Jacques Fauvet, l'homme qui a ouvert "Le Monde" sur la société
Publié le 17/01/2022
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France pendant la période où celui-ci a pu gouverner sans trop d'entraves et, lors de ses diverses candidatures, FrançoisMitterrand, non sans recul critique.
Historien du Parti communiste, dont il n'est proche en aucune façon, il a gardé de ses méditations derrière les barbelés le rêved'une société qui rejetterait à la fois le totalitarisme et les excès du libéralisme, et il appelle de ses voeux une voie nouvelle,favorable à l'épanouissement des hommes et des peuples.
C'est sans doute pour cette raison qu'il observe sans hostilité, et mêmeavec un certain espoir, les débuts de la révolte étudiante de 1968.
Attaché au droit d'expression des minorités, il donne la parole à celles qui s'expriment alors avant qu'elles ne sombrent dans laconfusion intellectuelle et la destruction systématique.
Il défend en même temps, pendant l'absence de Hubert Beuve-Méry,l'indépendance du journal vis-à-vis des pressions qui s'exercent de plusieurs côtés pour le contrôler ou le censurer.
Son horreur de toute contrainte injustifiée le conduit aussi à dénoncer les répressions quelles qu'elles soient.
Ce grand notablecondamne avec rigueur les désordres commis au nom de l'ordre.
En 1969, au Palais des congrès de Versailles, lorsque, déjà cogérant depuis mars 1968, il succède à Hubert Beuve-Méry à ladirection, il ne cherche pas à marquer sa différence, bien au contraire.
Il sait trop que le prestige et l'autorité du Monde, le journalles doit à son fondateur.
Il entend continuer dans la voie que celui-ci a tracée.
Sur les bases intellectuelles et morales que Sirius abâties, il poursuit le développement du journal.
La rédaction est confiée à Bernard Lauzanne et, sur le plan éditorial, à André Fontaine.
Le directeur n'oublie pas, cependant,qu'il a été rédacteur en chef.
Malgré les nouvelles charges qui lui incombent, il lui arrive d'avouer qu'il s'ennuie parfois malgré lestensions entre un quotidien qui marque peu d'inclination pour la droite et les premiers occupants de l'Elysée.
Le Monde, au moins sur le papier, a quitté le stade artisanal pour le stade industriel.
En réalité, la "culture" de l'entreprise estrestée la même.
Ses querelles internes ont la virulence sentimentale des disputes familiales, et son mode de gestion reste celuid'une prospérité qui gomme les erreurs.
Jacques Fauvet, qui n'en est, dans la pratique, pas responsable, le ressentira durementlorsque le temps de la facilité sera passé.
Il s'efforce de préparer sa succession.
Vainement.
Il n'est pas "le père" comme l'était Hubert Beuve-Méry, il est le frère aîné.C'est à la société des rédacteurs, principal associé de la SARL, qu'il revient, dans un contexte industriel et financier dégradé, dedésigner un successeur à celui qui incarne depuis quarante ans le journalisme tel que le conçoit le Monde.
Après une de ces crisesà rebondissement qui, apparemment, sont la preuve de la vitalité du quotidien, Jacques Fauvet intronise, en 1982, dans le foyerde l'Opéra, son successeur rue des Italiens : André Laurens, venu comme lui du service politique.
S'arracher à un métier devenu pour lui une seconde nature ? Impossible.
Jacques Fauvet collabore au Provençal, à RadioMonte-Carlo, il préside le concours extérieur de l'ENA en 1983.
Le 14 juin 1984, il devient président de la Commissionnationale de l'informatique et des libertés (CNIL).
Ainsi se trouve-t-il placé dans le droit-fil d'une préoccupation permanente del'ancien prisonnier de 1940-1945 : combattre les atteintes à la liberté.
Le Monde n'avait pas disparu des préoccupations de son ancien directeur, devenu un des porteurs de parts de la SARL,propriétaire du quotidien.
Après les remous des années 1980, il avait retrouvé la place à laquelle il avait droit dans la sagamouvementée de la maison : celle de l'homme qui, fait par le journal, l'a conduit de l'estime au succès.
JEAN PLANCHAIS Le Monde du 4 juin 2002.
CD-ROM L'Histoire au jour le jour © 2002, coédition Le Monde, Emme et IDM - Tous droits réservés.
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