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ARTICLE DE PRESSE: Sorge : l'homme qui a sauvé Moscou

Publié le 22/02/2012

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22 juin 1941 - Pendant vingt ans, ou davantage, un homme a gardé son masque. Tout le monde l'a connu comme un homme de droite et même d'extrême droite; et cela faisait beaucoup de monde, car il était connu, il circulait, il était populaire. Et puis, un jour, le masque tombe : l'homme est espion pour les Russes. Sorge a été par excellence l'homme qui garda son masque vingt ans, vingt-cinq ans jusqu'à la stupéfiante découverte du dernier jour, quand son travail était fait. A Tokyo, il était " le journaliste nazi ". Nazisme pas toujours bien chaud, dira-t-on plus tard, et pour cause ! Mais, aux yeux des gens, il était " le " journaliste de l'Allemagne hitlérienne, dans les petits papiers de l'ambassade, et dans le secret des dieux. Hitler s'alliait avec le Japon ... Hitler se préparait en grand secret à attaquer la Russie, son alliée d'alors... L'attaque lancée, il pressait violemment le Japon d'entrer en guerre à son tour contre l'URSS... De tous ces épisodes d'un drame toujours entouré d'un profond secret, qui donc savait tout ? qui lisait les télégrammes de Hitler à l'ambassadeur allemand Ott qui était là pour en discuter longuement avec l'ambassadeur lui-même, devenu son ami intime, et l'aider à rédiger ses télégrammes de réponse ? Sorge, l'Allemand et le patriote Sorge. Un jour d'octobre 1941, la " gestapo " japonaise arrête Sorge. Stupeur. Fureur de son ambassade, rage des Allemands du Japon. Et puis on apprend que ce sont les petits policiers aux yeux bridés qui ont raison . Sorge était un espion de Staline, officier honoraire de l'armée rouge, communiste depuis un quart de siècle, envoyé en mission spéciale en Extrême-Orient. Sur le jeu secret de l'alliance Allemagne-Japon il a tout su, et il a tout livré à Moscou. Il a su surtout, au moment crucial, que le Japon n'attaquerait pas la Russie, que le " torchon brûlait " dans l'alliance. Il a câblé à Staline : " Le Japon ne bougera pas. Vous pouvez dégarnir la Sibérie pour soutenir le choc à l'Ouest. " Il a sauvé Moscou. Derniers détails : sa mère était russe et il parlait le russe aussi bien que l'allemand : nul ne s'en était jamais douté. ROBERT GUILLAIN Le Monde du 21 septembre 1963

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