoyer à Auschwitz (voir Vel d’Hiv, rafle du). Les trois quarts de la population juive de France est envoyée à la mort par l’action concertée de l’occupant nazi et de l’État français (voir Camp de concentration). Les Allemands intègrent dans les unités combattantes les Alsaciens et les Lorrains des zones annexées ; ils détournent à leur profit les deux tiers des productions agricoles et industrielles ; avec l’appui de la Milice, créée par Vichy en 1943, la chasse aux réfractaires du Service du travail obligatoire (STO) s’accentue.
Ce durcissement est dû moins à l’efficacité croissante de la Résistance intérieure ou aux crises que traverse le régime de Vichy qu’aux difficultés militaires du Reich, refoulé en Afrique du Nord, vaincu en Europe de l’Est, surclassé dans les airs par la Royal Air Force. Le durcissement de l’occupation est le signe clair de l’affaiblissement allemand — un signe perçu par de nombreux Français qui entrent dans la résistance passive ou active à l’occupant.
La libération du territoire est longue : en mai 1945, Royan est toujours aux Allemands. Dans les zones encore occupées, les conditions sont aggravées par l’encerclement, qui empêche les approvisionnements, et par les bombardements systématiques.
L’occupation de la France par l’armée allemande entre 1940 et 1944 a donc présenté, par rapport aux autres périodes d’occupation, trois particularités : l’État français s’est engagé dans une politique de collaboration avec l’occupant ; l’occupation a été l’une des armes de la durée du conflit ; elle a eu pour conséquence une fracture profonde dans la société française, une fracture qui, en 1998, ne s’est pas encore refermée.
Liens utiles
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