Max Weber, Le savant et le politique (1963)
Publié le 22/03/2014
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Max Weber, Le savant et le politique (1963)
Max Weber est un sociologue et économiste allemand. Il est l'un des fondateurs de la sociologie moderne. Son œuvre est dominée par une recherche sur la rationalité, et, plus spécifiquement, sur le processus de rationalisation, c'est à dire une conduite cohérente, voire optimale, par rapport aux buts de l'individu. Ses œuvres sont basées sur de nombreux objets, souvent liés à sa réflexion sur la rationalité, comme la domination, l'État, le droit... C'est en effet dans son œuvre « Politik als Beruf « sur laquelle nous allons nous attarder que nous retrouvons ces thèmes.
Le Savant et le politique est la traduction en français de cette œuvre ainsi que de « Wissenschaft als Beruf « la traduction littérale étant « la vocation de savant « . Ces œuvres sont toutes deux issues de conférences prononcées en 1917 et 1919 à l'université de Munich. Dans notre extrait, l'intérêt est de définir le politique, mais ayant un sens équivoque, Max Weber se limite à son sens commun qui est « état «.
Dans son analyse du politique Weber expose les notions de coercition et de domination au sein de l'Etat, nous verrons donc dans un premier temps l’État et le pouvoir coercitif puis dans un second temps la domination de l’État.
L’État et le pouvoir coercitif
Bien que Max Weber ait des difficultés à définir le politique à cause notamment de sa polysémie il est important de dire que le politique permet de donner forme au soucis de la préservation de la société car il en est le fondement c'est à dire l'expression de l'existence du groupe. Le politique possède une finalité propre, il englobe la totalité d'individus dans une société, une multitude se divise en groupe où les valeurs et buts sont différents. Cet ensemble est traversé par des différences et des contradictions. Il faut une valeur commune à tout les individus de façon à réunir les disparités, c'est création de la société, du groupement politique. Le but du politique n'est pas le bien de chaque membre, mais le bien de tous c'est à dire le bien commun. Le politique doit assurer la sécurité extérieure de la collectivité et la concorde intérieure, à travers notamment la pacification politique qui compose le corps social. Ici Max Weber dit « qu'il n'existe en effet aucune tâche dont ne se soit pas occupé un jour un groupement politique quelconque « c'est à dire que le politique s'occupe de tout les aspects de la société même « s'il n'existe pas (…) de tâches dont on puisse dire qu'elles aient de tout temps (…) appartenu en propre aux groupements politiques «. Pour lui le politique, en l'occurrence l’État « ne se laisse définir sociologiquement que par le moyen spécifique qui lui est propre, (…) à savoir la violence physique «. Il définit donc l’État comme un groupement politique où règne la violence.
Max Weber soutient la thèse de Trotski selon laquelle « Tout Etat est fondé sur la force «. En effet, sans la force l’État n'existerait pas et nous tomberions dans l'anarchie, c'est à dire l'absence d'autorité unique à caractère coercitif et donc pas d'autorité supérieure. La violence est un usage légitime et institutionnalisé de la force, il y a là l'idée que l'autorité exerce une pression pour faire respecter les règles. Mais une force qui opprime est considéré comme violence et dans ce cas il n'y a pas de finalité sociale car elle ne vise qu'à opprimer. La force institutionnalisée est légitime car elle est pour le bien de tous à travers le sanctions négatives liées au non respect d'une loi. Le politique est la mise en œuvre du droit par le moyen éventuel de la force. Cependant « la violence n'est évidemment pas l'unique moyen normal de l’État « . Max Weber soutient l'idée selon laquelle la notion d'État et la notion de violence sont de nos jours très liées. En effet l’État dispose du « monopole de la violence physique légitime « cela signifie qu'il est le seul à bénéficier du droit de mettre en œuvre, lui-même ou par délégation la violence physique sur son territoire. Excepté pour le cas de la légitime défense où dans ce cas l’État autorise un individu à user de la violence dans certaines conditions comme la menace directe pour sa propre vie par exemple. Max Weber propose une autre définition du politique comme étant « l'ensemble des efforts que l'on fait en vue de participer au pouvoir ou d'influencer la répartition du pouvoir, soit entre les États, soit entre les divers groupes à l'intérieur d'un même État «. Il définit le politique par la notion de compétition pour disposer des moyens du politique, c'est à dire la force et le droit car « tout homme qui fait de la politique aspire au pouvoir «. Il revient au peuple de désigner les représentants du pouvoir par le biais d'élections. Nous avons vu que l’État dispose d'une violence légitime mais cette dernière ne peut exister sans le rapport de domination de l'homme sur l'homme ou autrement dit de l'obéissance d'un homme à un homme.
La domination de l’État
Il y a reconnaissance de l'autorité quand elle est légitime. Les Hommes sont capables de consentir ou non d'obéir, de contester ou d'accepter ou non la légitimité de l'ordre établi.
L'obéissance doit être consentie. Max Weber définit le pouvoir comme une relation supposant en chacun des deux termes un consentement, il définit 3 sources de la légitimité qui renvoient à 3 types de pouvoir légitimes. Tout d'abord le pouvoir traditionnel ; « que le patriarche ou le seigneur terrien exerçait autrefois « il renvoie à la croyance, au caractère sacré des traditions qui fixent les règles de vie commune. Il se double d'une croyance dans le caractère sacré de ceux qui incarnent la tradition : « l'autorité de l'éternel hier «, c'est à dire des détenteurs du pouvoir car ils sont considérés comme sacré au non de la tradition. Les règles de vie commune se répètent et doivent être garanties par ces hommes sacrés. Selon Weber Il y a 3 caractéristiques qui découlent de ce pouvoir. En premier nous trouvons l'ancienneté : La tradition existe depuis très longtemps puis l'habitude : Les individus veulent et sont habitués à respecter la tradition et enfin l'héritage : Le titulaire du pouvoir est issu d'une lignée liée à l'exercice du pouvoir.
Puis nous trouvons le pouvoir charismatique : Cette forme de domination repose sur la soumission au caractère exceptionnel, sacré, à la vertu héroïque ou à la valeur exemplaire de la personne qui exerce le pouvoir.Quatre caractéristiques y sont associées, la première étant l'obéissance en la personne du chef et non aux règles, nous trouvons en deuxième caractéristiques les conditions particulières d'arrivée au pouvoir comme par exemple les guerres puis nous trouvons la subjectivité des critères de sélection du personnel administratif dont principalement le dévouement au chef et enfin l'instabilité : le chef doit constamment trouver un moyen de mettre en avant ses qualités par exemple avec ses victoires militaires ou des plébiscites et lorsqu'il n'y parvient pas, c'est la chute du régime.
Pour finir le troisième pouvoir est le pouvoir légal ou rationnel « qui s'impose en vertu de la légalité « c'est à dire qu'il repose sur la croyance à la validité des normes juridiques en vigueur. Les règles sont adoptées rationnellement c'est-à-dire qu'elles sont approuvées par le peuple ou ses représentants selon une procédure fixe et déterminée. Les règles sont formulées de façon abstraite et impersonnelle. Le détenteur du pouvoir est lui aussi soumis au droit, nous trouvons alors le principe de l'État de droit. Les gouvernés obéissent aux règles qui organisent la fonction de détenteur du pouvoir et non à la personne du détenteur du pouvoir. Ce qui vaut dans nos démocraties contemporaines, les citoyens obéissent moins à des personnes voire aux institutions, qu'aux normes. Le pouvoir exige un droit qui s'impose à tous, aux citoyens et au gouvernement. Tout véritable rapport de domination comporte un minimum de volonté d'obéir, par conséquent un intérêt, intérieur ou extérieur à obéir. Max Weber distingue trois raisons à l'obéissance des individus, « soit la peur d'une vengeance des puissances magiques ou des détenteurs du pouvoirs – soit l'espoir d'une récompense ici-bas ou dans l'autre monde « soit « d'autres intérêts variés «. C'est selon lui les trois formes pures qui composent la légitimité de l'obéissance. Pour durer, toute domination doit faire naître et renforcer une croyance en sa légitimité. Pour Weber, l’État doit donc exercer son pouvoir de manière à ce qu'il apparaisse juste et fondé afin de faire accepter sa domination sur les gouvernés. Par le biais de l'acceptation de la domination les gouvernés abandonneront le monopole de la violence légitime.
Nous avons donc tenté de définir le politique à travers la notion de coercition et la notion de domination sur lesquelles l’État est fondé. Tout pouvoir, y compris le plus légitime a donc besoin de ressources sur lesquelles s'appuyer pour perdurer. La force est une ressource mais elle n'est pas la plus efficace. Le pouvoir peut exclure l'usage de la force, car il peut se reposer sur la force des croyances. Les individus adhèrent sur ce qui fait le socle de l’État.
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