Article de presse: Procès Kravchenko : le goulag et la France
Publié le 17/01/2022
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personnelles qu'à la France, enfin, pour beaucoup, une appropriation de la raison d'Etat qui commandait de ménager le principalmoteur de la révolution future ou encore un partenaire de poids dans la guerre qui venait...
tout cela faisait fermer les yeux.
Et puis le livre de Solonevitch avait été " adapté du russe " par R.Brégy et P.A.
Cousteau, et Cousteau était un descollaborateurs les plus virulents de Je suis partout; Dorgelès écrivait dans l'hebdomadaire ultra réactionnaire Gringoire; l'ouvragede Souvarine avait été honoré d'une souscription par le conseil municipal de Paris pour les bibliothèques publiques; Doriot n'avaitpas tardé à virer ouvertement au fascisme.
En face, la Ligue des droits de l'homme adoptait un rapport d'un nommé Rosenmark-par ailleurs conseiller juridique de l'ambassade soviétique-qui concluait à la parfaite régularité des procès de Moscou.
L'honnêtedémocrate peu informé n'était donc pas porté à croire ce qui lui était affirmé.
Le deuxième conflit mondial terminé victorieusement, pourquoi aurait-on vu en Staline l'oppresseur, alors qu'il était l'un dessauveurs, et celui à qui il avait coûté le plus de sacrifices? Il faut le déclenchement de la guerre froide pour que reparaisse, et avecbeaucoup plus d'ampleur et de retentissement, la question des camps.
Les premiers à donner l'alarme sont Dallin et Nicolaievsky, deux vieux mencheviks qui vivent aux Etats-Unis et publient enanglais.
Leur livre Travail forcé en URSS, très précis, dénombre cent vingt-cinq camps, et produit un catalogue des catégories dedétenus : paysans suspects d'individualisme; personnes ayant résidé à l'étranger ou ayant correspondu avec leurs familles qui ysont établies, ce qui est notamment le cas de beaucoup de juifs; habitants des régions frontalières déportés à l'intérieur avant1937, et subissant une nouvelle déportation; victimes de leurs convictions religieuses; fonctionnaires de rang élevé ou moyencoupables de " délits politiques ", dont beaucoup sont membres du PC soviétique; auteurs de " crimes de guerre " (maisqu'entend-on par là ?).
Leur ouvrage est évoqué lors d'une Assemblée générale de l'ONU, le 25 octobre 1947, et traduit enfrançais en 1949.
Quant à Michel Collinet, dans sa Tragédie du marxisme (1948), il évalue à 20 millions le nombre des concentrationnaires à lafin de la guerre, surpassant de quelques millions le total des ouvriers libres.
" C'est, dit-il, l'ampleur du travail forcé qui permet de dire que les déportés constituent une classe normale de travailleurs, etl'esclavage une forme normale d'exploitation en Russie " (4) Sous le titre J'ai choisi la liberté, paraissent, en 1948, les descriptions de la terreur au village, des super-purges, les " scènes dantesques " des camps.
L'auteur est un haut fonctionnaire soviétique,passé aux Etats-Unis en 1944 à l'occasion d'une mission officielle.
Traduction à Paris, à grand renfort de publicité.
Contre-offensive du PC : le 13 novembre 1947, Kravchenko est qualifié dansles Lettres françaises d'ivrogne et de faussaire; il n'a rédigé lui-même que soixante pages de son livre, le reste a été écrit par desmercenaires.
Kravchenko saisit la balle au bond, ou on la saisit pour lui : il attaque en diffamation.
Du 24 janvier 1949 au 4 avril se déroulent les audiences.
Est-ce le procès des ennemis du pouvoir soviétique ou le procès del'URSS? De part et d'autre, à grands frais, on a rameuté de partout des témoins.
Au cours de batailles oratoires homériques, l'un d'eux, Margrethe Bauber-Neumann, émerge.
Femme du leader communisteallemand Franz Neumann, émigré en URSS et liquidé par Staline, elle a séjourné dans des camps soviétiques, puis on l'a livréeaux nazis.
Du fait de sa déposition, les faits ne sont plus discutables par les observateurs de bonne foi.
Les adversaires de Kravchenko défendent dans la confusion deux thèses simultanées et contradictoires : les camps n'existentpas; ce sont des institutions modèles de régénération.
Au reste, déclare Jean Cassou, qui ne se prononce pas sur le fond, " laguerre contre Hitler est un bloc "; il faut donc ne pas disqualifier Stalingrad, car c'est disqualifier Bir-Hakeim ou le Vercors.
Le procès de Kravchenko n'est pas terminé que le comité économique et social de l'ONU, sur proposition américaine, invite leBureau international du travail à enquêter sur les " camps d'esclaves " existant en URSS et dans les pays de l'Est.
Le 22 juillet 1949, le Foreign Office publie des photocopies du code pénal soviétique.
Ce code réprime les " dommages à laconstruction socialiste ", perpétrés non seulement par les " éléments des classes hostiles ", mais par les " instables " et les" déclassés ".
Sont donc passibles d' " internement pour travail correctif ", prononcé par un tribunal ou une instance administrative,les coupables d'absentéisme ou de retards répétés.
Ensuite, ce n'est plus un haut fonctionnaire soviétique à l'abri chez les Américains qui porte des coups au systèmeconcentrationnaire soviétique, mais un Français déporté résistant, David Rousset..
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