Mao, l'homme qui a refait la Chine
Publié le 17/01/2022
Extrait du document
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l'invasion de la Mandchourie par les Japonais, survenue en 1931.
Tandis qu'avec ceux-ci il signait un armistice, il monta contre les" rouges " une série d'expéditions qui furent autant d'échecs.
A la cinquième, cependant les communistes, assiégés dans leursmontagnes, se trouvèrent tout de même en grave péril.
Mao et les siens décidèrent alors la percée et, par un plan d'une audace incroyable, la migration de tout leur peuple communistejusqu'à l'autre bout de la Chine, au Nord-Ouest, choisi pour sa position stratégique favorable.
Ce fut l'épopée de la LongueMarche, une marche d'une année entière qui ne fut qu'une longue bataille, sur un parcours de 9000 kilomètres.
Mao fit unegrande partie de la route à pied.
Parfois il montait un poney blanc.
Zhu De une mule rousse.
En fin de voyage, l'épuisement était général.
Cent mille avaient prisle départ: ils étaient vingt mille à l'arrivée, à l'automne de 1935.
Mao et ses compagnons-dont Zhou Enlai, Liu Shaoqi et bien d'autres, déjà choisis par l'histoire-s'installèrent à Yernan dansdes sortes de grottes troglodytiques taillées dans le loess par les paysans pauvres.
Après tant de souffrances, c'était un momentquasi idyllique de la révolution.
Un deuxième laboratoire du communisme prenait corps, la petite république communiste et ruralede la province du Shensi.
Mao, qui avait perdu sa première femme-la fille d'un de ses professeurs d'autrefois, épousée à Pékin etque le Kouomintang avait exécutée,-s'était remarié avec une institutrice communiste.
Il formait les cadres du parti.
Il élaboraitdans de nombreux écrits et rapports l'essentiel de ses thèses, sur la guerre révolutionnaire, la dictature démocratique du peuple,l'art et la littérature socialistes, etc.
Edgar Snow, le journaliste américain qui le " découvrit " à Yenan en 1936, a brossé un frappant tableau de ce Mao Zedong dequarante-cinq ans, à la fois paysan, stratège militaire, politique de génie, théoricien et homme d'action.
Avec la simplicité et lenaturel du villageois, avec le parler tout simple éclairé d'un rire rustique, se combinaient un esprit incisif, une profondeconnaissance de l'histoire de son pays, une érudition de lecteur " omnivore " couronnée par une culture de lettré chinois accompli.
A Yenan, le climat était encore à la modération, à tel point que certains observateurs s'y trompaient et prenaient lescommunistes chinois pour de simples réformateurs agraires.
C'est que le régime de Yenan, pour se consolider, voulait rassurer, etcherchait aussi à faire l'union des Chinois devant le péril japonais grandissant.
De Mandchourie, en effet, les Japonais s'apprêtaient à conquérir toute la Chine.
Les communistes appelaient à la résistance.Tchiang Kaï-Chek se dérobait, jusqu'au jour où le fameux " incident de Sian " -quand un de ses lieutenants le mit en étatd'arrestation-lui arracha son consentement au front commun antijaponais.
Il était temps : un an après, en juillet 1937, les arméesnippones déferlaient en masse sur le pays.
Non sans des ruptures et des rivalités incessantes entre les communistes et Tchiang Kaï-Chek-le front commun allait durerjusqu'à la victoire de 1945 sur le Japon.
Mais la guerre usait les forces de Tchiang et ruinait la Chine, tandis que les territoirescontrôlés par les communistes s'agrandissaient et que s'accroissait leur prestige.
Au lendemain de la victoire, Patrick Hurley, puis le général Marshall, ambassadeurs de Roosevelt en Chine, tentèrent deréconcilier Tchiang et Mao et de faire fonctionner un gouvernement de coalition.
Vains efforts : en juillet 1946 éclatait une guerrecivile à grande échelle, où le Kouomintang, pourri, était partout perdant.
Au début de 1948, c'était enfin l'offensive générale del'armée populaire de libération, qui, à travers une Chine épuisée par l'inflation et la corruption, s'avança dans une marchevictorieuse du nord au sud; prise de Pékin en décembre, de Nankin et de Changhaï en été 1949, de la Chine du Sud en find'année.
Et le 1 er octobre, à Pékin, du haut des murs de l'ancienne cité impériale, Mao Zedong proclamait la naissance de la République populaire de Chine, devant une foule délirante qui lui souhaitait " dix mille années ".
1950, tournant d'une vie, tournant d'un siècle : Mao Zedong est au pouvoir, et la Chine populaire entre en scène.
Du coup, lalégende de Mao commence et son histoire personnelle s'estompe : elle se confond avec l'histoire même de la révolution.
Son rôlese dérobe derrière les décisions collectives, et sa vie privée s'entoure de secrets.
Retentissante sur la doctrine, la propagande est muette sur sa personne.
Son troisième mariage avec une actrice de cinéma, lenombre de ses enfants-il en aurait eu en tout six ou sept,-leur situation-un fils ingénieur, dit-on, une fille étudiante, un fils aîné pilotede chasse et tué aux premiers jours de la guerre de Corée,-le lieu de sa résidence, etc, tout cela n'a pas à être connu de la masse.La plupart des Pékinois ignorent qu'il a un logis dans l'enceinte occidentale de l'ancien palais impérial.
Nul ne sait quand il y est.
On sait seulement qu'il voyage fréquemment dans les provinces, fait des séjours à Changhaï, aime vivre à Hangchow, la cité audécor " vielle Chine ".
Parfois il semble disparu de la scène.
Le bruit court qu'il est malade.
Il reparaît soudain pour quelquecérémonie, et la multitude peut voir qu'il est robuste, hâlé, souriant-semblable à son portrait, qui est sur tous les murs et dans tous.
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