Article de presse: Rol-Tanguy, le communiste

19 août 1944 - Leclerc était un aristocrate; Henri Tanguy, qui prendra pour pseudonyme Rol, est un ouvrier communiste. Ce solide Breton blond, calme et dont même ses adversaires dans la Résistance reconnaîtront la loyauté, a alors trente-six ans. Et une carrière militante bien remplie. Il est né en 1908 à Morlaix (Finistère). Ouvrier chaudronnier-tôlier, il est quelque temps secrétaire du syndicat des métaux CGT de la région parisienne. Son activité lui vaut d'être mis à la porte successivement des usines Citroën, Renault et Breguet. En 1937, il s'engage dans les Brigades internationales, qui se battent en Espagne contre Franco. Il y devient commissaire politique. Pendant la campagne de France, il est blessé et démobilisé avec le grade de sous-lieutenant. Comme la plupart des communistes disciplinés, il entre en 1941 dans la Résistance. Il exerce des fonctions de responsabilité dans la mise sur pied des Francs-tireurs et partisans (FTP), d'obédience communiste. Il deviendra responsable des FTP pour l'Ile-de-France, puis commandant pour la même région des Forces françaises de l'intérieur (FFI), qui regroupent, en principe, les combattants de tous les mouvements. Rol-Tanguy n'oublie jamais qu'il est d'abord communiste. Pas un instant il ne divergera des positions arrêtées par les représentants du PC au CNR et au comité militaire d'action. Il sera le seul membre du parti-exception faite de Fabien-à commander un régiment, le 151e RI, pendant la campagne d'Allemagne. Militant discipliné, il subit ensuite un long purgatoire : il reste dans l'armée, alors que, après le départ des communistes du pouvoir en 1947, on le confine dans des emplois subalternes puisqu'on l'envoie au dépôt de Versailles des officiers sans commandement. Il n'est plus qu'un symbole. Il est rayé des cadres en 1962. Assez médiocrement, on ne lui accorde qu'une retraite de chef de bataillon. Le conseil d'Etat, en 1964, lui rend justice : il retrouve son grade de lieutenant-colonel, et de Gaulle lui remet, la même année, la rosette de la Légion d'honneur, cérémonie sans chaleur de part et d'autre. En 1964 encore, Henri Rol-Tanguy est élu au comité central du PC. Il ne fait parler de lui que lorsque le parti prend des positions en matière militaire. Ainsi protestera-t-il contre l'armement nucléaire et dénoncera " la désignation arbitraire de l'ennemi " dans la stratégie française : l'URSS. JEAN PLANCHAIS 1985