Article de presse: Un accord de paix a été conclu en Ulster
Publié le 17/01/2022
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Huit ans plus tard, son successeur, John Major, ouvrait des négociations secrètes avec l'IRA sur les moyens de mettre un termeà la violence en Irlande du Nord.
N'ayant pu vaincre les républicains sur le terrain de la répression comme de la propagande,Londres s'était résolue à une solution négociée.
Le 31 août 1994, l'IRA proclamait un cessez-le-feu suivi, le 13 octobre, par les paramilitaires loyalistes.
Le 9 décembre,Londres ouvrait les premiers pourparlers directs avec le Sinn Fein.
Ce geste historique allait être suivi de discussions sur l'avenirde la province entre Londres, Dublin et les parties au conflit.
Il en résulta l'accord-cadre de 1995, qui est à l'origine despropositions de compromis actuelles.
Mais le processus s'est vite enlisé, John Major, dont la majorité aux Communes ne cessait de s'effilocher, étant soumis auxpressions du Parti unioniste UUP de David Trimble.
La dynamique, qui avait éveillé d'immenses espoirs de paix dans la province,allait se briser quand le premier ministre conservateur prit ses distances avec la proposition de pourparlers multipartites présentéepar George Mitchell.
Dublin était furieux, l'IRA rompit la trêve de manière spectaculaire en posant une bombe dans le quartierdes affaires de Canary Wharf, le 9 février 1996, faisant deux morts.
Ponctués d'attentats meurtriers, les dix-sept mois qui ont précédé le second cessez-le-feu de l'IRA, le 20 juillet, après l'électionde Tony Blair, n'ont pas été perdus.
Après avoir cru à la paix, les négociateurs - y compris ceux qui étaient la vitrine politique desterroristes - ont vu avec frayeur revenir le spectre d'une guerre de rue à laquelle nombre d'entre eux avaient survécu de justesse.L'opinion, catholique comme protestante, ne voulait pas d'un retour aux années de plomb.
Les contacts ne furent pas rompus,tandis que Bill Clinton pesait de tout son poids en faveur d'un règlement politique.
Ce n'est pas faire trop d'honneur à M.
Blair que de dire que son arrivée aura tout changé.
Auréolé d'une majorité introuvable,cet homme, marié à une catholique et d'ascendance maternelle protestante d'Ulster, s'est immédiatement attelé à la tâche ingrateet risquée de convaincre toutes les parties de s'asseoir à la même table.
Psychodrame
Aidé par Mo Mowlam, sa secrétaire d'Etat aux affaires d'Irlande du Nord, qui a insufflé un nouveau style, plus direct et moinscompassé, il y est parvenu quand les pourparlers de paix se sont ouverts le 15 septembre 1997 à Belfast.
Il lui avait falluconvaincre le Sinn Fein d'accepter le jeu démocratique et de renoncer à la violence, mais aussi l'UUP de siéger dans la mêmesalle que d'anciens hommes de l'IRA.
L'autre parti unioniste, le DUP du pasteur Ian Paisley, irréductible de l'anti-papisme,boycotte la négociation.
Depuis lors, les sessions se sont succédé au Stormont dans une curieuse atmosphère de psychodrame où alternaientcoopération et suspicion mutuelle, optimisme et pessimisme.
L'UUP a toujours refusé tout contact direct avec le Sinn Fein,répétant comme pour s'en convaincre que l'IRA était sur le point de reprendre les hostilités.
Partisan des réformes minimales, dumaintien des liens traditionnels avec la Couronne, et opposé à ce qu'il considère comme des ingérences de Dublin dans lesaffaires de la province, M.
Trimble s'est efforcé de limiter au maximum la portée des institutions transfrontalières prévues dansl'accord Major-Bruton de 1995.
Il sait pourtant que celles-ci sont considérées par les nationalistes, le Sinn Fein et Dublin commeles garanties minimales des droits de la minorité.
Autoritaire, comme à son habitude, M.
Blair avait fixé une date-butoir aux négociations - le week-end de Pâques - et annoncéqu'un référendum aurait lieu en mai pour appeler les Irlandais du Nord à se prononcer sur le plan de paix, tandis que ceux du Sudvoteraient sur une modification de leur Constitution, qui proclame l'unité de l'île.
Cajolant et forçant alternativement la main à sesinterlocuteurs, établissant des relations de travail confiantes - bien que non dépourvues de divergences - avec son homologueirlandais Bertie Ahern, il a contraint les parties à hâter le pas au lieu de se complaire dans leurs querelles de clocher.
Lesdernières semaines auront été menées à la hussarde, les négociateurs passant même leurs derniers jours en conclave quotidiendevant leurs ultimes responsabilités, tandis que M.
Ahern et M.
Blair mettaient la dernière main à leur compromis.
La paix étaitsans doute à ce prix.
PATRICE DE BEER Le Monde du 13 avril 1998.
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