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La deuxième bataille de France commence

Publié le 22/02/2012

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6 juin 1944 - Lorsque, dans la soirée du 5 juin 1944, la BBC diffuse son message le plus célèbre de toute la guerre (les vers de Verlaine annonçant l'imminence du débarquement- " Les sanglots longs des violons de l'automne-Blessent mon coeur d'une langueur monotone ",-un message dont les services allemands d'écoute ont percé le secret, mais sans l'exploiter à leur profit), l'événement met soudain un terme à l'attente qui dure depuis des semaines de part et d'autre de la Manche. Car, à l'Ouest, tout le printemps 1944 n'a été qu'une gigantesque veillée d'armes. Chez les deux adversaires, on a pleine conscience de l'immensité de l'enjeu. Convoquant ses généraux en mars 1944, Hitler a été le premier à leur expliquer que l'invasion annoncée déterminerait l'issue de la guerre. En effet, soutient-il, si l'armée allemande parvient à repousser les assaillants, les Anglo-Américains devront renoncer à toute nouvelle tentative et leur moral s'effondrera. Il sera alors possible à la Wehrmacht de transférer sur le front de l'Est la cinquantaine de divisions rendues disponibles, et grâce à ce renfort, de remporter une victoire définitive sur l'Union soviétique. Ainsi la bataille à l'Ouest scellera le destin du Reich. Aujourd'hui, à force d'entendre célébrer l'ampleur et la minutie des préparatifs des Alliés, beaucoup ont pris l'habitude de considérer que ceux-ci s'étaient lancés dans une opération certes audacieuse, mais quasi assurée du succès en fonction de leur supériorité navale et aérienne. Or, rien n'est moins conforme à la réalité. Du reste, les hauts responsables britanniques et américains ne s'y trompaient pas. Dans les semaines précédant le jour J, plusieurs d'entre eux ne cachaient pas leur appréhension. Pour Bedell Smith, le chef d'état-major d'Eisenhower, il y avait seulement une chance sur deux de réussir. Effectivement, les risques encourus étaient énormes : à la mesure même de l'expédition. A vrai dire, celle-ci pouvait tourner au désastre de trois manières. La première calamité possible, c'était, comme pour toute opération amphibie, l'adversité des éléments. Justement, alors qu'à l'origine le jour J était fixé au 5 juin, les prévisions détestables de la météo avaient obligé à tout repousser de vingt-quatre heures. Quand, finalement, Eisenhower, après avoir conféré avec les experts et avec son état-major, prend la décision fatidique d'embarquement, la tension atteint son comble au quartier général, tant chacun mesure combien risqué est le pari pris sur la mer et le ciel. On le voit d'ailleurs dès les premières heures du 6 juin. En dépit de l'éclaircie annoncée, qui permet à l'aviation d'intervenir de tout son poids, la force des courants à Utah Beach, sur la côte du Cotentin, fait dériver les embarcations sur une plage autre que celle qui avait été prévue, cependant que, aux deux ailes, autour de Sainte-Mère-Eglise et à l'embouchure de l'Orne, les vents violents déportent loin de leur destination nombre des parachutistes largués du ciel. A l'évidence, avec une machine de guerre aussi minutée et aux rouages aussi complexes, quelques heures de tempête et de mauvaise visibilité pouvaient tout compromettre. Autre source possible de catastrophe: le débarquement lui-même. La défense allemande ne serait-elle pas si meurtrière pour les assaillants en train de prendre pied sur la côte qu'ils seraient dans l'incapacité d'établir une tête de pont et devraient se cantonner en quelques points d'appui précaires d'où ils seraient vite délogés faute de soutien, puisque le gros de la flotte de débarquement, bloquée au large, ne pourrait mettre à terre les renforts prévus en hommes et en matériel ? C'est bien d'ailleurs ce qui a failli se produire sur l'une des deux zones américaines de débarquement, à Omaha Beach, entre Saint-Laurent-sur-Mer et Vierville, où, durant toute la matinée du 6 juin, les premières vagues d'assaut, rangers et fantassins mêlés, restent clouées sur la grève sous un feu d'enfer (l' " enfer d'Omaha " ), au point que le général Bradley, de son PC à bord du cuirassé Augusta, envisage d'ordonner l'arrêt de l'opération et le repli des premiers échelons débarqués. Enfin, même dans l'hypothèse d'un débarquement réussi, avec constitution d'une tête de pont de quelque profondeur, l'on pouvait redouter que le commandement allemand, mettant à profit sa supériorité terrestre et sa capacité de manoeuvre face à un adversaire enfermé dans un étroit périmètre, ne montât avec ses divisions blindées une puissante contre-attaque qui percerait la ligne de front des assaillants et rejetterait ceux-ci à la mer, en un second Dunkerque plus humiliant et plus tragique que le premier. Certes, le plan allié d'invasion a été élaboré de façon aussi approfondie, aussi complète, aussi minutieuse que possible. Rien n'y a été laissé au hasard, et l'on s'est efforcé de tout prévoir, jusqu'au moindre détail. De conférence stratégique en conférence stratégique, des études d'état-major aux préparatifs logistiques, de la mobilisation industrielle à l'entraînement des troupes sur le terrain, la préhistoire du débarquement s'étend sur deux années et demie, jalonnées de controverses serrées et d'âpres marchandages entre dirigeants britanniques et américains, civils ou militaires, sans parler de la pression insistante exercée par Staline pour l'ouverture d'un second front. Avant d'aboutir à l'unité de vues et d'action qui prévaut à peu près au printemps 1944, il aura fallu une trentaine de mois de négociations, de plans constamment révisés, de rassemblement du matériel, d'exercices et de répétitions sur terre, sur mer et dans les airs. C'est que s'affrontent là deux stratégies, deux conceptions de la bataille, deux philosophies de la guerre. Du côté des Américains, la doctrine régnante est celle de la guerre continentale et de la bataille frontale. Pour eux, il s'agit, selon l'enseignement de Clausewitz et de Napoléon, de concentrer ses forces contre l'ennemi principal et de le réduire à merci en s'assurant en même temps une forte supériorité en matériel. Par contre, ce qu'il faut éviter à tout prix, c'est de disperser ses ressources. De là, l'idée de débarquer un corps de bataille à travers la Manche afin d'infliger à l'Allemagne un coup fatal. D'ailleurs, pour un pays comme les Etats-Unis, n'est-il pas plus rapide et d'un moindre coût de constituer une grande armée terrestre que de mettre sur pied les forces amphibies qui seraient nécessaires à des opérations périphériques ? Comme le déclare Wedemeyer, le meilleur cerveau stratégique américain, la victoire sur l'Allemagne ne sera obtenue qu'en anéantissant ses forces terrestres et en brisant sa volonté de combat. S'il est vrai que l'aviation et la marine peuvent apporter pour cela une contribution importante, il reste que c'est seulement sur terre que l'on parviendra à " détruire l'ennemi dans sa citadelle ". Déduction logique : pour gagner la guerre, il faut une grande bataille sur le sol de l'Europe occidentale. A l'opposé de cette doctrine, les Britanniques se sont faits les champions de la guerre de harcèlement et d'usure. La première tâche, selon eux, c'est d'affaiblir l'ennemi en multipliant les actions périphériques, partout où sont ses points faibles. Stratégie de coups de bec, qui entend éviter de s'exposer prématurément à une rencontre avec les forces de la Wehrmacht, mais qui, au contraire, impose le combat à l'adversaire sur le terrain que l'on a soi-même choisi en dispersant ses moyens tout en réservant la confrontation pour l'ultime coup de boutoir. De là la préférence des Anglais pour une stratégie méditerranéenne dirigée d'abord contre l'Italie, maillon fragile de l'Axe. De là aussi leur tiédeur pour une attaque de la forteresse Europe à travers la Manche. C'est pourquoi, alors que les Américains avaient imaginé, au printemps 1942, d'effectuer un débarquement en France en avril 1943 avec trente divisions américaines et dix-huit divisions britanniques, soit un million et demi d'hommes transportés par sept mille péniches de débarquement (opération Round up), et même de lancer éventuellement, dès l'automne 1942, cinq divisions pour établir une tête de pont sur le continent européen afin de soulager l'armée rouge (opération Sledgehammer), les Anglais avaient manoeuvré habilement pour faire écarter ces projets et leur substituer un débarquement en Afrique du Nord (c'est l'opération Torch en novembre 1942), puis, après la conclusion victorieuse de la campagne de Tunisie, un débarquement en Sicile (opération Husky de juillet 1943), suivi de l'assaut donné à la péninsule italienne (débarquement de Calabre et de Salerne en septembre 1943). Mais au printemps 1943 s'est produit un tournant. L'obstruction britannique aux propositions américaines a dû cesser. Le plan d'un débarquement à l'Ouest est adopté aux conférences anglo-américaines de Washington (mai 1943) et de Québec (août 1943). Confirmé lors du sommet Roosevelt-Churchill-Staline à Téhéran (novembre 1943), il se concrétise avec la nomination d'Eisenhower, quelques jours plus tard, à la tête de l'opération Overlord (nouveau nom donné à Round up). Date prévue : le 1er mai 1944. Lieu prévu : la côte du Calvados. Dès lors, les préparatifs sont poussés activement et méthodiquement. L'heure de la bataille décisive approche. Dès 1943, le choix pour Overlord s'était porté sur la Normandie. Trois contraintes en effet devaient être prises en compte : la nécessité de débarquer sur des plages (l'échec sanglant du raid contre Dieppe en 1942 avait enseigné qu'il était vain de s'attaquer à des ports transformés en forteresses); l'obligation d'opérer sur des côtes situées dans la limite du rayon d'action de la chasse basée en Angleterre, c'est-à-dire des bouches de l'Escaut au Cotentin (ce qui excluait la Bretagne); le besoin de disposer assez rapidement d'un port en eau profonde (Cherbourg, en l'occurrence). Très vite, on avait éliminé l'hypothèse d'un débarquement sur le littoral du Pas-de-Calais. Solution tentante, à première vue, en raison de la brièveté de la traversée par mer et de la proximité des plaines donnant accès au coeur de l'Allemagne, en particulier à la Ruhr, un tel projet se heurtait à une objection majeure : la puissance des défenses allemandes entre Calais et Le Havre. En outre, les ports du Kent, à la différence de ceux de la côte sud de l'Angleterre, se prêtaient mal à de larges concentrations. En revanche, les plages normandes, moins fortifiées et relativement abritées des vents du large par le Cotentin, offraient, par leur configuration et leur étendue, les facilités nécessaires pour conduire le premier assaut et amener rapidement des renforts, tandis que l'arrière-pays (dont on n'avait pas assez étudié le paysage de bocage propice à la défense) occupait une position géographique favorable à une grande manoeuvre de percée et d'encerclement de l'ennemi. En vue de battre et de détruire les forces allemandes massées à l'ouest, soit cinquante-huit divisions, un premier plan est élaboré en 1943 par le général Morgan. Faire débarquer 50 000 hommes le premier jour Mais cette première version d'Overlord est jugée nettement insuffisante par Montgomery, nommé au début de 1944 à la tête du corps expéditionnaire. Profondément remanié, le plan définitif comporte un débarquement sur une largeur de 80 kilomètres (au lieu de 40) en cinq plages. Il porte à cinq divisions l'effectif des troupes chargées de donner l'assaut par mer, avec trente divisions à amener par la suite. Enfin, le plan étoffe considérablement, aux ailes, les forces aéroportées-parachutistes et planeurs-de façon à verrouiller les deux extrémités de la tête de pont en empêchant les contre-attaques de flanc. Au total, il s'agit de mettre à terre, le jour J, cinquante mille hommes, mille cinq cents chars, trois mille canons, deux mille cinq cents véhicules tout terrain et dix mille autres véhicules, l'ensemble devant être renforcé dans les quarante-huit heures de cinq autres divisions. Au bout de deux mois (J+60), la tête de pont doit avoir reçu deux millions d'hommes et 2millions de tonnes de matériel. A évaluer les chances des adversaires à la veille du jour J, on peut considérer que chacun d'eux dispose de trois atouts majeurs. Du côté allemand, le premier atout, c'est évidemment le mur de l'Atlantique. Côtes hérissées de blockhaus, de casemates, de canons et de nids de mitrailleuses, fossés antichars et chevaux de frise, mines et barbelés, marais et estuaires inondés (en Normandie, c'est le cas de la Dives, de la Vire, de la Taute), le tout constitue un formidable barrage contre les assaillants. En deuxième lieu, les dirigeants allemands comptent sur les armes secrètes. De fait, celles-ci sont prêtes à intervenir : " mines-huîtres ", ou mines à dépression, capables de jeter la perturbation sur les lignes de communication entre l'Angleterre et la tête de pont établie en France, et surtout bombes volantes, ou V1, destinées à dévaster Londres (les tirs commenceront effectivement le 12 juin : en deux semaines, deux mille V1 seront lancés sur l'Angleterre et sa capitale). Enfin les Allemands comptent sur leur supériorité terrestre : qualité du commandement, valeur de l'armement, capacité de manoeuvre, troupes entraînées et aguerries (alors que la plupart des soldats alliés affrontent le feu pour la première fois); plus encore, présence d'une puissante réserve de blindés, dix Panzerdivisionen stationnées en France et constituant une masse stratégique de première force. Comment s'étonner, dès lors, de l'assurance affichée par la plupart des chefs de la Wehrmacht, Rommel en tête, qui écrit à sa femme quelques jours avant le débarquement : " J'attends la bataille avec la plus grande confiance " ? Néanmoins, à ces atouts les Alliés opposent leurs propres atouts, également au nombre de trois. Mais ce sont des atouts maîtres. En premier lieu, la maîtrise de la mer. Le 6 juin 1944, la Manche appartient à la marine alliée (80 % de navires britanniques, 20 % de navires américains). Non seulement la grande menace des sous-marins allemands (U-Boote) n'est plus qu'un souvenir, mais deux barrages de navires de guerre verrouillent la Manche à chaque extrémité, afin de l'interdire à tout sous-marin qui aurait l'idée de s'y aventurer ! D'autre part, les Alliés accumulent celle de l'air avec la maîtrise de la mer. Aux sept mille cinq cents avions de la RAF et de l'USAAF qui opèrent le 6 juin, la Luftwaffe ne peut opposer que cent cinquante chasseurs en état de vol et autant de bombardiers sur tout le territoire de la France, de la Belgique et des Pays-Bas. Elle est, en fait, absente du ciel ce jour-là ainsi que les jours suivants, tandis que les bombardiers et les chasseurs-bombardiers anglais et américains attaquent sans relâche défenses côtières, concentrations de troupes et voies de communication, gênant par là considérablement l'arrivée des renforts. Enfin, le succès d'Overlord tient pour une large part à l'effet de surprise que les Alliés ont réussi à s'assurer jusqu'au bout. Grâce à une gigantesque opération d'intoxication (le plan Fortitude), ils sont parvenus à faire croire à leurs adversaires que l'invasion se produirait au nord de la Seine, où étaient massées les meilleures troupes du Reich. Même après le débarquement de Normandie, les Allemands sont restés persuadés que ce n'était là qu'une opération de diversion, un préalable au véritable débarquement, qui interviendrait là où ils l'avaient toujours escompté, c'est-à-dire de part et d'autre de l'estuaire de la Somme. D'où les incertitudes, les hésitations et la confusion qui marquent le 6 juin l'action de la Wehrmacht sur le terrain et qui viennent s'ajouter aux divergences, aux retards et aux carences enregistrés du côté de Hitler et du haut commandement au cours de cette journée décisive. Le résultat, c'est que non seulement le deuxième front tant attendu est maintenant ouvert, mais que, pour la première fois depuis 1939, on peut entrevoir la fin de la guerre par la capitulation de l'Allemagne. La deuxième bataille de France commence. FRANCOIS BEDARIDA Le Monde du 5-6 juin 1984

« industrielle à l'entraînement des troupes sur le terrain, la préhistoire du débarquement s'étend sur deux années et demie, jalonnéesde controverses serrées et d'âpres marchandages entre dirigeants britanniques et américains, civils ou militaires, sans parler de lapression insistante exercée par Staline pour l'ouverture d'un second front. Avant d'aboutir à l'unité de vues et d'action qui prévaut à peu près au printemps 1944, il aura fallu une trentaine de mois denégociations, de plans constamment révisés, de rassemblement du matériel, d'exercices et de répétitions sur terre, sur mer et dansles airs. C'est que s'affrontent là deux stratégies, deux conceptions de la bataille, deux philosophies de la guerre.

Du côté desAméricains, la doctrine régnante est celle de la guerre continentale et de la bataille frontale. Pour eux, il s'agit, selon l'enseignement de Clausewitz et de Napoléon, de concentrer ses forces contre l'ennemi principal et dele réduire à merci en s'assurant en même temps une forte supériorité en matériel.

Par contre, ce qu'il faut éviter à tout prix, c'estde disperser ses ressources.

De là, l'idée de débarquer un corps de bataille à travers la Manche afin d'infliger à l'Allemagne uncoup fatal.

D'ailleurs, pour un pays comme les Etats-Unis, n'est-il pas plus rapide et d'un moindre coût de constituer une grandearmée terrestre que de mettre sur pied les forces amphibies qui seraient nécessaires à des opérations périphériques ? Comme le déclare Wedemeyer, le meilleur cerveau stratégique américain, la victoire sur l'Allemagne ne sera obtenue qu'enanéantissant ses forces terrestres et en brisant sa volonté de combat.

S'il est vrai que l'aviation et la marine peuvent apporter pourcela une contribution importante, il reste que c'est seulement sur terre que l'on parviendra à " détruire l'ennemi dans sa citadelle ".Déduction logique : pour gagner la guerre, il faut une grande bataille sur le sol de l'Europe occidentale. A l'opposé de cette doctrine, les Britanniques se sont faits les champions de la guerre de harcèlement et d'usure.

La premièretâche, selon eux, c'est d'affaiblir l'ennemi en multipliant les actions périphériques, partout où sont ses points faibles.

Stratégie decoups de bec, qui entend éviter de s'exposer prématurément à une rencontre avec les forces de la Wehrmacht, mais qui, aucontraire, impose le combat à l'adversaire sur le terrain que l'on a soi-même choisi en dispersant ses moyens tout en réservant laconfrontation pour l'ultime coup de boutoir. De là la préférence des Anglais pour une stratégie méditerranéenne dirigée d'abord contre l'Italie, maillon fragile de l'Axe.

De làaussi leur tiédeur pour une attaque de la forteresse Europe à travers la Manche. C'est pourquoi, alors que les Américains avaient imaginé, au printemps 1942, d'effectuer un débarquement en France en avril1943 avec trente divisions américaines et dix-huit divisions britanniques, soit un million et demi d'hommes transportés par septmille péniches de débarquement (opération Round up), et même de lancer éventuellement, dès l'automne 1942, cinq divisionspour établir une tête de pont sur le continent européen afin de soulager l'armée rouge (opération Sledgehammer), les Anglaisavaient manoeuvré habilement pour faire écarter ces projets et leur substituer un débarquement en Afrique du Nord (c'estl'opération Torch en novembre 1942), puis, après la conclusion victorieuse de la campagne de Tunisie, un débarquement enSicile (opération Husky de juillet 1943), suivi de l'assaut donné à la péninsule italienne (débarquement de Calabre et de Salerneen septembre 1943). Mais au printemps 1943 s'est produit un tournant.

L'obstruction britannique aux propositions américaines a dû cesser.

Le pland'un débarquement à l'Ouest est adopté aux conférences anglo-américaines de Washington (mai 1943) et de Québec (août1943).

Confirmé lors du sommet Roosevelt-Churchill-Staline à Téhéran (novembre 1943), il se concrétise avec la nominationd'Eisenhower, quelques jours plus tard, à la tête de l'opération Overlord (nouveau nom donné à Round up).

Date prévue : le 1 er mai 1944.

Lieu prévu : la côte du Calvados.

Dès lors, les préparatifs sont poussés activement et méthodiquement.

L'heure de labataille décisive approche. Dès 1943, le choix pour Overlord s'était porté sur la Normandie.

Trois contraintes en effet devaient être prises en compte : lanécessité de débarquer sur des plages (l'échec sanglant du raid contre Dieppe en 1942 avait enseigné qu'il était vain de s'attaquerà des ports transformés en forteresses); l'obligation d'opérer sur des côtes situées dans la limite du rayon d'action de la chassebasée en Angleterre, c'est-à-dire des bouches de l'Escaut au Cotentin (ce qui excluait la Bretagne); le besoin de disposer assezrapidement d'un port en eau profonde (Cherbourg, en l'occurrence). Très vite, on avait éliminé l'hypothèse d'un débarquement sur le littoral du Pas-de-Calais.

Solution tentante, à première vue, enraison de la brièveté de la traversée par mer et de la proximité des plaines donnant accès au coeur de l'Allemagne, en particulier àla Ruhr, un tel projet se heurtait à une objection majeure : la puissance des défenses allemandes entre Calais et Le Havre.

Enoutre, les ports du Kent, à la différence de ceux de la côte sud de l'Angleterre, se prêtaient mal à de larges concentrations.

Enrevanche, les plages normandes, moins fortifiées et relativement abritées des vents du large par le Cotentin, offraient, par leur. »

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