De quelles ressources spécifiques dispose le théâtre pour représenter les conflits, les débats, les affrontements qui peuvent exister dans les rapports humains ?
Publié le 20/07/2010
Extrait du document
Le théâtre est un genre littéraire ancien connu depuis l’antiquité. Il a progressivement évolué jusqu’à l’heure actuelle, s’affranchissant des unités de temps, de lieu et d’action, ainsi que des règles de bienséance. Mais pour amuser ou au contraire effrayer ses spectateurs, le théâtre a toujours mis en scène des conflits divers. Contrairement au roman, l’histoire qu’il raconte est écrite dans le but d’être ensuite mise en scène. Le texte écrit comporte donc plus ou moins d’indications scéniques relatives au jeu des acteurs, et on peut alors se demander de quelles ressources spécifiques possède le théâtre pour représenter les débats, conflits et affrontements entre les personnages dans le texte prononcé par les acteurs ainsi que dans la mise en scène. Tout d’abord, dans le texte écrit, destiné à être dit par les acteurs, le dramaturge dispose de plusieurs ressources spécifiques au théâtre pour représenter les conflits. Les paroles sont toutes au discours direct, ce qui est spécifique du théâtre. Les répliques des personnages lors d'un conflit renferment un vocabulaire parfois violent comme dans la scène 5 de l'acte IV de Horace, de Corneille, lorsque Horace et sa sœur Camille s'affrontent. Ce passage est connu pour la brutalité des paroles de Camille. Celle-ci est folle de tristesse car Horace vient de tuer Curiace, son amant, et qualifie son frère de « barbare « et de « tigre altéré de sang «. D’autres conflits peuvent aussi être destinés à faire sourire le lecteur, grâce à des procédés comme l’ironie que l’ont retrouve dans Le mariage de Figaro, de Beaumarchais. Le procès de la scène 15 de l'acte III où Figaro s'oppose à Bartholo est tourné est dérision car le procès se déroule pour savoir si, dans le contrat entre Marceline et Figaro, il est écrit « et « ou bien « ou «. De plus, le théâtre n'ayant pas pour but un réalisme absolu, le dramaturge peut aussi choisir de créer des personnages simplifiés, aux défauts accentués qui donneront plus facilement naissance à des affrontements comique. Par exemple, dans L'avare de Molière, Harpagon est un personnage rongé par l'avarice, qui donne suite à de nombreuses querelles. Il a caché une cassette remplie d'or mais craint que quelqu'un ne lui vole sa fortune. C'est ainsi que dans la scène 3 de l'acte I, il a tellement peur que l'on découvre son secret qu'il accuse La Flèche, valet de son fils Cléante, de lui avoir dérobé son or. Au contraire, les personnages plus complexes et au caractère versatile peuvent également donner naissance à des conflits plus tragiques. Dans Andromaque de Racine, le personnage d'Hermione ordonne à Oreste, un jeune homme épris d'elle, d'aller tuer Pyrrhus. Toutefois, dans la scène 3 de l'acte V, lorsque Oreste vient annoncer à Hermione qu'il a rempli sa mission, elle est désespérée et se met à l'insulter en lui reprochant cet assassinat qu'elle lui avait pourtant elle-même ordonné. Les didascalies sont également propres au théâtre, et donnent des indications au metteur en scène sur le ton et les gestes des personnages, permettant ainsi une meilleure compréhension de la scène. On peut alors plus facilement se représenter le registre de la scène. Dans l’acte I des Justes de Camus, les didascalies qui illustrent l’affrontement entre Kaliayev et Stepan montrent une évolution des sentiments qu’éprouve Kaliayev, avec des didascalies successives comme « se dominant «, « avec un effort visible «, « éclatant « et enfin « violemment «. Au contraire, dans d’autres pièces comme L’île aux esclaves de Marivaux, le ton du conflit est beaucoup plus léger. Des didascalies telles que « siffle «, « riant « et « il chante « qui qualifient l’humeur de l’esclave Arlequin montrent l’ironie de la situation puisque Iphicrate, l’ancien maître d’Arlequin, va à son tour devenir esclave. De plus, dans Les fourberies de Scapin de Molière, les didascalies montrent souvent l'intonation de la voix et la gestuelle des personnages lors d'un conflit tourné de manière comique. Par exemple dans la scène 2 de l'acte III, Scapin dit à Géronte, le père de son maître Léandre, de se cacher dans un sac pour échapper aux hommes qui le recherchent. Les didascalies indiquent alors que Scapin parle « en contrefaisant sa voix « pour se faire passer pour quelqu'un d'autre et « il donne plusieurs coups de bâton sur le sac «. Les didascalies contribuent donc à aider le lecteur à comprendre la pièce, et indiquent ensuite au metteur en scène et aux acteurs comment réaliser la représentation théâtrale de ces conflits. Ensuite, lors de la représentation théâtrale, d’autres moyens peuvent être utilisés pour mettre en scène les affrontements entre personnages. Premièrement en ce qui concerne le jeu des acteurs, différents déplacements et gestes peuvent illustrer la colère des personnages. C’est le cas dans de nombreuses pièces de théâtre, comme dans Cyrano de Bergerac d'Edmond Rostand. En effet, dans la mise en scène de Marianne Serra et Philippe Canales, pendant la tirade où Cyrano parle de son nez, il empêche Le Vicomte de passer à plusieurs reprises et le retient par le bras. Les metteurs en scène peuvent également jouer sur des différences de voix et de physique des acteurs. On retrouve ces oppositions dans la mise en scène par Jacques Nichet de la pièce de Koltès : Le retour au désert. En effet, le metteur en scène a choisi, pour les deux personnages sur le conflit desquels repose la pièce, des acteurs au physique opposé. C’est pour cela que le rôle de Mathilde a été attribué à Myriam Boyer, petite femme plutôt rondelette alors que son frère Adrien est joué par François Chattot, un homme de grande taille. Les voix de ces deux acteurs s’opposent également dans cette même pièce, Myriam Boyer parlant avec une voix très aiguë, par rapport à François Chattot dont la voix est grave et forte. On peut aussi baser le contraste sur la différence du ton employé : l’un pouvant être ironique et l’autre véritablement en colère, ou encore un personnage affirmant quelque chose et l’autre ne le prenant pas au sérieux, comme dans les mains sales de Sartre, où Hugo tente de tuer son patron Hoederer, et celui-ci lui répliquant qu’il n’en est pas capable. Les metteurs en scènes peuvent aussi jouer sur les décors et les costumes pour accentuer les divergences d’opinion entre les personnages. Par exemple dans la mise en scène de Louis Jouvet de La guerre de Troie n’aura pas lieu, en 1935 au théâtre de l’Athénée, le décor est constitué de la terrasse d’un rempart dominé par une autre terrasse et dominant d’autres remparts. On peut y voir ici le symbole du conflit qui oppose Troie et les Grecs représentés par Hector et Ulysse. Il est également possible, à partir d’un décor minimaliste, de mettre en relief les conflits de la même façon. Dans la mise en scène de la pièce On ne badine pas avec l’amour de Musset par Gérard Gelas, l’unique élément de décor est un escalier en forme de pont. Cet escalier permet d’accentuer les conflits qui existent tout au long de la pièce entre Camille et son cousin Perdican, l’un se trouvant sur l’escalier et l’autre se trouvant sur le sol de la scène. Dans cette même pièce, comme on le retrouve souvent au théâtre, l’opposition entre les personnages est aussi marquée par des différences de couleur dans les costumes. Ainsi Perdican, amoureux de Camille, est en blanc, et Camille qui le rejette est en noir. Enfin, les accessoires des personnages peuvent aussi être un moyen de marquer les contrastes entre les personnages. On le remarque particulièrement dans la mise en scène par G. Gelas de la pièce Le retour au désert, car lorsque Mathilde arrive chez Adrien, une dispute éclate. Celle-ci pose son parapluie ouvert sur le sol, puis, tout en continuant leur dispute, Adrien referme le parapluie. Mathilde à ton tour l’ouvre à nouveau et Adrien le referme, sans cesser leur discussion. De cette façon, le metteur en scène accentue encore la rivalité entre les personnages qui s’exprime déjà par leurs paroles. Enfin, le public peut aussi participer au conflit au théâtre. Il est le juge présent à la représentation théâtrale et peut manifester son approbation ou au contraire son mécontentement vis à vis de la pièce qu'il est venu voir. La pièce 1789 d'Ariane Mnouchkine, jouée par la troupe du théâtre du Soleil, traite de la Révolution de 1789. Elle met en scène les luttes entre les différents hommes politiques de l'époque, et en particulier Marat et Danton. Lors de leurs discours, les spectateurs qui représentent le peuple sont invités à participer à la pièce en même temps que les acteurs répartis parmi eux. Ils applaudissent ou sifflent à leur gré les deux orateurs, soulignant l’opposition radicale de leurs positions politiques. Le théâtre dispose donc de nombreuses ressources spécifiques pour mettre en scène les conflits entre les personnages. Le texte écrit donne une partie des indications scéniques nécessaires aux acteurs et au metteur en scène pour rester fidèle à la pièce écrite. Cependant, c’est au metteur en scène d’imaginer les autres éléments qui pourraient accentuer le conflit grâce aux décors et aux costumes ainsi qu’au jeu qu’il demande à ses acteurs. Le théâtre est un spectacle vivant, auquel le spectateur assiste « en direct « et vis à vis duquel il exprime son approbation ou son mécontentement. De nos jours, le théâtre est, malgré tout, concurrencé par le cinéma, qui offre plus de possibilités techniques pour représenter les conflits. Toutefois, le théâtre a sur le cinéma l’avantage d’être un spectacle vivant.
«
Sartre, où Hugo tente de tuer son patron Hoederer, et celui-ci lui répliquant qu'il n'en est pas capable.Les metteurs en scènes peuvent aussi jouer sur les décors et les costumes pour accentuer les divergences d'opinion entre lespersonnages.
Par exemple dans la mise en scène de Louis Jouvet de La guerre de Troie n'aura pas lieu, en 1935 au théâtre del'Athénée, le décor est constitué de la terrasse d'un rempart dominé par une autre terrasse et dominant d'autres remparts.
On peuty voir ici le symbole du conflit qui oppose Troie et les Grecs représentés par Hector et Ulysse.
Il est également possible, à partird'un décor minimaliste, de mettre en relief les conflits de la même façon.
Dans la mise en scène de la pièce On ne badine pas avecl'amour de Musset par Gérard Gelas, l'unique élément de décor est un escalier en forme de pont.
Cet escalier permet d'accentuerles conflits qui existent tout au long de la pièce entre Camille et son cousin Perdican, l'un se trouvant sur l'escalier et l'autre setrouvant sur le sol de la scène.Dans cette même pièce, comme on le retrouve souvent au théâtre, l'opposition entre les personnages est aussi marquée par desdifférences de couleur dans les costumes.
Ainsi Perdican, amoureux de Camille, est en blanc, et Camille qui le rejette est en noir.Enfin, les accessoires des personnages peuvent aussi être un moyen de marquer les contrastes entre les personnages.
On leremarque particulièrement dans la mise en scène par G.
Gelas de la pièce Le retour au désert, car lorsque Mathilde arrive chezAdrien, une dispute éclate.
Celle-ci pose son parapluie ouvert sur le sol, puis, tout en continuant leur dispute, Adrien referme leparapluie.
Mathilde à ton tour l'ouvre à nouveau et Adrien le referme, sans cesser leur discussion.
De cette façon, le metteur enscène accentue encore la rivalité entre les personnages qui s'exprime déjà par leurs paroles.Enfin, le public peut aussi participer au conflit au théâtre.
Il est le juge présent à la représentation théâtrale et peut manifester sonapprobation ou au contraire son mécontentement vis à vis de la pièce qu'il est venu voir.
La pièce 1789 d'Ariane Mnouchkine,jouée par la troupe du théâtre du Soleil, traite de la Révolution de 1789.
Elle met en scène les luttes entre les différents hommespolitiques de l'époque, et en particulier Marat et Danton.
Lors de leurs discours, les spectateurs qui représentent le peuple sontinvités à participer à la pièce en même temps que les acteurs répartis parmi eux.
Ils applaudissent ou sifflent à leur gré les deuxorateurs, soulignant l'opposition radicale de leurs positions politiques.
Le théâtre dispose donc de nombreuses ressources spécifiques pour mettre en scène les conflits entre les personnages.
Le texteécrit donne une partie des indications scéniques nécessaires aux acteurs et au metteur en scène pour rester fidèle à la pièce écrite.Cependant, c'est au metteur en scène d'imaginer les autres éléments qui pourraient accentuer le conflit grâce aux décors et auxcostumes ainsi qu'au jeu qu'il demande à ses acteurs.
Le théâtre est un spectacle vivant, auquel le spectateur assiste « en direct »et vis à vis duquel il exprime son approbation ou son mécontentement.
De nos jours, le théâtre est, malgré tout, concurrencé parle cinéma, qui offre plus de possibilités techniques pour représenter les conflits.
Toutefois, le théâtre a sur le cinéma l'avantaged'être un spectacle vivant..
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- ► En vous appuyant sur le corpus, vos lectures et éventuellement votre expérience de spectateur, vous vous demanderez de quelles ressources spécifiques dispose le théâtre pour représenter les conflits, les débats, les affrontements qui peuvent exister dans les rapports humains.
- De Quelles Ressources Spécifiques Dispose Le Théâtre Pour Représenter Les Conflits, Les Débats, Les Affrontements Qui Peuvent Exister Dans Les Rapports Humains ?
- Vous vous demanderez de quelles ressources spécifiques disposes le théâtre pour représenter les conflits, les débats, les affrontements qui peuvent exister dans les rapports humains.
- Pourquoi le théâtre se prête-t-il particulièrement à l'expression de différentes sortes de conflits et de quels moyens scénographiques dispose-t-il pour représenter ces affrontements ?
- L’École des femmes est une comédie de Molière en cinq actes (comportant respectivement quatre, cinq, cinq, neuf et neuf scènes) et en vers (1779 dont 1737 alexandrins), créée au théâtre du Palais-Royal le 26 décembre 1662. La pièce, novatrice en ce qu'elle mêlait de manière alors inédite les ressources de la farce et de la grande comédie en vers, fut un immense succès, et suscita une série de débats connus sous le nom de « Querelle de L'École des femmes. » Cette querelle, habilement e