Article de presse: Terreur rouge à Addis Abeba
Publié le 22/02/2012
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Derg.
Les " cadres " formés depuis 1976 par l'école idéologique (crée à cette époque et contrôlée au début par le partiMEISON) se sont ainsi acquis une redoutable réputation dans les quartiers.
Certains d'entre eux, qui auraient suivi une formationde contre-guérilla urbaine, s'apparentent davantage à des hommes de main qu'à des responsables politiques.
Dans chaque quartier, chaque usine, chaque bureau, existe en outre un " comité de défense de la révolution ", dont lesmembres, théoriquement élus, sont en général armés.
Une bonne partie d'entre eux sont en fait d'anciens opposants menacés outorturés, qui ont sauvé leur vie en changeant de camp et qui manifestent un zèle particulier à l'encontre de leurs anciens" camarades ".
Dans les campagnes, les " escadrons de défense " jouent un rôle analogue, et le bilan de leur chasse aux contre-révolutionnairesest régulièrement publié par la presse.
Cette terreur rouge, minutieusement mise au point, s'était un peu calmée l'été dernier, avec un ralentissement des assassinatspolitiques attribués au PRPE.
Le 2 avril 1977 d'ailleurs, les autorités avaient officiellement dénoncé les " excès " commis parcertains responsables de kebelles et même publiquement fusillé six d'entre eux, dont Girma Kebede, coupable d'atrocités dans lequartier central Arat Kilo.
Cet " exemple " avait été interprété à l'époque comme une volonté de modération du zèle meurtrier deskebelles.
Le régime craignait, il est vrai, que ceux-ci, largement contrôlés par le MEISON, ne finissent par constituer une forcepolitique capable de se dresser un jour contre le DERG.
" Nous avions surestimé notre force, après le 1 er mai (1)et nous nous étions fait des illusions sur les capacités révolutionnaires du DERG ", murmurent aujourd'hui, un peu piteusement, des militants clandestins de MEISON, encore en liberté.
La terreur eneffet a repris dès l'automne, et jusqu'au début de cette année, avec, disent les observateurs, une efficacité accrue.
" J'étais contre-révolutionnaire "
Certes, la capitale éthiopienne est célèbre pour sa propension aux rumeurs folles et aux fantasmes.
Cette fois, cependant, tropde témoignages concordent pour qu'on puisse mettre en doute la cruauté et l'ampleur de la terreur.
Spectacle courant à Addis-Abeba, même en plein jour : une voiture banalisée s'arrête à hauteur d'un passant; un homme en civil en sort et abat sans un motle " contre-révolutionnaire ".
Si un policier s'approche, une carte officielle aussitôt brandie et une allusion au DERG suffisent à ledissuader d'intervenir.
Le matin, dans les quartiers, les cadavres sont souvent exposés pendant une heure ou deux, avec, autour du cou, une pancartesignalant aux passants : " J'étais contre-révolutionnaire, j'avais tué Untel et Untel.
" Une jeune femme ayant quitté Addis-Abebapour les fêtes de Noël, déclare avoir compté onze cadavres entre sa maison et l'aéroport de Bolé.
Des suspects arrêtés par leskebelles, même très jeunes, sont souvent soumis à la torture.
C'est le cas par exemple d'un jeune garçon à qui on a arraché lapeau des pieds ou encore de cette jeune fille de milieu modeste, défigurée après qu'on eut mis le feu à ses cheveux.
La techniquedu " perchoir à perroquet ", utilisée en Argentine et consistant à suspendre un prisonnier à une barre de fer tout en le torturant,semble régulièrement utilisée.
Dans les cas les moins graves, les jeunes gens interpellés-la moyenne d'âge des victimes de la répression s'abaisseconstamment-sont condamnés à quelques semaines de " rééducation politique ".
C'est le cas de beaucoup d'enfants de huit àdouze ans, arrêtés récemment par centaines, en vertu d'une circulaire officielle publiée au mois de décembre.
Mais souvent, les personnes convoquées au kebelle disparaissent sans laisser de traces.
L'existence de charniers dans les environs d'Addis-Abeba a été signalée à plusieurs reprises par des parents de victimes, sansqu'il soit évidemment possible de s'en assurer.
Des pressions en tout cas ont été exercées par plusieurs kebelles pour convaincreles familles de ne pas porter le deuil d'un " contre-révolutionnaire ".
Comme tous les habitants d'Addis-Abeba, les parents d'enfants tués dans la nuit sont parfois contraints, dès le lendemain matin,de participer à des manifestations favorables au régime en brandissant des pancartes à la gloire de la terreur rouge.
La terreur rouge et l'encouragement continuel à la délation favorisent, bien sûr, bon nombre de règlements de comptes qui n'ontrien à voir avec la révolution, ou donnent lieu souvent à de tragiques méprises.
Une mère de famille du quartier Piazza, malade,envoie un soir son fils unique à la pharmacie.
Au retour, l'adolescent est tué d'une balle dans la tête sur les marches du square." Excusez-nous, on l'avait pris pour un autre ", murmurent simplement les tueurs à la mère en retournant du pied le cadavre.
Les résultats de cette terreur sont indéniables.
" Le calme commence maintenant à régner dans la ville ", répètent non sanscynisme les autorités.
Il est de fait que les rangs des PRPE ont été décimés.
Les scissions intervenues en son sein ont facilité le.
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