Drôle de guerre au Cachemire
Publié le 17/01/2022
Extrait du document
«
les camps de la zone pakistanaise, bien décidés à en découdre avec l' « impérialisme » indien.
Un des premiers faits d'armes des séparatistes sera le kidnapping de Rubaiya Sayeed, fille du ministre de l'intérieur, le 8décembre 1989.
Yasin Malik est l'un des principaux négociateurs du JKLF.
Après cinq jours de marchandage avec les autoritésindiennes, la jeune femme est relâchée, saine et sauve, en échange de la libération de cinq détenus séparatistes.
Yasin Malik lui-même a passé, au total, dix années de sa vie en prison.
Quand il en sort, en 1994, il souffre de gravesproblèmes cardiaques.
Et il voit les choses autrement : il fait savoir publiquement qu'il abandonne la lutte armée.
« L'islam est lemême partout.
Mais ici, au Cachemire, nous avons en plus le soufisme, explique-t-il.
C'est une tradition ancienne, profondémentancrée.
Le soufisme nous apprend l'amour, la dignité, le respect des êtres humains, sans distinction de race, de sexe ou dereligion.
» L'indépendance pourrait-elle donc être arrachée par des voies pacifiques ? Le jeune homme pousse un long soupir.Ses yeux errent un moment sur les journaux, qui ne parlent, en ces premiers jours de janvier, que du bruit de la guerre et destensions entre l'Inde et le Pakistan.
A Srinagar, un attentat, le 1er octobre 2001, revendiqué par le Jaish-i-Mohammad, a fait quarante morts et près de soixanteblessés.
Un mois et demi plus tard, à New Delhi, un nouvel attentat faisait treize morts dans l'enceinte du Parlement et provoquaitla fureur du gouvernement indien, prompt à voir dans ces crimes la main du Pakistan.
Le Cachemire, dans l'affaire, fait figure dedécor - à la fois central et occulté.
« L'indépendance viendra, c'est tout ce que je sais », murmure Yasin Malik.
« Ce n'est pasavec l'armée et les moudjahidins qu'on va régler le problème », s'énerve ce vieil habitant de Srinagar, donné comme un finconnaisseur du soufisme.
« Nos valeurs ont été balayées par les armes : les jeunes ont préféré prendre le fusil et passer lafrontière », peste-t-il.
« Pourtant, le soufisme est au-delà des religions, il impose le respect de la vie », plaide le vieil homme.
«Obéir à l'islam, cela peut permettre d'éviter d'aller en enfer.
Mais ça ne suffit pas forcément pour atteindre Dieu ! », renchéritNazir A.
Kamali, un vieillard, lui aussi, qui dirige la prière des fidèles soufis lors de la cérémonie annuelle du 6 janvier.
Les hommes jeunes, on en voit peu dans la vallée.
Il y en a, bien sûr, mais moins nombreux qu'ailleurs.
« Un des aspects parmiles plus importants dans l'évolution de la pratique des mariages, dans la vallée du Cachemire, est directement lié aux douzedernières années de conflit », confirme le sociologue Bashir Ahmad Dabla, professeur à l'université de Srinagar, en évoquant le «manque de garçons à marier ».
Nombre de jeunes hommes âgés de dix-huit à trente-deux ans « sont morts ou ont été blessés »,à moins qu'ils n'aient « rejoint les groupes de militants et, par conséquent, une vie de clandestinité » , précise le professeur Dabla.Cette situation, « comparable à ce que l'Europe a connu au lendemain de la première et de la seconde guerre mondiale », placeles filles et les jeunes femmes dans une position que le conservatisme de la société et les brutalités de l'armée indienne rendent «extrêmement difficile à vivre ».
La proportion de veuves et d'orphelins a également augmenté « de façon alarmante », indiquel'universitaire, auteur de plusieurs ouvrages sur la place des femmes et les problèmes de genre dans la vallée du Cachemire.
Que la guerre éclate ou pas entre l'Inde et le Pakistan, le conflit du Cachemire demeure une plaie vive.
Selon l'avocat PervezImroz, « entre dix et quinze personnes » sont tuées chaque jour dans la province du Jammu-et-Cachemire, victimes desaffrontements - avec leurs cycles de représailles - entre les « militants » séparatistes et les forces de sécurité.
Ces dernières ontfait de la torture des prisonniers « une pratique routinière » , affirme Me Imroz, militant des droits de l'homme, dont la lettremensuelle ( [email protected] ) dresse un tableau peu reluisant de la démocratie indienne appliquée au Cachemire.
LE comportement de certains « moudjahidins », que Me Im-roz n'hésite pas à qualifier de « fascistes », et l'impasse politique oùces douze années de conflit ont mené n'augurent pas d'un avenir meilleur.
« Les gens sont fatigués des violences.
Que l'Inde nouslaisse tranquilles ! », s'exclame un vendeur de safran, en montrant sa main droite mutilée : deux doigts ont été arrachés par uneballe perdue, tirée par un soldat indien.
« Et que le Pakistan s'occupe de ses affaires, ajoute-t-il.
Dans le passé, le Cachemire étaitun royaume, nous avions notre maharadjah.
Pourquoi n'avons-nous pas droit à la liberté ? »
Dans la vieille ville de Srinagar, où se dressent çà et là, au hasard des ruelles, les maisons incendiées des familles de Cachemirishindous, les marchands des célèbres châles traditionnels brodés sont au chômage forcé.
Comme les propriétaires des fameuxhouseboats, ces bateaux en bois sculpté, amarrés au bord du lac, que plus un seul touriste ne visite.
« Aujourd'hui, 100 % denotre production est exportée, aux Etats-Unis surtout, le reste en Europe », explique Gulam Rasool, gérant de Paradise Crafts,l'un des derniers centres d'exposition commerciale de tapis et objets d'artisanat.
« Il n'y a plus que nos clients qui viennent ici, deNew Delhi, pour choisir la marchandise.
Les touristes se sont envolés ».
A Srinagar, certains vieux habitants de la vallée se souviennent de la légende qui voulait qu'un affreux démon, vivant au fond dulac et semant la terreur dans toute la contrée, ait été terrassé, un jour, par la déesse Parvati - celle-ci l'ayant écrasé sous unemontagne.
Mais les déesses sont loin.
Et les démons de la guerre s'amusent, quadrillant les rizières et patrouillant dans lesmontagnes, sans que personne sache quand finira le jeu..
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