Le complexe corse
Publié le 17/01/2022
Extrait du document
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le scepticisme spontané d'une île qui a pris l'habitude de ces alternances particulières entre laxisme et répression, il eût fallu éviterde donner l'impression à toute une communauté qu'elle devait expier une sorte de culpabilité collective, que son mode de vie, sesparticularismes étaient la cause du mal, qu'en chaque Corse, chaque gendarme ou policier devait soupçonner un criminel potentiel- c'est cela, l'atmosphère qui a été créée dans l'île.
Sans revenir sur le comble de cette logique aveugle que fut la création d'un " canal GPS ", pour faire pièce au " Canal historique", l'Etat doit aujourd'hui s'interroger sur sa mission.
Elle est, pour l'essentiel, pédagogique : aimer et faire aimer la loi.
Et pour celaconsidérer les Corses comme des Français comme les autres.
Or toute la logique qui s'est déployée en Corse depuis un an tend àl'inverse : on se sert de l'exception, voire des services spéciaux, pour justifier une norme, une normalisation que l'on contreditaussitôt par ses actes.
Faire aimer la loi, quand l'Etat ou son représentant paraissait n'aimer que l'exercice de l'autorité.
Faireaimer et faire respecter la loi, c'est aussi permettre à une génération, lasse dans sa plus grande partie de l'illégalité, d'abandonnercelle-ci pour lui préférer le jeu démocratique.
Nouvelle chance ?
Il n'y a donc pas d'autre moyen de sortir de l'impasse que de faire confiance aux Corses, à ce peuple corse qui n'a, pourl'essentiel, nullement l'intention de se séparer de la communauté nationale : car même le discours séparatiste reste un discoursanalogique.
Jouer le jeu de l'autonomie actuelle, qui est large, et peut-être initier une vaste concertation, sur le modèle de ce qui aprévalu en Nouvelle-Calédonie, qui permette de jeter les bases d'une plate-forme minimale, politique, économique, sociale etculturelle, qui donne le sentiment d'un nouveau départ.
Pourquoi ne pas se saisir de ce second traumatisme, qui est en quelquesorte l'envers du premier, pour en faire l'occasion d'une nouvelle chance ? Après tout, les nationalistes cherchent toujours unesortie honorable, et la droite, largement dominante dans l'île, et son leader José Rossi, ont toujours rêvé d'une Corse autonome etréconciliée.
Faire confiance au peuple corse suppose, il est vrai, en retour, que celui-ci respecte le ciment de la collectivité nationale qu'estle droit du sol.
Et que ses représentants les plus radicaux abandonnent le discours et les comportements d'exclusion, dexénophobie, à l'endroit de ceux qui, maghrébins ou continentaux, n'ont jamais que le tort d'enrichir la société corse.
Ce petitpeuple fut un temps - très bref - porteur d'un nationalisme cosmopolite, il fut trop brièvement conscient qu'il était lui-même unemosaïque : c'est ce fil-là, cher à Jean- Jacques Rousseau, qu'il lui faut retrouver où, pour suivre Culioli, l'homme est " unmerveilleux hologramme qui contient à la fois soi-même et tous les autres, la différence et le similaire ".
Qui mieux que la République pourrait l'y aider ?
JEAN-MARIE COLOMBANI Le Monde du 6 mai 1999
CD-ROM L'Histoire au jour le jour © 2002, coédition Le Monde, Emme et IDM - Tous droits réservés.
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