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Le Petit Chaperon rouge - Charles PERRAULT (Histoires ou contes du temps passé)

Publié le 06/07/2010

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CONTE      Il était une fois une petite fille de Village, la plus jolie qu’on eût su voir ; sa mère en était folle, et sa grand-mère plus folle encore. Cette bonne femme lui fit faire un petit chaperon rouge, qui lui seyait si bien, que partout on l’appelait le Petit Chaperon rouge.  Un jour sa mère ayant cuit des galettes, lui dit : « Va voir comme se porte ta mère-grand, car on m’a dit qu’elle était malade, porte-lui une galette et ce petit pot de beurre. « Le Petit Chaperon rouge partit aussitôt pour aller chez sa mère-grand, qui demeurait dans un autre Village. En passant dans un bois elle rencontra compère le Loup, qui eut bien envie de la manger ; mais il n’osa, à cause de quelques bûcherons qui étaient dans la Forêt. Il lui demanda où elle allait ; la pauvre enfant qui ne savait pas qu’il est dangereux de s’arrêter à écouter un Loup, lui dit : « Je vais voir ma Mère-grand, et lui porter une galette et un petit pot de beurre que ma Mère lui envoie. − Demeure-t-elle bien loin ? lui dit le Loup. − Oh ! oui, dit le Petit Chaperon rouge, c’est par-delà le Moulin que vous voyez tout là-bas, à la première maison du Village. − Eh bien, dit le Loup, je veux l’aller voir aussi ; je m’y en vais par ce chemin ici, et toi par ce chemin-là, et nous verrons à qui plus tôt y sera. «  Le Loup se mit à courir de toute sa force par le chemin qui était le plus court, et la petite fille s’en alla par le chemin le plus long, s’amusant à cueillir des noisettes, à courir après les papillons, et à faire des bouquets des petites fleurs qu’elle rencontrait.  Le Loup ne fut pas longtemps à arriver à la maison de la mère-grand ; il heurte : Toc, toc. « Qui est là ? − C’est votre fille, le Petit Chaperon rouge, dit le Loup, en contrefaisant sa voix, qui vous apporte une galette, et un petit pot de beurre que ma Mère vous envoie. « La bonne grand-mère qui était dans son lit à cause qu’elle se trouvait un peu mal, lui cria : « Tire la chevillette, la bobinette cherra. « Le Loup tira la chevillette, et la porte s’ouvrit. Il se jeta sur la bonne femme, et la dévora en moins de rien ; car il y avait plus de trois jours qu’il n’avait pas mangé. Ensuite il ferma la porte, et s’alla coucher dans le lit de la mère-grand, en attendant le Petit Chaperon rouge, qui quelque temps après, vint heurter à la porte. Toc, toc. « Qui est là ? « Le Petit Chaperon rouge, qui entendit la grosse voix du Loup, eut peur d’abord, mais croyant que sa mère-grand était enrhumée, répondit : « C’est votre fille, le Petit Chaperon rouge, qui vous apporte une galette et un petit pot de beurre que ma Mère vous envoie. « Le Loup lui cria, en adoucissant un peu sa voix : « Tire la chevillette, la bobinette cherra. « Le Petit Chaperon rouge tira la chevillette, et la porte s’ouvrit.  Le loup, la voyant entrer, lui dit en se cachant dans le lit sous la couverture : « Mets la galette et le petit pot de beurre sur la huche, et vient te coucher ave moi. « Le Petit Chaperon rouge se déshabille et va se mettre dans le lit, où elle fut bien étonnée de voir comment sa mère-grand était faite en son déshabillé ; elle lui dit : « Ma − mère-grand, que vous avez de grands bras ! C’est pour mieux t’embrasser, ma fille. − Ma mère-grand, que vous avez de grandes jambes ! − C’est pour mieux courir, mon enfant. − Ma mère-grand, que vous avez de grandes oreilles ! − C’est pour mieux écouter, mon enfant. − Ma mère-grand, que vous avez de grandes dents ! − C’est pour mieux te manger. « Et, en disant ces mots, ce méchant Loup se jeta sur le Petit Chaperon rouge, et le mangea.    MORALITE    On Voit ici que de jeunes enfants,  Surtout de jeunes filles,  Belles, bien faites, et gentilles,  Font très mal d’écouter toute sorte de gens,  Et que ce n’est pas chose étrange,  S’il en est tant que le loup mange.  Je dis le loup, car tous les loups  Ne sont pas de la même sorte :  Il en est d’une humeur accorte,  Sans bruit, sans fiel et sans courroux,  Qui privés, complaisants et doux,  Suivent les jeunes Demoiselles  Jusque dans les maisons, jusque dans les ruelles ;  Mais hélas ! qui ne sait que ces loups doucereux,  De tous les loups sont les plus dangereux.      Charles PERRAULT  Histoires ou contes du temps passé, 1697.   

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« Rodrigue partage les vues de son père à cet égard : à la question provocante du père, qui ouvre la scène, relativeau courage possible du fils, la réponse de ce dernier jaillit sans la moindre hésitation : DON DIEGUE« Rodrigue, as-tu du coeur ?DON RODRIGUETout autre que mon père L'éprouverait sur l'heure.

»(v.

261-262) La seule résistance que Rodrigue devra vaincre, en particulier dans les Stances, consécutives à cette scène,provient, bien entendu, de son amour pour Chimène; Rodrigue comprendra que l'honneur, et la dette de sang qu'il luifaut acquitter envers son père et sa lignée, l'emportent prioritairement sur l'attachement amoureux.

Don Diègueconnaît cette résistance.

C'est bien pourquoi il ne divulgue le nom de l'agresseur qu'à la fin de la tirade.

Jusqu'à cemoment, le père peut, en effet, être assuré que son fils accorde son adhésion à ses vues.Rodrigue ne s'est jamais battu et pourtant, du premier coup — le «coup d'essai» est un «coup de maître» —, ilsurpasse le Comte, qu'il tue.

Le voilà investi d'un statut héroïque incomparable, lui qui a su vaincre cet hommeredoutable et quasi invincible dont le portrait est esquissé par Don Diègue dans cette scène 5.

Mais on ne peutfonder un ordre sur la réciprocité des représailles.Pour que le « Meurs ou tue», postulé par Don Diègue, devienne le principe fondateur d'un ordre héroïque, il estnécessaire que la vengeance — et la violence dont elle procède — cesse d'être une affaire privée pour se convertiren une affaire publique et d'Etat : la loi du plus fort doit faire place à la force de la loi et du droit.

Après s'êtredégagé de ses obligations envers la loi du sang, Rodrigue est en mesure de conquérir son autonomie, mais il abesoin, pour ce faire, d'une occasion favorable : le triomphe remporté sur les Mores (triomphe, cette fois, public, quivient illustrer le «Meurs ou tue» puisqu'il y a péril de mort pour Rodrigue) vaut à Rodrigue de s'affranchir de toutedette envers son père et le roi : DON FERNAND« Sois désormais le Cid qu'à ce grand nom tout cède; Qu'il comble d'épouvante et Grenade et Tolède,Et qu'il marque à tous ceux qui vivent sous mes lois Et ce que tu me vaux, et ce que je te dois.

»(IV, 3, v.

1226-1227) Devenu le sauveur de l'Etat monarchique, Rodrigue peut se montrer à la cour sans avoir à redouter la justice royale: le meurtre du Comte est absous (« Les Mores en fuyant ont emporté son crime», constatera Don Fernand).

Bienplus, Rodrigue s'applique à faire un usage légitime de la violence, dès lors qu'il épargne les deux rois mores ainsi que,peu après, son adversaire vaincu lors du duel judiciaire : Don Sanche.

L'alliance finale du héros et du monarqueatteste un changement de perspective.

Désormais, la création et la consolidation de l'Etat requièrent lerenoncement à la vengeance privée.

La cohésion, sociale et politique, de la monarchie est à ce prix. Chimène, pour sa part, adopte apparemment la même logique que Rodrigue : celle du « Meurs ou tue», qui conduit àla mort du coupable.

Il s'agit toujours de recourir aux représailles et, en la circonstance, à la loi du talion.

Invoquantle «sang» du Comte, elle réclame le «sang» de Rodrigue : « Enfin mon père est mort, j'en demande vengeance.

Plus pour votre intérêt que pour mon allégeance.

Vous perdezen la mort d'un homme de son rang : Vengez-la par une autre, et le sang par le sang.»(II, 8, v.

689-692) Toutefois, à la différence de Don Diègue et de Rodrigue, elle s'en remet au roi du soin de satisfaire sa vengeance.En bonne logique monarchique, le roi-juge accorde un duel judiciaire, une seule et unique fois.

La vengeance privéen'ayant plus droit de cité, l'ordre communautaire est sauvegardé! Mais comme Don Sanche n'est nullement unadversaire à la mesure de Rodrigue, Chimène n'aura pas l'occasion d'exercer vraiment sa vengeance, d'autant moinsqu'au cours des deux entretiens privés avec Rodrigue (III, 4 et V, 1), Chimène se condamne sciemment àl'impuissance.Or, tant qu'elle n'avoue pas publiquement, non sa haine vengeresse mais son refus réel de se venger, Chimène nesaurait abandonner la fiction que constitue sa croyance en un amour héroïque et donc vengeur.Après une tentative infructueuse dont le roi prend publiquement l'initiative (IV, 5) et qui vise à extorquer un aveupar la ruse, Chimène, dans la scène 5 et, devant toute la cour, dans la scène 6 de l'acte V, sera victime d'unmalentendu : elle croira voir le sang de Rodrigue sur l'épée que lui présente Don Sanche, tout comme elle a cru voirle sang de son père sur l'épée que lui présentait Rodrigue (premier entretien privé avec Rodrigue, III, 4).

Elle avouealors publiquement un amour qu'elle estime « légitime» (la vengeance étant supposée accomplie).A partir de ce moment, son union avec Rodrigue devient inévitable.

Mais il lui faut simultanément se reconnaîtrecomme complice du meurtrier de son père.

Il faut qu'à l'instar de Rodrigue Chimène accomplisse à sa manière legeste meurtrier qu'implique le « Meurs ou tue», qu'elle se juge responsable, sinon coupable, d'avoir tué le Comte.

Tel. »

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