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Cours: LA VIOLENCE (d de g)

Publié le 22/02/2012

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3) La lutte pour la reconnaissance (Hegel)

- Hegel s'efforce de dégager le sens de la violence. L'autre est le plus souvent l'individu  avec lequel on entre en guerre pour imposer sa suprématie. En étudiant les guerre dans l'antiquité, Hegel rencontre soit le phénomène de la mort de l'ennemi, soit le phénomène de sa soumission et de sa constitution comme prisonnier puis comme esclave. Hegel interprète le rapport à l'autre, pensé ici en tant qu'ennemi, comme une lutte pour la reconnaissance. Le conflit, la violence, la lutte à mort forment un des noyaux des relations humaines. La violence crée le moi, le processus historique.

- Si la guerre est d'abord une lutte pour la domination sur l'autre, cette domination, montre Hegel, ne peut s'exercer que par la reconnaissance qu'en effectue l'autre : en clair, le sujet ne peut imposer sa domination belliqueuse que si l'autre consent à reconnaître la suprématie de son vainqueur et la légitimité de sa domination.

- Dans la guerre, si l'autre est perçu comme ennemi, il est en même temps perçu comme celui qui détient la source de la maîtrise du vainqueur, du maître. S'il en est ainsi, c'est parce que le véritable maître est la mort, c'est-à-dire la crainte de la mort. C'est elle qui fait la domination ou la servitude : l'autre, qui a craint la mort, est devenu un esclave, et celui qui, dans le combat, n'a pas craint de mourir, mérite de dominer et de devenir le maître.

- Se produit toutefois un renversement dialectique : l'esclave va transformer son statut par le travail que lui impose le maître. Le maître considère l'esclave comme une machine utile amis il découvre vite que cette machine lui est indispensable. Dès lors, le statut respectif des protagonistes peut s'inverser et le maître tomber sous la dépendance de celui qui détient les conditions de la jouissance du maître. Et c'est finalement l'esclave qui devient le maître véritable.

- Cette dialectique de la domination et de la servitude révèle l'essence de l'autre : il est pur objet, machine, esclave ou maître, instrument. Hegel nous enseigne que la loi de la vie humaine est le conflit. Toute conscience poursuit la mort de l'autre, non point la mort physique (il faut que l'autre soit vivant pour me reconnaître), mais l'asservissement d'autrui, la destruction de son autonomie.

- Mais la leçon de Hegel est aussi qu'autrui est la condition de la conscience de soi :sans autrui, je ne suis rien, je n'existe pas; je dépends de l'autre dans mon être. Je ne sis une conscience de soi que si je me forge et me forme à travers la négation d'autrui. Pour réaliser l'unité de la conscience de soi, je dois me faire reconnaître. C'est donc en moi-même que je porte autrui. L'autre me pénètre au plus intime de ma conscience et de ma vie. Le plus isolé des Robinson découvre ainsi autrui en chacun de ses fantasmes et de ses rêves.

4) Le regard de l'autre (Sartre)

- Ces analyses de Hegel, Sartre les prolonge, en explicitant le conflit humain tel que nous le vivons à travers le corps et le regard. Le fait premier est bel et bien le conflit : c'est l'agression du regard qui exprime le mieux ma dépendance par rapport à l'autre.

 

- Sartre établit que l'homme est fondamentalement un être-pour-autrui. Je ne me connais et découvre qu'à travers le regard qu'autrui pose sur moi. Le regard des autres a immédiatement un sens humain. Dès qu'autrui me regarde, je cesse de voir ses yeux comme des choses. Mais en me constituant comme sujet, le regard de l'autre me fige et me réifie. Dès que je suis vu par autrui, je suis ravalé au niveau des choses. Le regard désigne la modalité même du surgissement d'autrui comme sujet.

 

- Le regard est, en effet, ce qui me dépouille de moi-même, de ma libre transcendance, de ma seigneurie sur le monde. Quand autrui me regarde, il me met en danger : je me découvre en position d'objet. Désormais, la situation m'échappe et je n'en suis plus le maître. Autrui, par son existence même, me fait tomber dans le monde des choses : je deviens une transcendance (liberté) transcendée (dépassée). L'autre exerce donc par essence une violence ontologique sur l'univers du sujet. Exemple de la honte étudié dans le cours sur autrui.

 

- L'apparition de l'autre est donc simultanément l'origine d'une désintégration de mon univers, l'origine d'une chosification de mon être, et l'origine d'une spoliation de ma liberté. Le sujet est littéralement dépossédé de lui-même. Dès lors, " le conflit est le sens originel de l'être-pour-autrui". La réciprocité est un conflit des libertés. Devant et par autrui, je suis devenu un être, un objet, je ne suis pas le fondement de mon être, puisque c'est l'autre qui, par sa liberté, le définit.

CONCLUSION :

- Principe de puissance corrompue, impatience dans la relation à autrui, la violence choisit le moyen le plus court pour forcer l’adhésion, pour nier l’autonomie de l’autre et, à la limite, pour l’asservir ou à défaut l’anéantir. Les figures de la violence sont multiples et se déploient en un long parcours à travers exterminations, terrorisme, génocides, etc. La violence dans l’histoire, comme la violence au quotidien, déferle en tout sens : brutalité, menace, agressivité, la violence semble être notre lot, notre destin dans le monde.

- Aux racines de la violence s’entrecroisent plusieurs facteurs. Spécifique à l’espèce humaine en ce qu’elle traduit notre liberté et l’articulation, en nous, de la nature et de la culture, la violence est à comprendre également en rapport avec le contexte social, culturel et historique. Elle apparaît dans tous les cas comme constitutive de l’humanité, même si, comme nous allons le voir, tout l’effort de l’humanité consiste à réfléchir et à canaliser cette violence originelle.  La violence apparaît ainsi comme un phénomène qui peut être perçu tantôt négativement comme un facteur de désordre et de corruption, tantôt positivement comme un principe d’action, de liberté, d’affirmation de soi.      

 

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