Article de presse: Petit lexique des groupuscules

10 mai 1968 - Voici les plus notables des différents groupes actuels d'étudiants d'extrême gauche. L'Union des étudiants communistes est l'organisation étudiante du Parti communiste français. Elle a cherché, vers 1961, à obtenir une plus grande autonomie à l'égard du parti en manifestant une certaine inclination pour les thèses du Parti communiste italien. Affaiblie par plusieurs années d'une histoire troublée marquée de scissions et d'exclusions, l'UEC défend aujourd'hui strictement la " ligne " du parti dans son mensuel le Nouveau Clarté. Elle proteste notamment contre " l'aggravation des conditions de vie et de travail des étudiants ", s'attachant en particulier à défendre les intérêts des étudiants salariés. Le Comité de liaison des étudiants révolutionnaires (CLER) a été fondé en 1961 par un groupe d'étudiants appartenant à une organisation trotskiste-connue sous le nom de groupe Lambert-rassemblée autour du journal la Vérité. Il déclare compter actuellement onze cents militants. Ceux-ci se situent dans une tradition strictement " bolchevique " trahie, selon eux, par le PCF et les " bureaucraties " des pays de l'Est. Ils manifestent une véritable mystique de l'organisation, qu'il s'agisse du " parti révolutionnaire " qu'ils entendent créer ou des organisations syndicales. Sur le plan universitaire, le CLER estime primordial de conserver les " avantages acquis par les étudiants ", et a lancé une vigoureuse campagne antisélectionniste. Il publie un mensuel : Révoltes. La Jeunesse communiste révolutionnaire (JCR), fondée au début de 1966 par une centaine de militants du secteur Sorbonne-lettres de l'UEC qui avaient notamment protesté contre le soutien accordé par le Parti communiste à la candidature de M. Mitterrand à la présidence de la République. Ils se sont rattachés à un autre courant trotskiste dit " groupe Frank ". Mais leurs références sont plus diverses que celles du CLER. Ils axent largement leur propagande sur la lutte " anti-impérialiste " et sur la solidarité des luttes étudiantes à l'Est comme à l'Ouest. La JCR publie un journal, l'Avant-Garde. Elle compte des groupes assez actifs à Caen, Rouen et dans le Midi. L'Union de la jeunesse communiste (marxiste-léniniste) constitue l'un des mouvements " prochinois " français. Elle a été fondée en novembre 1966 par les cercles de l'UEC de l'Ecole normale supérieure et de la faculté de droit dissous par la direction du mouvement. Marqué au départ par l'enseignement du philosophe Althusser, le mouvement a publié d'abord une revue théorique de bon niveau : Cahiers marxistes-léninistes. L'organe actuel, Servir le peuple, se partage entre deux thèmes : l'analyse et l'éloge de l'exemple chinois et de la pensée de Mao Zedong et, d'autre part, le soutien des réactions et des grèves de la " base " contre la " bureaucratie de la CGT ". Les Comités Vietnam de base sont proches de l'UJC. Fondés à l'automne 1967, ils ne se veulent pas un mouvement étudiant. Néanmoins, c'est chez les étudiants et les lycéens qu'ils ont trouvé la majorité de leurs militants, à Paris et en province, et des quinze cents participants du congrès qui s'est tenu en mars. Ils sont pour le soutien inconditionnel du Front national de libération et du Vietnam du Nord, dont ils reproduisent les textes dans leur journal Victoire pour le Vietnam. Ils ont organisé des manifestations particulièrement " dures ", comme celle du 7 février place Maubert à Paris, ou des actions de commando, comme celle de la rue de Rennes le 28 avril. Certains groupes anarchistes ont participé au mouvement de Nanterre. On a vu réapparaître les drapeaux noirs des anarchistes lors des dernières manifestations d'étudiants. Le Monde du 9 mai 1968