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Berlin, manifestations de

Publié le 05/04/2013

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1   PRÉSENTATION

Berlin, manifestations de, insurrection déclenchée par les ouvriers de Berlin-Est en République démocratique allemande (RDA), les 16 et 17 juin 1953, en réaction à la pénurie croissante, à l’augmentation des cadences de travail ainsi qu’au régime politique en place, et réprimée par les troupes soviétiques.

2   UNE GRÈVE POUR LA DÉMOCRATIE

Au printemps 1953, le pouvoir est-allemand voit monter l’exaspération de la population, motivée par la pénurie qui fait suite aux réformes amorcées par le Parti socialiste unifié allemand (SED) en 1952 : suppression du petit commerce et de l’artisanat, collectivisation de l’agriculture entraînant une crise de ravitaillement et le rationnement. Le mécontentement qui s’exprime d’abord dans le monde agricole — des dizaines de milliers de paysans fuient vers l’Ouest — se diffuse dans le milieu ouvrier, lorsqu’est annoncée une augmentation de 10 p. 100 des cadences de travail et de production sans compensation, augmentation décidée unilatéralement par l’État, en mai 1953.

Mais le vent de fronde est également politique : les Allemands de l’Est critiquent de plus en plus le régime et l’hégémonie idéologique de la SED, qui commande la politique nationale. Ils fuient à l’Ouest ou s’érigent contre les procédures d’épuration et le système de la délation. Ils protestent contre l’absence d’intérêt qu’on leur porte, le manque d’indépendance nationale et le refus des élections libres.

La RDA de Walter Ulbricht, qui inscrit son action dans le cadre du stalinisme le plus pur, refuse de prendre en compte ces critiques. Mais après la mort de Staline, son successeur, Nikita Khrouchtchev, demande une réorientation : l’État et le parti doivent défendre les intérêts de « tout le peuple «, leur conception du socialisme doit être révisée. Devant la tension sociale, le 9 juin, Ulbricht proclame en effet un « Nouveau cours « (Neuer kurs), série de mesures libérales. Mais il est trop tard. Le 16 juin, des ouvriers débrayent et manifestent dans Berlin. Le 17 juin, le mot d’ordre de grève est lancé par les ouvriers de la Stalinallee. Les cortèges réunissent rapidement 300 000 manifestants. Malgré l’annonce de l’abrogation du décret sur les cadences par le ministère de l’Industrie, des centaines de milliers de grévistes se lèvent dans la plupart des villes : à Magdebourg, à Dresde, à Iéna, à Halle… Ils réclament la démission du gouvernement et des élections libres. La fronde est clairement politique, fait insupportable aux yeux d’un pouvoir déjà déstabilisé par les injonctions de Khrouchtchev, qui refuse, malgré la reculade du 9 juin, l’idée d’une contestation de son autorité et de ses pratiques (d’autant que des élections libres donneraient une probable majorité aux sociaux-démocrates).

3   RÉPRESSION ET NORMALISATION KHROUCHTCHÉVIENNE

Face à cette crise, le Kremlin, tout puissant au sein du Kominform, est tenté de donner la priorité à un changement d’hommes. Mais les grèves se métamorphosent rapidement en émeutes. Plusieurs tentatives d’assaut contre les bâtiments officiels et l’arrachage symbolique des drapeaux rouges soulignent le risque d’une révolution antisoviétique. L’État de siège est proclamé le 17 juin à 13 h 00. Khrouchtchev, soucieux de stabiliser la toute jeune RDA, demande aux troupes soviétiques stationnées en RDA (10 000 hommes) de réprimer les émeutiers. Pour l’URSS, cette intervention est une façon de maintenir l’équipe Ulbricht en place, tout en lui faisant comprendre sa vassalité idéologique et militaire par rapport à Moscou. Le soir même, l’émeute est matée (faisant, selon les estimations, de 300 à 400 morts).

Se mettant au diapason de l’esprit réformateur qui préfigure le XXe Congrès du PCUS (non sans procéder au préalable à une nouvelle et très large épuration), la RDA accepte ensuite une partie des revendications ouvrières : gains salariaux, augmentation des retraites, baisse du prix des transports, amélioration de l’encadrement médical… et durant les quelques années à venir, des voix discordantes, comme celle de György Lukács ou celle de l’économiste Fritz Oelssner sont autorisées à se faire entendre. Cependant, dans l’historiographie est-allemande, la grève de 1953 est d’emblée présentée comme une « tentative de sabotage fasciste «, alors que la République fédérale allemande (RFA) en avait fait un jour de fête nationale.

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