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Moyen Âge

Publié le 04/02/2013

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1   PRÉSENTATION

Moyen Âge, période de l’histoire européenne s’étendant de 476, date de la chute de l’Empire romain d’Occident, au xve siècle.

L’année 1492, marquée par la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb et par la fin de la Reconquista espagnole, est généralement préférée à 1453, date de la prise de Constantinople par les Ottomans pour situer la fin du Moyen Âge. Cette datation ne correspond pas à une césure nette dans le développement culturel et social du continent, mais à des événements dont la portée a fait, à moyen terme, entrer l’Europe dans une ère nouvelle.

Le terme de « Moyen Âge « semble avoir été utilisé pour la première fois par Flavio Biondo de Forlí, secrétaire apostolique à Rome, dans Historiarum ab inclinatione Romanorum imperii decades (« Décades historiques depuis le déclin de l’Empire romain «), écrites dans les années 1450 et publiées en 1483. Pour cet historien humaniste, le terme évoque l’idée d’une mise entre parenthèses du temps, d’une interruption du progrès, cette période de stagnation culturelle se situant entre la gloire de l’Antiquité classique et la renaissance de cette gloire, au début du monde moderne. L’emploi du terme s’est généralisé à partir du xviie siècle.

Les historiens actuels divisent habituellement le Moyen Âge en trois périodes, tout en soulignant la grande diversité de l’époque médiévale, hors des facteurs unificateurs qu’ont été la féodalité et la religion chrétienne.

2   LE HAUT MOYEN ÂGE (DU VE AU XE SIÈCLE)

Le pillage de Rome par les Goths d’Alaric Ier, en 410, plus peut-être que la déposition, en 476, de Romulus Augustule, le dernier empereur romain d’Occident, fait sur ses contemporains (en particulier saint Augustin ou Sidoine Apollinaire) l’effet d’une catastrophe annonciatrice de la disparition d’une époque. De fait, à la fin du ve siècle, plusieurs tendances, qui ont débuté dès le iiie siècle, aboutissent : la désintégration économique et les Grandes Invasions, puis l’établissement de tribus germaniques à l’intérieur des frontières de l’Empire romain d’Occident, changent la face du continent.

Au cours des siècles suivants, l’Europe occidentale demeure sous l’emprise d’une culture primitive, superposée à la civilisation complexe et élaborée de l’Empire romain, laquelle n’a jamais été totalement perdue ou oubliée (voir Antiquité).

2.1   Les temps mérovingiens
2.1.1   Transformations économiques et politiques

Bien que les différentes tribus dites « barbares « commencent à se regrouper en royaumes, le développement économique reste principalement local après les destructions liées aux Grandes Invasions. Les grandes voies commerçantes sont interrompues, même si l’économie monétaire subsiste. Au commerce méditerranéen se substitue un commerce nordique et continental de plus en plus important : les marchands « barbares « remplacent les marchands méditerranéens.

Parallèlement, au terme d’un processus engagé sous l’Empire romain, la superficie des domaines agricoles (les villae romaines) augmente. Les paysans libres sont progressivement attachés à la terre qu’ils exploitent au profit des seigneurs terriens, en échange d’une protection et d’une justice rudimentaires (voir système seigneurial). Dans le même temps, les villes d’Occident entrent dans une longue phase de déclin, conservant principalement des fonctions administratives et religieuses.

Les Francs, en particulier avec Clovis Ier dans les anciennes provinces gauloises de l’Empire, de même que les Wisigoths d’Aquitaine en Espagne et les Ostrogoths en Italie fondent des États importants aux vie et viie siècles. Alors que la dynastie franque des Mérovingiens adopte, avec Clovis, le christianisme en 496 (ou 498), les autres rois optent pour l’hérésie arienne. Ce choix est décisif, car l’arianisme, condamné en 379 par l’empereur Théodose Ier, entraîne dans sa chute les royaumes barbares qui l’ont choisi, alors que le royaume franc, s’appuyant sur les évêques, subsiste.

Au sein de l’aristocratie guerrière, le ciment social est la parenté, mais l’importance des liens féodaux s’accroît durant cette période. Ils puisent sans doute leurs racines dans la vieille relation romaine de patronat-clientèle ou dans le comitatus germanique, le groupe de compagnons de combat. L’ensemble de ces relations constitue un obstacle à l’autorité des rois barbares. De plus, la répartition égale entre les héritiers est la règle et rend impossible toute entreprise durable d’unification territoriale.

2.1.2   Religion et culture

La seule institution européenne universelle reste l’Église chrétienne, elle-même en proie à la dispersion de son autorité. Dans la hiérarchie ecclésiastique, le pouvoir réel est détenu par les évêques, véritables princes de leur diocèse. À l’origine, le pape (évêque de Rome) jouit seulement d’une prééminence formelle sur ses pairs, comme détenteur du trône de saint Pierre auquel le Christ est censé avoir confié la direction de l’Église. L’idée d’un gouvernement ecclésiastique ou d’une Église monarchique dirigée par le pape ne se développe pas au cours des premiers siècles du Moyen Âge. L’Église se voit elle-même comme la communauté spirituelle des chrétiens, exilés du royaume de Dieu, attendant dans un monde hostile le jour de la délivrance. Les membres les plus importants de cette communauté sont étrangers à la hiérarchie du gouvernement ecclésiastique et vivent dans les monastères qui parsèment l’Europe.

Face aux forces centrifuges dont l’arianisme reste la plus redoutable, des tendances en faveur de l’unification du rite, du calendrier et de la règle monastique s’affirment au sein de l’Église. En ce sens, le rôle du pape Grégoire le Grand ou celui du fondateur de l’ordre des bénédictins, saint Benoît de Nursie, est considérable.

L’activité culturelle durant le haut Moyen Âge s’attache, avant tout, à s’approprier et à conserver l’héritage antique. Les ordres monastiques, tels les bénédictins apparus au ve siècle, jouent un rôle de premier plan : en réalité, l’Église a le monopole de fait de la culture écrite. Les œuvres des auteurs classiques sont recopiées et commentées (voir scriptorium). Des ouvrages encyclopédiques sont rédigés, tels que les Étymologies (623) de saint Isidore de Séville qui tente de réaliser une somme de la connaissance humaine. Au cœur de toute activité intellectuelle se trouve la Bible dans la traduction latine de saint Jérôme, la Vulgate, et toutes les études laïques sont considérées comme des travaux préparatoires à la compréhension des textes sacrés.

Les rois barbares eux-mêmes, le plus souvent analphabètes, ont recours aux ecclésiastiques pour administrer leurs États : le roi Gondebaud en Lombardie fait ainsi rédiger la loi gombette par ses conseillers ecclésiastiques ; Avit, évêque de Vienne (la ville française), joue auprès de Clovis un rôle essentiel.

2.2   L’Europe carolingienne

À partir du xiiie siècle, les différents royaumes barbares issus des premières vagues d’invasion se disloquent : seule l’autorité spirituelle de l’Église et le souvenir de l’Empire romain semblent unifier un monde marqué par l’émiettement.

2.2.1   Des Pippinides aux Carolingiens

La défense de la chrétienté face à la menace musulmane accélère l’ascension d’une famille qui, dès la fin du viie siècle avec Pépin de Herstal, commence à imposer son pouvoir comme maire du palais des « rois fainéants «, les derniers Mérovingiens. Son fils, Charles Martel, sait réunir une troupe suffisamment nombreuse, venue de toute la chrétienté, pour stopper l’avancée des musulmans, en 732 à Poitiers.

Pépin le Bref peut, en 751, se faire couronner roi des Francs après avoir détrôné Childéric III, le dernier mérovingien (voir dynastie des Carolingiens). L’onction épiscopale lui apporte une légitimité d’origine religieuse considérable. Charles (futur Charlemagne), son second fils, s’impose très vite comme un politique exceptionnel et un remarquable homme de guerre. Après avoir évincé son frère Carloman, il devient, en 771, seul roi des Francs et entreprend une conquête systématique de toute la chrétienté d’Europe, combinée avec une lutte incessante à la fois contre les musulmans — présents de la Sicile à l’Espagne — et contre les potentats locaux. En 800, l’Europe est sous sa coupe jusqu’aux pays slaves : il se fait alors couronner empereur par le pape, à Rome, et s’installe à Aix-la-Chapelle.

2.2.2   De l’empire de Charlemagne au partage de Verdun

Pendant un demi-siècle, jusqu’en 843, l’empire est une réalité politique, modelée par la volonté de son fondateur et perpétuée par son fils et successeur, Louis Ier le Pieux. Il est marqué par l’importance de l’administration impériale, qui délègue aux missi dominici (un clerc et un laïc associés) les pouvoirs de l’empereur dans les comtés. Il se caractérise aussi par le rôle de l’écrit, véhiculé par le latin : les capitulaires sont multipliés pour fixer la législation de l’empire.

L’empire ainsi constitué doit pourtant rapidement montrer ses limites. Malgré le contrôle exercé par les envoyés de l’empereur, les comtes et les marquis disposent d’une forte autonomie sur leur territoire. En Bavière et en Bretagne, par exemple, les tentatives de sécession sont nombreuses durant le ixe siècle. La fragilité du système carolingien ne lui permet pas de survivre à son fondateur. Louis le Pieux parvient à préserver son trône, mais à sa mort (840), la règle successorale qui impose le partage du domaine entre les descendants, fait voler en éclats l’empire, partagé au traité de Verdun de 843 entre Louis II le Germanique, Lothaire Ier et Charles II le Chauve.

2.2.3   La renaissance carolingienne

La période carolingienne permet à une partie de la chrétienté de connaître une paix relative. L’empereur et ses successeurs entretiennent avec les guerriers (auxquels ils confient des comtés, marches et duchés afin d’y assurer la police et la paix) des relations fondées sur la fidélité et l’échange de services. C’est ainsi que naissent, au ixe siècle, les relations de type féodal entre le prince et ses vassaux (voir féodalité).

Le rôle dévolu à l’Église par l’État impérial amène les clercs à développer une nouvelle forme d’écriture, beaucoup plus lisible, la « minuscule caroline «. Les manuscrits se multiplient dans les scriptoria, permettant la diffusion du patrimoine hérité de l’Antiquité romaine. Charlemagne lui-même encourage l’aristocratie franque à acquérir la maîtrise de l’écriture et de la lecture.

La prospérité de l’Église se traduit aussi par le développement de constructions, dont le palais d’Aix-la-Chapelle et la cathédrale impériale sont les plus célèbres exemples. La cour impériale suscite le renouvellement des arts traditionnels chez les Barbares, comme les émaux et l’orfèvrerie. Les courants commerciaux à l’intérieur de l’empire sont vivifiés, et l’expression « renaissance carolingienne «, appliquée par les historiens de la fin du xixe siècle, correspond à ce moment de paix.

3   LE MOYEN ÂGE TRIOMPHANT : DÉVELOPPEMENT DU SYSTÈME FÉODAL
3.1   Seconde vague d’invasions

Le partage de Verdun de 843 a montré la fragilité de la construction carolingienne. Les nouveaux États, issus de la scission de l’empire, suscitent les convoitises des peuples voisins : les Vikings, les Bulgares et les Hongrois.

Les invasions vikings frappent les populations de la France occidentale et celles des littoraux de la mer du Nord : les drakkars pénètrent, en remontant les fleuves, au cœur des États, jusqu’à Paris et Orléans. Païens, les Vikings pillent systématiquement les églises et les monastères, attirés par leurs richesses. Les raids menés au xe siècle sont progressivement repoussés par des troupes de mieux en mieux préparées à leur résister (échec du siège de Paris en 885-886).

Dès le xe siècle, les Vikings installent des camps sur les littoraux et le roi français Charles III le Simple doit concéder au chef Rollon la région où il s’est implanté (traité de Saint-Clair-sur-Epte de 911). C’est ainsi que naît le duché de Normandie. L’intégration des Normands est rapide, du fait de leur conversion au christianisme. La poursuite de leurs expéditions, jusqu’en Sicile, est placée sous le signe de la religion chrétienne. En acceptant de devenir « l’homme « du roi de France, Rollon fait aussi entrer les Vikings dans le système de la vassalité.

Les Bulgares et Hongrois déferlent sur l’Occident à la même époque ; assez semblables à celles des Huns, leurs invasions traumatisent les populations qui en sont victimes. Pourtant, elles sont repoussées assez rapidement grâce au nouveau système de défense, le château fort, dont s’est doté l’espace chrétien. Les guerriers, qui ont été chargés d’assumer la défense des terres par les autorités impériales, se trouvent alors investis d’une autonomie croissante.

Ces guerriers font souvent édifier par leurs paysans des monticules de terre sur lesquels ils installent des tours de bois : ce sont les premières mottes féodales, qui apparaissent dès le xe siècle et se multiplient au cours des deux siècles suivants. Autour des châteaux se constitue peu à peu une société nouvelle, celle que les historiens appellent aujourd’hui le premier âge de la féodalité.

3.2   L’âge des châtellenies indépendantes
3.2.1   Le pouvoir des seigneurs locaux

Garants de la sécurité des paysans, les châtelains développent sur leur territoire un système élaboré de contrôle policier, judiciaire et administratif. Préservant la relation féodale avec leur seigneur, ils se saisissent des droits de justice et d’imposition, instaurant une série de droits féodaux auxquels sont astreints les paysans en échange d’une protection (voir système seigneurial ; banalités). Quand les domaines sont étendus, les châtelains doivent déléguer leur autorité à des chevaliers qui, à leur tour, constituent leur domaine en seigneurie relativement autonome.

Des stratégies matrimoniales et des guerres privées permettent la création de véritables principautés, comme le comté de Toulouse. Les xe et xie siècles connaissent la multiplication de ces conflits privés, tandis que l’autorité supérieure du roi n’est plus que théorique : Hugues Capet, élu en 987 par les grands du royaume (évêques et barons), fondateur de la dynastie des Capétiens, ne gouverne en fait que son propre domaine peu étendu, le domaine royal.

3.2.2   La Paix de Dieu

La situation de guerre endémique que connaît la chrétienté à cette période permet à l’Église catholique de s’affirmer comme force d’interposition. À la fin du xe siècle se multiplient les conciles de paix qui imposent aux chevaliers un certain nombre de règles — ou « paix de Dieu « — plus ou moins respectées : protection des veuves et des orphelins, respect des jours de paix et des lieux d’asile comme les églises et les monastères. L’intermédiaire de la papauté apparaît alors comme nécessaire pour toute légitimité : l’empereur germanique Othon II s’appuie ainsi sur le pape Sylvestre II pour tenter de rétablir l’Empire universel.

Cette puissance se traduit par un vaste mouvement de construction d’églises : la sédentarisation des paysans s’opère bien plus dans le cadre de la paroisse ecclésiastique que dans celui de la seigneurie. Le chroniqueur Raoul Glaber note, au début du xie siècle, que la « chrétienté se couvrit d’un blanc manteau d’églises «. Vers le début du xiie siècle, dans toute l’Europe chrétienne, du Latium à la Picardie, la paroisse devient le cadre fondamental de l’existence des hommes.

3.3   L’apogée de la féodalité
3.3.1   Les campagnes

Les xiie et xiiie siècles correspondent à une période de relative amélioration du sort des populations rurales, désormais protégées par les seigneurs, alors que les guerres privées sont atténuées par la paix de Dieu.

Les progrès techniques s’amorcent : la charrue est substituée à l’antique araire, même si, pour des raisons techniques, celui-ci subsiste dans de nombreuses régions. La croissance démographique touche les campagnes et entraîne un mouvement de défrichements importants, orchestrés par les moines ou les princes, voire par des initiatives privées de seigneurs ou de paysans qui échangent contre des « franchises « la mise en exploitation de nouveaux terroirs.

Cependant, le système d’exploitation le plus généralement répandu demeure le servage qui s’est, depuis les temps mérovingiens, substitué à l’esclavage antique. Certes, l’attachement des paysans à la seigneurie (à la « glèbe «) connaît de multiples variantes. Néanmoins, la condition servile est l’un des instruments essentiels du système féodal (voir aussi alleu ; manse).

Les productions essentielles sont les céréales et, dans une moindre mesure, quelques légumes (pois, vesces, fèves) et quelques fruits. L’élevage est limité, dans la plupart des cas, à un cochon et à quelques volailles, dont le rôle d’appoint protidique dans une alimentation très fruste est absolument vital. Les surplus sont confisqués par les seigneurs et les clercs. Ces élites rurales assurent, avec les quelques laboureurs qui louent leur soc, les seuls liens entre les paroisses et le reste du monde.

Malgré les nuances locales, le monde rural médiéval reste, dans l’ensemble, enclavé. Aussi les paysans n’ont-ils besoin que d’un nom d’usage. Entre les villages, la forêt omniprésente, les cours d’eau, les reliefs, les barrières de péages et les multiples octrois constituent autant de frontières difficilement franchissables. Vivre dans une cellule villageoise, castrale ou urbaine, est la formule universellement reconnue.

3.3.2   Les villes

Depuis les Grandes Invasions, les villes sont systématiquement entourées de remparts entretenus, élevés et, pour les villes les plus importantes comme Londres ou Paris, élargis à plusieurs reprises, en fonction de la croissance urbaine. Celle-ci, lente, concerne surtout les capitales qui attirent artisans et domestiques liés aux cours princières.

La ville est elle-même divisée en quartiers qui peuvent être fermés, la nuit, par des chaînes. Ils correspondent à des métiers dont la toponymie des rues a gardé la trace (rue de la Petite-Boucherie, par exemple). Les quartiers et les métiers sont les deux principales communautés dans lesquelles tout individu est inscrit, souvent corollairement (voir corporations) ; à partir du xiiie siècle, les communautés monacales complètent ce maillage communautaire.

Comme à la campagne, la vie ne peut s’envisager que dans le cadre d’une communauté. Beaucoup de villes, à partir du xiie siècle, cessent de dépendre d’un seigneur et obtiennent des « chartes de commune « ou de « franchise «, des « libertés « souvent durement acquises. Des assemblées municipales représentent alors les institutions des villes et ceux qui y siègent (capitouls, échevins, consuls, jurats, etc.) constituent l’élite, souvent roturière, du monde urbain (voir aussi bourgeoisie).

Hormis quelques vestiges de l’Antiquité (arènes de Nîmes transformées en châteaux aristocratiques), et les bâtiments religieux et les palais des notables aristocrates, les constructions sont en bois. Le tissu est d’une extrême densité (voir urbanisme). Certaines villes ont conservé le plan hippodamique instauré par les Romains ; d’autres se développent en cercles concentriques autour du cœur de la ville, le plus souvent la cathédrale ou un bâtiment religieux important. Reims s’étend ainsi à partir des deux noyaux de la basilique de Saint-Remi et de la cathédrale Notre-Dame. Mais, quelle que soit la structure urbaine, toutes ces villes sont régulièrement la proie des flammes. De plus, les ruelles étroites et l’absence de systèmes d’égouts rendent les villes insalubres.

Pourtant, à partir du xie siècle, le rôle politique et économique des villes s’accroît dans toute l’Europe chrétienne. En Italie, elles sont au cœur d’États puissants comme Venise ou Florence ; en Espagne, qu’elles soient encore sous domination musulmane ou revenues à la chrétienté, elles connaissent également une grande prospérité ; les ports du nord de l’Europe développent, par la Baltique et la mer du Nord, des réseaux commerciaux que la Hanse va structurer. Cette prospérité a comme corollaire l’installation dans les villes des symboles du pouvoir, en particulier des centres des administrations territoriales (voir aussi foire ; marchands).

3.3.3   La hiérarchie féodale

Mais plus que le système urbain, c’est la terre, à la base de la seigneurie, qui structure les royaumes. Les châtellenies, indépendantes, sont progressivement soumises à l’autorité des princes. Ces seigneurs ont su constituer les fiefs les plus importants, du roi de France au duc de Bretagne, en passant par le roi d’Angleterre après l’avènement de Guillaume le Conquérant. Entre les serfs, les seigneurs, les rois ou les empereurs, une hiérarchie théorique vient légitimer les rapports de force effectifs.

Au sommet se trouvent les suzerains, qui tiennent leur pouvoir de Dieu, comme le révèle la cérémonie du sacre. Les suzerains s’érigent ainsi en concurrents du pape, ouvrant un conflit séculaire : Henri IV, l’empereur germanique, se déplace certes à Canossa pour y faire amende honorable, mais Philippe IV le Bel fait proprement enlever le pape à Anagni. De cette conception politique, une lutte ouverte entre partisans et adversaires du pouvoir pontifical apparaît et déchire l’Italie jusqu’au xvie siècle (voir guelfes et gibelins).

Au-dessous des prestigieux suzerains, souverains sacrés, se trouvent les grands vassaux, dont souvent la souveraineté n’a rien à envier à celle de leur suzerain : simplement, ils doivent, par le rituel régulièrement répété de l’hommage, confirmer leur fidélité au roi en échange du fief qu’il leur concède. Cela étant, ces grands vassaux disposent du pouvoir légitime de s’entourer à leur tour de vassaux, en distribuant des fiefs taillés dans leur domaine : une pyramide de vassaux, d’arrière-vassaux et de « vavasseurs « se répartit l’administration de l’ensemble des terres, à l’exception des « alleux «, terres libres de toute seigneurie (voir féodalité).

Les nobles, définis par la possession d’un fief et par leur activité guerrière, entretiennent par ailleurs une cour dans laquelle les chevaliers, dotés ou non d’un fief, jouent le rôle d’une armée privée. Cet ost doit être mis à la disposition du suzerain lorsque ce dernier part au combat. Les châteaux forts servent ainsi de casernement aux chevaliers qui maintiennent l’autorité seigneuriale sur les sujets, ces derniers, serfs ou libres, constituant la lie de la société (voir système seigneurial).

Les seigneurs sont souvent poussés par leurs ambitions à prêter plusieurs serments d’hommage, et les grands vassaux à augmenter le nombre de leurs hommes. Malgré des institutions (comme la ligesse) qui établissent une hiérarchie toute théorique entre les différents hommages, dès le xiie siècle, le pouvoir des grands princes se trouve multiplié au détriment de petits seigneurs, incapables de préserver seuls leur pouvoir local. Ainsi, les châtellenies indépendantes cèdent peu à peu la place à de plus vastes principautés, qui se dotent d’administrations étoffées et d’un cérémonial magnifiant leur puissance.

4   LE BAS MOYEN ÂGE
4.1   Le temps des cathédrales
4.1.1   L’essor architectural

De la Catalogne à l’Allemagne, l’édification des cathédrales traduit la prospérité des xiiie et xive siècles. Elle mobilise, sur des durées souvent pluriséculaires, des dizaines de milliers d’ouvriers dont le travail est parfois représenté au hasard des frises, des frontons et des corbeaux. Non seulement les cathédrales, mais aussi les monastères, les églises, les basiliques sont réédifiées et remplacées par des constructions de pierre : calcaires blancs en Île-de-France, brique à Albi ou granits et laves dans le Massif central, à Riom ou à Clermont-Ferrand.

L’historiographie du xixe siècle distingue l’art roman apparu dès le xie siècle, caractérisé par les pleins et l’utilisation de la voûte soutenue par l’arc en plein cintre, de l’art gothique qui lui succède, caractérisé par les ouvertures et l’utilisation de la voûte à croisées d’ogives. Si cette distinction correspond à un débat théologique qui a opposé en particulier Bernard de Clairvaux à Abélard au xiie siècle, elle ne peut être utilisée comme une grille absolue de classification, car étant donné la lenteur des travaux d’édification, la majorité des bâtiments associe les deux formules.

En même temps que les bâtiments religieux, les édifices laïques se multiplient dans les villes et les campagnes : manoirs fortifiés en Bretagne, châteaux forts comme Château-Gaillard en Normandie ou Montségur, fief de la rébellion cathare au début du xiiie siècle. Les beffrois et les hôtels de ville traduisent le prestige des institutions municipales, que les princes associent souvent à leur combat pour le renforcement de leur autorité vassalique. Les institutions de charité se dotent, elles aussi, de bâtiments en pierre : les hôtels-Dieu, à Beaune ou à Paris, témoignent de cet esprit médiéval qui a su glorifier la pauvreté.

4.1.2   La puissance de l’Église

Églises, cathédrales, hôtels-Dieu inscrivent dans l’espace le christianisme de la société médiévale. Les représentations valorisent, en ces temps de paix relative, un Christ bénissant, une Vierge Mère préférée à la Vierge des douleurs, un ange souriant pour accueillir les fidèles dans la cathédrale de Reims.

La papauté, qui s’efforce de poursuivre la reprise en main du clergé, a une action efficace : la simonie et le nicolaïsme sont dénoncés, le culte et le dogme sont définis fermement par les conciles des xiie et xiiie siècles, en particulier celui du Latran IV (1215) qui fixe les sept sacrements de l’orthodoxie catholique.

Le monachisme connaît un nouvel essor : aux ordres issus de la prédication de saint Benoît de Nursie — les bénédictins et les cisterciens, dont les communautés vivent retirées du siècle, parfois dans de véritables déserts (comme les moines de Beaumes-les-Messieurs et Beaumes-les-Dames) — s’ajoutent des ordres mendiants dont les membres sont voués à la prédication urbaine, les franciscains et les dominicains. Les premiers poussent la logique d’un idéal de pauvreté qui les rapproche de Dieu, tandis que les seconds deviennent une arme de combat redoutée, en luttant à partir du xiiie siècle contre les hérétiques avec l’instauration de l’Inquisition.

En effet, en dépit des indices nombreux de cette prospérité médiévale qui peut rester inscrite dans la mémoire collective comme un véritable âge d’or, l’Église catholique ne peut préserver son autorité qu’en luttant sur trois fronts.

Le premier oppose, depuis le début du Moyen Âge, les chrétientés d’Occident et d’Orient — le christianisme orthodoxe dont Constantinople (antique Byzance, aujourd’hui Istanbul) est la capitale. Les différends à la fois théologiques et politiques entre Rome et Constantinople ne trouvent pas de solution, et leur rupture est consommée par le Grand Schisme d’Orient de 1054. Les tentatives de conciliation restent vaines, Constantinople devenant pour Rome un adversaire absolu au point qu’en 1204 la capitale de l’Empire byzantin est mise à sac par les Vénitiens dans le cadre de la quatrième croisade, initialement lancée contre les musulmans.

Le deuxième front est représenté par l’islam, présent sur le pourtour méditerranéen et solidement installé en Espagne, qui suscite le déclenchement des croisades par le pape dès 1095 : il s’agit d’aller libérer la Terre sainte et de reconquérir Jérusalem que les Arabes ont investie depuis le viie siècle. Jusqu’en 1270, huit croisades se sont succédé, entraînant le décès de plusieurs souverains (dont Louis IX, bientôt canonisé), et aboutissant à la création d’éphémères États latins en Orient. Ces croisades n’ont pas eu un grand apport, sinon des souvenirs qui deviennent autant de thèmes littéraires, du Roland furieux de l’Arioste à la Jérusalem délivrée du Tasse, en passant par la geste de Richard Cœur de Lion associée à celle de Robin des Bois.

Des croisades sont également lancées dès le xie siècle en Espagne, et la Reconquista (« reconquête «) y progresse sensiblement au xiiie siècle : la grande victoire de Las Navas de Tolosa en 1212 réduit l’emprise musulmane sur la péninsule au seul royaume de Grenade, détruit définitivement en 1492.

Le mouvement de conquête de l’Est par les chevaliers Teutoniques, qui imposent leur autorité aux païens et hérétiques germaniques, scandinaves et slaves relève également des croisades.

Le troisième front se trouve à l’intérieur même de l’espace catholique : l’Église entend lutter contre les Infidèles (comme les musulmans et juifs de l’Espagne reconquise) et contre les dérives hérétiques dont la plus célèbre est l’hérésie cathare, d’origine orientale. Celle-ci donne lieu à une véritable guerre à laquelle participe le roi de France en personne. L’élimination des cathares, qui se poursuit sur près de trente ans dans la première moitié du xiiie siècle, n’éradique pas les tendances réformatrices ou hérétiques à l’intérieur de l’Église. Elle a, comme les croisades, manifesté avec évidence la nécessité absolue pour Rome de composer avec ceux qui détiennent le contrôle des troupes : les grands princes féodaux.

4.1.3   La rébellion des princes

En Angleterre, en France et dans le Saint Empire romain germanique, les suzerains ont progressivement accru leur pouvoir. Si l’origine divine de celui-ci confirme le caractère chrétien du souverain, elle l’émancipe de la tutelle politique romaine. Ce qui est vrai pour les princes l’est aussi pour les cité-États comme Venise, Florence ou Gênes. Le xiie siècle permet encore au pape de montrer sa puissance lors de la querelle des Investitures qui l’oppose à l’empereur germanique Henri IV.

Mais, au xiiie siècle, les princes cessent d’engager leurs forces dans les croisades et d’y participer eux-mêmes. Les papes, dont la puissance temporelle ne repose pas sur une armée efficace, doivent admettre celle des princes au point que la France, avec Philippe IV le Bel et ses successeurs, devient la protectrice de la papauté. Cette dernière s’installe durant le xive siècle dans le Comtat venaissin, et Avignon devient la résidence des papes (voir papauté en Avignon).

La soumission du pape au roi de France soulève, au sein même de l’Église, des protestations qui aboutissent au Grand Schisme d’Occident : deux papes se font concurrence, et seul le choix d’un troisième candidat, au cours du concile de Constance (1414-1418), vient à bout de ce dilemme. Cette crise d’une gravité immense s’inscrit dans l’écheveau complexe des tensions de la fin du Moyen Âge.

4.2   Les âges sombres
4.2.1   La Grande Peste

Les crises politiques et religieuses des xive et xve siècles aggravent une situation que rend déjà tragique la peste noire. L’épidémie apparaît en 1348 et, par vagues successives, cause la disparition d’un tiers de la population européenne. Des résurgences de cette épidémie se manifestent en Europe jusqu’au xviiie siècle. La « Grande Peste « marque profondément la fin du Moyen Âge, et ses répercussions démographiques sont sensibles durant trois siècles en Europe.

4.2.2   Les conflits

De nombreuses guerres marquent les deux derniers siècles du Moyen Âge : dans la péninsule Ibérique, des combats armés se déroulent non seulement contre les musulmans, mais aussi entre les royaumes chrétiens qui s’y sont mis en place (Aragon, Navarre, Castille, Portugal) ; l’Italie est déchirée par les guerres que se livrent les cités ; entre la France et l’Angleterre, le conflit, qui a commencé dès le xiie siècle, connaît, après quelques décennies d’apaisement, un paroxysme séculaire, la guerre de Cent Ans. Ces différents conflits s’interpénètrent : Du Guesclin, héros français de la guerre de Cent Ans, va combattre en Espagne pour le compte du roi Henri de Trastamare ; de même, les Génois interviennent en France.

Aux conflits entre les États souverains s’ajoutent des conflits intérieurs. Certains sont créés par les armées qui, en temps de paix, se trouvent sans ressources et soumettent au pillage les régions traversées : les Grandes Compagnies du xive siècle trouvent de dignes héritiers dans les « écorcheurs « du xve siècle. Les troupes officielles ont les plus grandes peines à maîtriser ces bandes armées, entraînées au combat. D’autres conflits opposent des partis briguant le pouvoir royal : en Castille, mais surtout en France (Armagnacs et Bourguignons) et en Angleterre (guerre des Deux-Roses).

L’Église est impuissante à tempérer l’ardeur des belligérants. Les protestations successives des papes contre les transformations de la guerre, contre les arbalètes, les coutilliers et l’artillerie naissante n’ont aucun écho.

L’art de la guerre a profondément changé : à une « guerre-tournoi « au cours de laquelle combattent des chevaliers dont l’objectif principal est de faire des prisonniers pour en tirer rançon, succède une guerre meurtrière où le quartier a pratiquement disparu.

Pour n’avoir pas senti cette évolution, les troupes françaises connaissent des déroutes stratégiques comme à la bataille de Crécy (1346), à la bataille de Poitiers (1356) où le roi lui-même est pris par les Anglais et à la bataille d’Azincourt (1415) — un succès tel pour les Anglais qu’il est élevé par Shakespeare au rang de moment fondateur de la puissance anglaise.

Le système du mercenariat, avec embauche de troupes professionnelles de soldats par des capitaines signant contrat avec les princes, s’étend dans toute l’Europe au détriment du vieil ost féodal (voir condottieri ; mercenaires).

4.2.3   La culture morbide

Les représentations de ces siècles noirs font une large place à une culture morbide. Les danses macabres, où une Mort squelettique armée de sa faux entraîne princes, reines, paysans et prélats dans un ballet dément, viennent orner les églises de toute la chrétienté par des fresques ou des tableaux. Les statues des monuments funéraires montrent, au lieu d’un paisible gisant, un cadavre en putréfaction. L’art de Jérôme Bosch se nourrit des peurs des hommes face à la mort omniprésente.

Les représentations religieuses changent aussi : les figures du Christ décharné, crucifié, souffrant, se multiplient, de même que celles d’une Vierge éplorée après la descente de la Croix. La Pietà a remplacé la lumineuse image de la Nativité.

L’idée d’une apocalypse s’est répandue à la faveur d’accidents symboliques, comme l’effondrement du toit de la cathédrale d’Amiens. Elle entraîne des pratiques religieuses nouvelles comme celle des flagellants, une recrudescence des pratiques hérétiques et une contestation très forte de l’Église catholique, tels la révolte hussite en Bohême et le mouvement vaudois dans la France du sud-est.

Cette période exceptionnellement sombre dans l’histoire de l’Europe est encore noircie par le contraste qui l’oppose, d’une part, à l’apaisement vécu aux xie et xiiie siècles et, d’autre part, à la Renaissance. Elle donne à tout le Moyen Âge une sinistre lumière.

4.3   La fin du Moyen Âge ?
4.3.1   La reconstitution des États

Au milieu des crises des xive-xve siècles se constituent à la fois des théories et des entités politiques dans lesquelles la Renaissance va se structurer.

Ainsi, au cœur même de la guerre de Cent Ans, les règnes de Charles V et Charles VII permettent un renforcement décisif de l’autorité du roi sur les princes et sur l’Église du royaume. Le domaine royal incorpore les terres prises aux vassaux rebelles, dont les ducs de Bourgogne (de Jean sans Peur à Charles le Téméraire) finalement vaincus par Louis XI en 1477. Les grands doivent admettre qu’ils sont avant tout des vassaux au service du roi.

Les rois développent une administration judiciaire et fiscale, qui remplace celles qu’ont dominées jusqu’alors les seigneurs. Ceux-ci se trouvent peu à peu dépossédés d’une partie croissante de leurs pouvoirs : à cet effet, le royaume anglais fait figure de précurseur ; à la fin du xve siècle, de la France à l’Espagne unifiée (par le mariage d’Isabelle de Castille et de Ferdinand d’Aragon), cette tendance est également confirmée. Les parlements, les baillis, les sénéchaux, les alcades, les sheriffs représentent, jusque dans les zones les plus enclavées, la toute-puissance des rois. À l’échelle du pays, des parlements souvent issus des anciennes curiae regis sont investis des fonctions judiciaires des rois.

La propagande vient à l’appui de ce travail essentiel de conquête de la souveraineté : les voyages royaux, les entrées des rois dans les villes, les cérémonies des sacres et des funérailles deviennent autant de moyens de glorifier la monarchie incarnée : la thèse selon laquelle « le roi ne meurt jamais « est développée à l’envi par tous les monarques d’Europe.

La réflexion politique connaît, de Bologne à Londres, un apogée durant ces périodes. Inspirés entre autres par les écrits de Jean de Salisbury (xiie siècle), les théoriciens du politique, souvent appointés par les princes eux-mêmes, donnent à chaque État des origines à la fois religieuses et philosophiques, qui en font des entités propres. En France, Jean de Terrevermeille ou Christine de Pisan à la fin du xive siècle sont deux représentants de ces philosophes politiques dans les œuvres desquels vont inlassablement puiser les théoriciens de la monarchie jusqu’au xviiie siècle.

Même s’il conserve une importance non négligeable, le christianisme a perdu sa souveraineté dans ces nouveaux États. Ainsi, par un acte unilatéral, la pragmatique sanction de Bourges (1438), le roi de France Charles VII peut-il organiser l’Église de son pays sans l’aval du pape.

4.3.2   L’évolution du monde chrétien

Deux siècles de malheurs que la religion s’est révélée impuissante à soulager ont plongé les chrétiens dans une profonde crise de conscience, entraînant la perte de l’hégémonie du christianisme. Cette évolution puise également ses sources dans l’ouverture du monde aux entreprises de voyageurs hardis qui, de Marco Polo à Christophe Colomb, en repoussent les limites. En outre, l’accélération des échanges commerciaux, le développement d’une activité financière de plus en plus élaborée pour satisfaire les besoins des États ne peut plus se faire dans le cadre d’une moralité assimilant le travail à une punition divine et les manipulations monétaires à un péché capital.

L’Église catholique s’adapte donc, admettant la possibilité des prêts à intérêts en échange de compensations parfois cocasses, comme ce compte ouvert à « notre seigneur « par le banquier Fugger au début du xvie siècle. Elle fait même montre d’un certain talent dans son adaptation : ses services spécifiques sont monnayés et les excès des ventes d’indulgences, qui assurent des rémissions de purgatoire aux acquéreurs, entraînent la protestation des prélats puristes. C’est de ces abus que germe la Réforme protestante.

De ces remises en question des visions du monde qu’a imposées l’Église depuis les débuts du Moyen Âge vont naître de nouvelles réflexions. Dès le xve siècle apparaissent en Italie, en Allemagne, en France, des formules artistiques récupérant les influences orientales et celles de l’Antiquité romaine ; les peintres découvrent les règles de la perspective, les architectes retrouvent les enseignements de Vitruve. L’Église cesse d’être le premier des clients pour les artistes : les princes se font mécènes et manieurs d’argent, à l’exemple de Jacques Cœur à Bourges ou des Médicis à Florence.

La question de l’automne du Moyen Âge a été posée par beaucoup de médiévistes depuis les années 1960-1970, dans la lignée des français Georges Duby, Bernard Guenée ou Michel Mollat. Les larmes du sultan Boabdil devant l’incendie de Grenade dont il était chassé, tout comme l’étonnement de Christophe Colomb devant ces « Indiens « inattendus enfin atteints, ne constituent que des repères d’un découpage chronologique postérieur entre les temps « médiévaux « et les temps « modernes «. Les traces du Moyen Âge européen se retrouvent dans les permanences de particularismes géopolitiques et dans l’héritage des pratiques religieuses et culturelles.

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