Les Membres de l'Estomac - Jean de Lafontaine
Publié le 14/06/2011
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Introduction: Jean de La Fontaine, fabuliste du XVIIe siècle qui s'intéresse beaucoup à l'esprit critique et à la morale, prend pour modèle Esope un écrivain grec du Ve siècle avant J.C, en reformulant « le ventre et les pieds « il écrit en 1668 « Les Membres et l'estomac «. Cette fable est destinée à faire réfléchir le lecteur sur la nécessité du pouvoir politique. Dans quelle mesure cette fable constitue-t-elle un véritable apologue ? Nous analyserons tout d'abord l'aspect narratif de cette fable puis nous étudierons sa visée argumentative. I) Aspect narratif 1) Il s'agit pour l'auteur de mettre en présence des éléments narratifs, en effet une histoire est racontée, c'est un récit en vers accessible à tous, qui permet par l'identification aux personnages d'un récit imaginaire de gagner l'intérêt du lecteur, il est vrai qu'il est plus facile de lire un texte qu'on comprend. L'auteur établit dès les premiers vers une analogie entre l'estomac appelé « Messer Gaster « qui représente le roi louis XIV à l'aide d'une métaphore filée qui se poursuit tout au long du texte. Ce nom est la reprise d'une expression rabelaisienne lui permettant de tourner en ridicule des situations très sérieuses à savoir le pouvoir royal. Il utilise en effet le registre burlesque, les personnages mis en scène par La Fontaine sont souvent des animaux et l'utilisation d'un registre anatomique peut paraître gênant, inspirer le dégoût. On note la volonté de décrire le contexte politique avec une réification, les Membres sont mis pour les courtisans, ainsi les Membres apportent la nourriture à l'estomac qui lui se contente de recevoir ce qu'on lui donne. Le roi détient le pouvoir, et tout le monde assouvit sa moindre envie. L'auteur met ainsi en scène des personnages afin d'éviter la censure, ce qui lui permet de faire passer un message à l'aide des défauts et qualités attribués à chaque personnage tout en gardant un certain recul. 2) Grâce à cette analogie l'auteur rend compte des difficultés que rencontre les personnes vivant sous ce gouvernement. En effet l'opposition « s'il a quelque besoin, tout le corps s'en ressent « souligne l'autorité et l'influence du roi. La pénibilité du travail des courtisans est accentuée par la reprise anaphorique du pronom nous, d'une gradation « nous suons, nous peinons « et par la comparaison avec des animaux « comme des bêtes de somme «, ils travaillent dur sans aucune reconnaissance. Le rejet « de vivre en gentilhomme, sans rien faire « met en valeur le fait que certaines personnes ne travaillent pas et gagnent néanmoins beaucoup d'argent. De plus, la césure à l'hémistiche « Et pour qui ? Pour lui seul ; nous n'en profitons pas « composée d'une question rhétorique prouve le fait que personne ne les écoute et qu'ils ne jouissent en rien du fruit de leur travail. L'expression explétive « qu'à fournir ses repas « reflète l'inutilité de leur travail, ils ne font qu'obéir et sont les serviteurs du roi. Cet écart entre la situation royale et celle du peuple est intensifiée par des énumérations qui attribuent au roi la richesse et le pouvoir tandis que des termes à connotation négative tels que le mal, les impôts sont adressés au peuple en synonyme de leur misère. Les courtisans las de cette situation exprimée par l'antithèse « chômons, c'est un métier qu'il veut nous faire apprendre « décident de se révolter et de laisser le roi livré à lui-même. 3) Une logique de cause conséquence régit également ce texte, « Ainsi dit, ainsi fait «, la reprise anaphorique de ainsi exprime la rapidité de la décision prise qui nécessiterai peut-être une plus longue réflexion. Un rythme rapide s'installe grâce à l'emploi du passé simple et à l'énumération de trois actions à la suite de « cessent « à savoir « prendre «, « agir « et « marcher «. Chaque verbe représente la fonction d'un membre différent, tout le monde s'arrête de travailler. Comme l'indique le champ lexical de la déception et de la faiblesse « erreur «, « repentirent «, « pauvres gens «, « langueur «, « souffrit « « croyaient « ce fut une méprise. Ainsi les Membres n'apportent plus de nourriture à l'estomac, la nourriture n'est pas transformée ni redistribuée et ils n'ont plus de forces, ils se rendent alors compte de l'importance du roi qu'ils n'avaient remarqué auparavant. Chacun comprend désormais la tâche vitale qu'accomplit le roi étant donné que les membres ne peuvent survivre sans le fonctionnement de l'estomac, ils ont donc besoin de lui. La nourriture est mise pour les impôts, le roi récolte de nombreux tributs qu'il réinvestit dans le pays de manière à organiser la société mais si personne ne lui donne d'argent il ne peut rien faire. Le roi a donc tout autant besoin des Membres, on remarque une majuscule à Membre comme un nom propre pour accorder une certaine importance. Le roi a toujours été habitué à être servi, il ne saurait se débrouiller tout seul il n'a aucune notion du travail. L'apologue par un récit léger permet de faire passer un message une relation d'interdépendance régit donc le roi et les courtisans, le gouvernement et la société. Cet aspect distrayant cache pourtant une véritable stratégie l'argumentative. II) Visée argumentative 1) Ce récit en apparence futile se révèle être un moyen très efficace pour établir une satire du roi et de la monarchie qui régit le pays. L'auteur dans un premier temps constitue une éloge du gouvernement, de sa toute puissance mais derrière ces termes mélioratifs se trouve une véritable critique. Il utilise le registre ironique, il exagère le titre « Messer Gaster «, afin de montrer le ridicule du personnage. L'hyperbole « grâces souveraines « est complétée par l'expression « entretient seule tout l'Etat « , impliquant une pensée négative à l'égard de la royauté. Il est impossible au roi seul d'assumer toutes les fonctions liées à la régence du pays, il délègue forcément ses responsabilités et de nombreux conseillers et ministres lui sont indispensables. L'auteur utilise toujours le second degré afin de faire deviner au lecteur la disproportion de la répartition des richesses dans l'Etat. Une mise en opposition dans la phrase « reçoit et donne et la chose est égale « sous entend que ce n'est point la réalité, le roi garde une grande partie de l'argent qu'il prélève. Il fait « subsister «, « maintient « et « gage «, « distribue « et « donne paie « au contraire aux personnages haut placés dans la hiérarchie sociale. Le roi gardait les richesses fournies par le peuple pour organiser de fastueux dîners se désintéressant totalement de la misère de son peuple. L'apologue devient alors une véritable arme argumentative tout en évitant la censure. Dans une monarchie absolue une remise dans le droit chemin du peuple par la violence est sous entendue, en effet les membres finissent par travailler à nouveau et accepter leur situation, les courtisans ne pouvaient s'exprimer ni agir librement. 2) L'efficacité de la persuasion est prouvée au lecteur grâce à la mise en abyme. Une référence historique est faite au peuple romain qui serait comparée aux Membres donc aux courtisans confrontés à la Plèbe mise pour l'estomac autrement dit le gouvernement. La périphrase « Ménénius le sut bien dire « permet la comparaison entre ces trois histoires et introduit une dimension spéculaire. La fable qui nous est contée est utilisée dans un récit enchâssé, pour permettre une prise de conscience civique du peuple à savoir un retour au travail. L'auteur pour montrer l'efficacité de la parole et de l'apologue a recours à un exemple historique où la fable a été utilisée et où cette méthode fut une réussite. Ménénius a dû certainement avoir recours à différents moyens pour faire revenir le peuple, celui-ci est déterminé à partir mais dès qu'il établit un rapprochement avec ce récit allégorique le peuple comprend et change immédiatement d'avis. L'apologue révèle l'inattention des gens et conduit à un changement étant donné qu'il implique une réflexion. 3) La morale de cette fable est implicite, il convient alors de réfléchir tout au long du texte. La Fontaine établit une circularité dans les différents récits qui composent cette fable, en effet dans chacune des trois situations la tentative de changement est impossible et il y a un retour à la situation de départ. On en déduit donc que cette circularité représente l'organisation de la société, elle a été établie d'une certaine manière et même si des changements mineurs peuvent être effectués le gouvernement garde toujours son importance. Cette vérité générale est remarquable grâce à l'utilisation du présent et contraste avec les temps du passé utilisés pour la narration. L'auteur n'a d'autre choix que de soutenir le régime en place car il cherche la paix mais en affichant une certaine retenue, on trouve les termes « Je devais « qui marque l'obligation. Conclusion: Au final, par l'originalité de sa structure, un jeu sur l'emboîtement des récits, La Fontaine illustre le pouvoir des fables. L'apologue a une portée didactique, La Fontaine tente de justifier la supériorité et la puissance du gouvernement même si une relation d'interdépendance engage politique et société, il défend un certain équilibre. En s'appuyant sur des sources historiques l'auteur nous prouve l'intemporalité de ces fables, ce déséquilibre était présent chez les romains, animait les débats à la période contemporaine de l'auteur mais n'est ce toujours pas le cas de nos jours ?
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II) Visée argumentative
1) Ce récit en apparence futile se révèle être un moyen très efficace pour établir une satire du roi et de lamonarchie qui régit le pays.
L'auteur dans un premier temps constitue une éloge du gouvernement, de sa toutepuissance mais derrière ces termes mélioratifs se trouve une véritable critique.
Il utilise le registre ironique, ilexagère le titre « Messer Gaster », afin de montrer le ridicule du personnage.
L'hyperbole « grâces souveraines » estcomplétée par l'expression « entretient seule tout l'Etat » , impliquant une pensée négative à l'égard de la royauté.Il est impossible au roi seul d'assumer toutes les fonctions liées à la régence du pays, il délègue forcément sesresponsabilités et de nombreux conseillers et ministres lui sont indispensables.
L'auteur utilise toujours le seconddegré afin de faire deviner au lecteur la disproportion de la répartition des richesses dans l'Etat.
Une mise enopposition dans la phrase « reçoit et donne et la chose est égale » sous entend que ce n'est point la réalité, le roigarde une grande partie de l'argent qu'il prélève.
Il fait « subsister », « maintient » et « gage », « distribue » et «donne paie » au contraire aux personnages haut placés dans la hiérarchie sociale.
Le roi gardait les richessesfournies par le peuple pour organiser de fastueux dîners se désintéressant totalement de la misère de son peuple.L'apologue devient alors une véritable arme argumentative tout en évitant la censure.
Dans une monarchie absolueune remise dans le droit chemin du peuple par la violence est sous entendue, en effet les membres finissent partravailler à nouveau et accepter leur situation, les courtisans ne pouvaient s'exprimer ni agir librement.
2) L'efficacité de la persuasion est prouvée au lecteur grâce à la mise en abyme.
Une référence historique est faiteau peuple romain qui serait comparée aux Membres donc aux courtisans confrontés à la Plèbe mise pour l'estomacautrement dit le gouvernement.
La périphrase « Ménénius le sut bien dire » permet la comparaison entre ces troishistoires et introduit une dimension spéculaire.
La fable qui nous est contée est utilisée dans un récit enchâssé,pour permettre une prise de conscience civique du peuple à savoir un retour au travail.
L'auteur pour montrerl'efficacité de la parole et de l'apologue a recours à un exemple historique où la fable a été utilisée et où cetteméthode fut une réussite.
Ménénius a dû certainement avoir recours à différents moyens pour faire revenir lepeuple, celui-ci est déterminé à partir mais dès qu'il établit un rapprochement avec ce récit allégorique le peuplecomprend et change immédiatement d'avis.
L'apologue révèle l'inattention des gens et conduit à un changementétant donné qu'il implique une réflexion.
3) La morale de cette fable est implicite, il convient alors de réfléchir tout au long du texte.
La Fontaine établit unecircularité dans les différents récits qui composent cette fable, en effet dans chacune des trois situations latentative de changement est impossible et il y a un retour à la situation de départ.
On en déduit donc que cettecircularité représente l'organisation de la société, elle a été établie d'une certaine manière et même si deschangements mineurs peuvent être effectués le gouvernement garde toujours son importance.
Cette vérité généraleest remarquable grâce à l'utilisation du présent et contraste avec les temps du passé utilisés pour la narration.L'auteur n'a d'autre choix que de soutenir le régime en place car il cherche la paix mais en affichant une certaineretenue, on trouve les termes « Je devais » qui marque l'obligation.
Conclusion:
Au final, par l'originalité de sa structure, un jeu sur l'emboîtement des récits, La Fontaine illustre le pouvoir desfables.
L'apologue a une portée didactique, La Fontaine tente de justifier la supériorité et la puissance dugouvernement même si une relation d'interdépendance engage politique et société, il défend un certain équilibre.
Ens'appuyant sur des sources historiques l'auteur nous prouve l'intemporalité de ces fables, ce déséquilibre étaitprésent chez les romains, animait les débats à la période contemporaine de l'auteur mais n'est ce toujours pas le casde nos jours ?
Sujet désiré en échange :
Jean-Jacques Rousseau, Les Confessions.
Le bonheur aux Charmettes.
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