Article de presse: Un peuple vaincu par son armée
Publié le 22/02/2012
Extrait du document
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président d'un syndicat représentant dix millions de Polonais est arrêté et que, s'il n'est pas maltraité, c'est parce que le pouvoirmilitaire espère l'amener à plier et à composer.
A la prison de Bialoleka, où sont regroupés le professeur Geremek et Adam Michnik, des visites des familles ont été autoriséesle jour de Noël et les colis, pour l'instant, sont remis aux prisonniers.
Il est vrai que, dans les premiers jours de leur détention, ilsse sont retrouvés dans des cellules glacées et sans fenêtre, mais il est vrai aussi (pourquoi ne pas l'avoir dit aussitôt?) que c'estparce que les détenus de droit commun, entassés dans d'abominables conditions, pour faire de la place, s'étaient révoltés etavaient tout brisé.
Mais des ouvriers, des ouvriers de la base et non pas des dirigeants du syndicat, qui s'en inquiète? On sait seulement qu'il y aau moins quarante-neuf centres différents de détention dans la Pologne de l'état de guerre.
On a des échos de ce qui se passedans trois ou quatre d'entre eux où sont les célébrités, mais des autres on ne sait rien.
Cela ne veut pas dire que l'horreur y règne.Cela veut dire seulement que la Pologne vit sous une dictature militaire dont la puissance se fonde sur le mystère et l'impossibilitéd'aller plus loin qu'aux frontières de son quartier apprendre la vérité ou vérifier une information.
La réalité de l' " état de guerre ", c'est une armée qui a vaincu son propre peuple.
La réalité de l' " état de guerre ", ce sont neserait-ce que ces cinq mille cinquante-cinq personnes officiellement internées.
Ce n'est pas le bain de sang, c'est un effroyable gâchis politique qui a tué non pas sept, cinquante ou deux cents personnes,mais un pays entier.
La junte, au bout de trois semaines, tient la situation en main, mais pas assez pourtant pour rétablir lestéléphones.
L'ordre règne, la paix civile, paraît-il menacée, est instaurée.
Les ouvriers des usines qu'on n'as pas encore osérouvrir ou qui, tout simplement, ne peuvent fonctionner faute de matières premières ou d'énergie sont employés à déblayer laneige dans les rues.
Les rues sont propres.
L'ordre règne, mais cet ordre se résume à la destruction de Solidarité.
Et maintenant? On a beau questionner, décrypter lesindigestes journaux autorisés à paraître par l'état-major, on ne peut se défaire du sentiment que la junte n'en sait rien elle-même.
BERNARD GUETTA Le Monde du 1 er janvier 1982.
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