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LOUIS MERCIER: La porte.

Publié le 17/01/2022

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Louis Mercier, né en 187o, a publié : Voix de la terre et du temps (1903), le Poème de la Maison (1906), Lazare le Ressuscité (1909). C'est un poète simple et fort, à la pensée profonde, à la facture sobre et pourtant imagée.


La porte.


I
Confiante au pays des ancêtres, sachant
Qu'il n'arrivera rien de funeste des champs
Aimés d'elle depuis sa première jeunesse,
La porte tout le jour demeure ouverte, et laisse
Entrer paisiblement au coeur de la maison
La lumière du ciel et l'odeur des saisons.
Elle rit au lever du soleil qui la dore,
Et bâille pour humer la fraîcheur de l'aurore;
Elle a pour visiteurs les souffles du printemps
Et la rumeur des blés dans les mois éclatants.
Elle n'est point sévère aux mendiants qui passent
Et, comme aux temps anciens, chargés d'une besace,
Vont demandant leur pain, pour l'amour du bon Dieu :
Elle sait que ceux-là n'ont pas de mauvais yeux,
Qu'ils ne jetteront pas de sort sur les étables,
Et qu'on les fait s'asseoir quelquefois à la table.
Souvent même elle fait un accueil indulgent
Aux bêtes qui chez nous vivent avec les gens :
Les poules, sur le seuil, gloussent, grattent, picorent,
Cependant que le coq, impudent et sonore,
Brave le chien maussade et cherche son butin
Jusqu'aux pieds de la huche où l'on serre le pain.
D'autres fois, s'abattant du bord des tuiles roses,
Un vol harmonieux de colombes s'y pose,
Ou, lorsque le berger rentre des prés, le soir,
Une vache, soudain, curieuse de voir
Comment chez les humains une maison est faite,
Par la porte béante aventure sa tête.


II


Quand vient la nuit pourtant, et lorsque à pas de loup
L'ombre sort des fourrés, débouche des ramures,
S'étend au coin des bois, pullule, et tout à coup
Inonde le pays de ses hordes obscures;
Quand, le soleil couché, les choses que l'on voit
Prennent soudainement une forme qui change
Leur visage amical en des faces d'effroi,
Et que nos propres pas nous paraissent étranges;
Quand ceux qui travaillaient au loin sont revenus,
Laissant les champs déserts et les ténèbres seules,
Et quand les chemins sont aux passants inconnus
Qu'on n'aime pas trouver rôdant autour des meules;
Sachant qu'il n'est pas bon que les siens aient sur eux
La menace et la peur des ombres ennemies,
La porte, close à l'heure où l'on éteint les feux,
Veille pieusement sur leur âme endormie.


(Le Poème de la Maison, Calmann-Lévy, édit.)


QUESTIONS D'EXAMEN


I. — L'ensemble. — Poème dans lequel l'auteur montre que le sujet le plus banal en apparence, — une porte de maison, — a pourtant sa poésie. — La porte de la maison n'est-elle pas présentée comme ayant une âme? Quels sentiments paraît-elle éprouver? (Sentiment de confiance, le jour, — de défiance, la nuit...) ; Quel rôle bienfaisant joue-t-elle, la nuit, pour ceux qu'elle enclôt? (La porte Veille pieusement sur leur âme endormie).


II. — Analyse du poème. — Donnez un titre à chacune des deux parties du poème : a) La porte, pendant le jour; — b) ...); Dites comment la porte, pendant le jour, marque sa confiance (Elle demeure ouverte; elle rit au lever du soleil... ; elle bâille pour humer l'air frais du matin; elle ne se ferme point devant les mendiants... ; elle fait un accueil indulgent aux bêtes de la maison...); La porte n'a-t-elle pas encore d'autres visiteurs? Lesquels? Comment nous apparaît la porte, quand arrive la nuit? D'où provient sa déchéance? (De l'ombre, qui peu à peu s'étend, —des ténèbres, — des faces d'effroi que prennent les choses, — des bruits étranges que font nos pas, — de la présence de passants inconnus dans les chemins); Comment se présente-t-elle à nous quand tous les siens sont revenus des champs et dorment ? Et elle aussi dort-elle?


III. — Le style; — les expressions. — Montrez, dans ce poème, le parfait enchaînement des idées; Quels vous paraissent être les caractères distinctifs du style? (La clarté..., la sobriété..., le pittoresque (rappeler quelques images : elle bâille pour humer la fraîcheur...; elle a pour visiteurs les souffles du printemps...; un vol harmonieux de colombes..., la vache, qui aventure sa tète par la porte béante...; la porte qui veille pieusement...); Indiquez le sens de chacune des expressions suivantes L'ombre... pullule, — inonde le pays de ses hordes obscures, — des faces d' effroi, — la menace et la peur des ombres ennemies; Expliquez les mots : gloussent, grattent, picorent, — impudent et sonore, — ramures.


IV. — La grammaire. — Indiquez quelques mots de la même famille que porte; Quels sont : les adverbes, les prépositions contenus dans la dernière strophe? Rédaction. — Une vieille porte parle des frayeurs qu'elle a parfois éprouvées, la nuit. Mais elle était forte, résistante....

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