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domaine royal

Publié le 07/02/2013

Extrait du document

1   PRÉSENTATION

domaine royal, ensemble des propriétés dont les revenus ont appartenu directement au roi de France.

2   DÉFINITION ET STATUT

Le domaine royal se compose du domaine corporel — c’est-à-dire de territoires dont le roi, propriétaire éminent, est en même temps le seigneur direct — et du domaine incorporel, correspondant à l’ensemble des droits financiers liés à la fonction régalienne, comme les droits de justice, de franc-fief et de déshérence. Le grand domaine, constitué des principales seigneuries, est complété par le petit domaine, où coexistent des possessions éparses, du moulin au péage, en passant par des landes. Ce dernier, plus coûteux que rentable, est aliéné pour 400 000 livres de rentes sur décision de Colbert en 1672.

Par ailleurs, le domaine immuable, au produit fixe (rentes et cens, par exemple) et qui correspond aux territoires dont le souverain hérite à son avènement, est distingué du domaine muable ou casuel, issu des alliances et conquêtes récentes, lequel reste temporairement aliénable selon l’ordonnance de Moulins de 1566. En fait, du Xe au XVIIIe siècle perdurent ce principe de l’inaliénabilité du domaine royal et son corollaire, le mythe du « dégagement « (repris en particulier par Sully et Richelieu), c’est-à-dire de la réunification du domaine.

3   LES CAUSES DU LENT ACCROISSEMENT DU DOMAINE ROYAL

Malgré le principe de l’inaliénabilité, le domaine royal corporel est souvent amputé par les donations et les aliénations.

Les donations constituent l’une des manifestations de la générosité royale. En 990, Hugues Capet offre ainsi Dreux au comte de Chartres ; de même, en 1515, François Ier donne les comtés de Maine et de Beaufort à sa mère, Louise de Savoie.

Les aliénations, quant à elles, sont de plusieurs types.

Elles peuvent être simplement la résultante d’un traité de paix défavorable au souverain vaincu, lequel se voit dans l’obligation de céder des territoires.

Lorsque l’aliénation est dite temporaire, le roi conserve théoriquement un droit à venir sur la terre. Cette pratique est autorisée « en cas de guerre «, dès le XIIe siècle, et permet au roi d’obtenir rapidement de l’argent en concédant l’usufruit d’une seigneurie à un particulier. Cette aliénation devient, selon l’historien des institutions Doucet, un « procédé normal d’administration « à partir du règne d’Henri II.

Enfin, la constitution d’apanages est la troisième forme d’aliénation du domaine royal. Le roi peut céder des provinces entières, ce qu’il fait le plus souvent pour ses fils cadets. Permettant d’éviter les rivalités fraternelles entre l’héritier du domaine royal et ses cadets, ces apanages assurent à la famille royale un contrôle direct sur de vastes étendues du domaine. Parmi les apanages, on peut citer l’Anjou, l’Artois, le Bourbonnais et la Bourgogne. Dans le cas de cette dernière, à partir de la fin du XIVe siècle, l’apanage se transforme en une véritable principauté indépendante dont les princes (comme Philippe le Hardi et Charles le Téméraire) se dressent contre le roi en personne.

4   L'ÉVOLUTION DU DOMAINE ROYAL CORPOREL

De Hugues Capet à la Révolution, on peut distinguer trois grandes vagues d’accroissement du domaine royal.

De 987 à 1328, l’extension du petit domaine initial — globalement, de la vallée de l’Oise à l’Orléanais, plus quelques fiefs ecclésiastiques dont Reims — est continue. Deux règnes sont importants à cet égard : celui de Philippe Auguste qui intègre, entre autres, l’Auvergne, mais aussi la Normandie, la Touraine et le Poitou par commise (confiscation) des fiefs de Jean sans Terre ; et celui de Louis IX, au cours duquel le domaine royal s’étend largement sur les fiefs méridionaux — le diocèse de Toulouse, par exemple — et prépare l’incorporation du comté de Champagne réalisée sous Philippe le Bel.

De 1328 à 1483, malgré les aléas de la guerre de Cent Ans, l’accroissement du domaine se poursuit de façon systématique : la récupération des provinces dont le roi anglais a pris possession, puis la réintégration de l’apanage bourguignon, deviennent les enjeux territoriaux majeurs des rois de France, de Philippe VI de Valois à Louis XI. Le refus de l’occupation anglaise, symbolisé par la chevauchée de Jeanne d’Arc, permet une assimilation du royaume et du domaine royal pendant le conflit franco-anglais. Louis XI poursuit cette logique en condamnant Jean V d’Armagnac pour trahison et en intégrant alors les possessions de celui-ci au domaine. De même, les territoires du duc de Bourgogne, Charles le Téméraire, sont réintégrés au domaine après la mort de celui-ci en 1477 ; ceux de René d’Anjou reviennent à la couronne lorsqu’il meurt en 1480.

À partir de 1483, sous les Valois d’Angoulême et les Bourbons, la Bretagne, la Franche-Comté, l’Alsace, la Lorraine et la Corse sont réunies au domaine royal. Cette dernière phase de construction du domaine royal s’achève avec la Révolution française, lorsque la Constitution de 1791 déclare « domaine national « l’ancien domaine royal.

5   LE DOMAINE ROYAL, RESSOURCE DE LA ROYAUTÉ

Dès le XVIe siècle, le domaine — toutes définitions confondues — cesse de représenter une part prépondérante dans les revenus royaux. En 1523, les recettes du domaine ne constituent que 400 000 livres sur les 5 millions de livres perçues au total par le roi, soit 8 p. 100 ; en 1597, dévaluation et accroissements aidant, elles ne représentent plus que 1,5 p. 100 (450 000 livres sur 30 millions). Ayant bénéficié des réformes mercantilistes de Colbert et de Vauban, les domaines fournissent, en 1788, 50 millions de livres à la couronne, soit 10 p. 100 des revenus du royaume : on reste néanmoins loin de l’adage selon lequel le roi doit « vivre du sien «.

À la fois parce que le domaine corporel se confond progressivement avec le territoire national et parce que les dépenses du royaume excèdent largement les capacités des revenus traditionnels qui en sont tirés, l’existence même de ce reliquat féodal est combattue au XVIIIe siècle par les physiocrates — voire par certains ministres. C’est la Révolution française qui fait disparaître, avec le domaine royal, toute la symbolique féodale attachée à la monarchie française.

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