I. TANT QUE LA TERRE DURERA II. LE SAC ET LA CENDRE III. ÉTRANGERS SUR LA TERRE d'HENRI TROYAT

Fleuve de vie large et puissant, cette fresque se déploie sur trois volets. Le premier annonce, de l'Arménie à Moscou, des dernières années du 19e siècle à l'aube de la guerre de 1914, de conflits (russo - japonais) en révoltes (celle de 1905 notamment), les grands bouleversements attendus, craints ou rêvés, dans l'intimité de familles — les Arapoff et les Danoff — qui continuent de s'allier, de se séparer, de vivre telles « semailles et moissons, saisons, jour et nuit, aussi longtemps que la terre durera «, comme éternelles... La seconde partie voit l'entrée en scène d'un personnage complexe et ténébreux, dostoïevskien, Kisiakoff, et débute en novembre 1914. Les trois coups du destin seront bientôt frappés. Les protagonistes (Michel Danoff, Tania Arapoff, Volodia Bourine) s'entredéchirent encore, mais déjà leurs querelles personnelles vont s'abîmant dans le gouffre, ouvert devant eux, de la Révolution. Alors retentissent les paroles de Job : « J'ai cousu un sac sur ma peau et j'ai couvert ma chair de cendre «... Le troisième volet disperse, aux quatre vents de la défaite, les survivants qui se rejoindront à Paris, obstinément fidèles au régime englouti, lourds encore de souvenirs, promis bientôt aux regrets et à la misère : « Et ils étaient alors très peu nombreux et étrangers sur la terre...«, avait prédit le Psaume.

La lecture de cet ensemble où le détail humain — jailli des souvenirs personnels ou familiaux de l'auteur — anime constamment l'évocation historique, est étonnante de variété, de pittoresque et de vie.