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Article de presse: L'intervention américaine au Vietnam

Publié le 17/01/2022

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2-5 août 1964 - A la veille de la signature des accords de Paris le 27 janvier 1973, Jacques Decornoy retrace les étapes de la guerre du Vietnam. Le FNL, dans son appel de décembre 1960, a demandé à la population de renverser le régime diémiste, de bouter hors du Vietnam les Américains et aussi d' " éliminer la culture asservissante et dépravante made in USA ". Il faudra attendre 1963 pour que Diem et ses frères soient balayés. " La part prise par nous à ce coup d'Etat n'a fait que renforcer nos responsabilités au Vietnam et l'engagement des Etats-Unis ", indique le fameux rapport de Robert Mac Namara divulgué pendant l'été 1971. Lors du changement de régime, une occasion de quitter le Vietnam s'offrira pourtant alors à Washington, qui la repoussera : " Cette solution ne fut jamais considérée comme une solution de rechange valable; la thèse de l'importance stratégique d'un Vietnam du Sud indépendant et libre de toute influence communiste prévalait ", affirme encore le rapport McNamara. La crise-urbaine-se noue lorsque, à partir de mai, l'armée de Diem intervient contre les bouddhistes de Hué la CIA prend alors des contacts avec des généraux qui vont préparer la chute du dictateur, et, parmi eux, le général Duong Van Minh. Le monde frémit en cet été 1963 à la vision des films montrant les bonzes mourant volontairement dans les flammes de vapeur d'essence. Si le mouvement est populaire, ce n'est pourtant pas le peuple qui recueille le bénéfice de l'opération, mais bien des officiers en liaison constante avec les représentants locaux de Kennedy. Seul un jeune diplomate américain ose prétendre au cours des conférences à huis clos, à Washington, qu'avec ou sans Diem, le Sud finira par basculer dans le camp anti-américain. Il est vivement pris à partie par le vice-président Johnson, Dean Rusk et McNamara. Le 1er novembre 1963, Diem et Nhu, son frère redouté, sont exécutés sommairement par les militaires qui les ont renversés. Pour les Américains, la guerre continue, ou plutôt elle commence vraiment. Violence au Vietnam... Violence en Amérique, terre de violence... Kennedy meurt à Dallas. Quelques jours plus tard, Lyndon Johnson, qui, au cours d'un voyage à Saigon, en 1961, avait qualifié Diem de " Churchill du Sud-Est asiatique ", se rend à Honolulu ce ne sera pas la dernière fois qu'un président des Etats-Unis ira conférer avec ses généraux et des amiraux dans le centre nerveux de la " présence " américaine dans le Pacifique le fait que le chef de l'exécutif fasse souvent le déplacement vers ce terrain militaire sera considéré par nombre d'observateurs américains comme un signe des formidables pressions que les généraux, et en particulier les aviateurs, exercent sur la Maison Blanche quant au législatif, il n'est informé de rien. A Honolulu, il faut bien constater cependant que le FNL enregistre de grands progrès et que les campagnes échappent à Saigon. En janvier 1964 les putschistes de novembre sont renversés par d'autres généraux, dirigés par Kahnh, qui parle ni plus ni moins d'envahir (ou de faire envahir) le Vietnam du Nord. La valse des officiers commence à Saigon, avec une série de conspirations et des contre-conspirations le remplacement du " stable " Diem se révèle décidément difficile pour Washington : il faudra quelque temps pour trouver le tandem Nguyen Van Thieu-Nguyen Cao Ky et ramener à Saigon une apparence de pouvoir politique. L'Indochine (les événements de 1970 au Cambodge et ce qui s'ensuivra viendront à nouveau le souligner) n'a cessé de former un tout-pour les deux camps adverses. S'il ne faut pas confondre ses trois pays et ses trois combats, ses trois peuples et ses trois cultures, il ne faut pas non plus oublier que partout Washington n'a cessé de combattre non seulement le " communisme ", mais la politique de neutralité du prince Sihanouk, ni que, dans les trois " secteurs ", des forces de gauche n'ont cessé, avec plus ou moins de vigueur, d'organiser leur implantation dans la population. De leur côté, par la jungle comme par les vallées, les guérilleros vietnamiens ont souvent débordé les frontières nationales. L'exemple du Laos vient, à cet égard, tout de suite à l'esprit. Il était important pour les Américains de tenir le pays, tant pour abattre le mouvement Pathet-Lao que pour empêcher les Nord-Vietnamiens d'utiliser " la piste Ho-Chi-Minh ". Pour ces raisons, les Etats-Unis se sont toujours autant intéressés au Laos qu'au Vietnam les interventions clandestines ou directes (la menace en 1961 par Kennedy d'y dépêcher des milliers de soldats à partir de la Thaïlande) ont été incessantes. Le traité de 1962 proclamant la neutralité du royaume sous un régime tripartite, avec une importante garantie internationale, ne sera jamais appliqué : l'assistance ouverte à des hommes de droite tels que le général méo Vang Pao, ou le général Kouprasith Abhay, l'assassinat, dans des conditions douteuses, du ministre (neutraliste de gauche) des affaires étrangères Quinim Pholséna, en avril 1963, vident vite le traité de son contenu, en même temps qu'ils relancent des opérations au sol. Le Laos est largement utilisé pour les raids américains contre la RDV. C'est lui qui est bombardé le premier, dès mai 1964. On apprendra ensuite la vérité sur les actions des compagnies aériennes " privées " américaines liées à la CIA, celles-là mêmes qui furent utilisées contre la RDV en 1954-1955, elles-mêmes filles de l'aviation du général Chennault, un ancien de la guerre contre le Japon, lié au lobby formosan de Washington. On apprendra aussi l'importance de l'engagement américain lors des élections au Laos, ou bien encore au bord de la plaine des Jarres, celle de la base secrète de Long-Chen, ou bien encore la progressive disparition du peuple méo, petit à petit massacré lors d'opérations pendant lesquelles des fusils M-16 sont confiés, au nom de la liberté, à des enfants de dix ans. Si les raids de mai 1964 contre la Laos sont presque tout de suite connus de l'opinion, il n'en va pas de même des projets américains concernant le Vietnam. Robert McNamara a remis à Lyndon Johnson, en décembre 1963, un rapport décrivant la situation comme " très inquiétante ". Le 22 janvier 1964, le général Maxwell Taylor, président du comité des chefs d'état-major, a conseillé des raids contre la RDV et la prise en charge directe de la guerre au Sud par les Américains. A partir de cette date, les experts militaires, dont l'amiral Felt, ne cessent de préparer les plans d'escalade contre le Nord, cependant que les experts politiques mettent au point des plans destinés à convaincre l'opinion du bien-fondé d'une telle stratégie. Lors d'une conférence à Honolulu, en juin, il est décidé d'agir avec violence afin de relever le moral défaillant des troupes du régime de Saigon. Un diplomate canadien est chargé d'alerter le premier ministre du Nord, Pham Van Dong, des dévastations que son pays risque de subir s'il ne compose pas avec les Américains. Bombardements sur le nord Le 1er et le 2 août, des avions américains pilotés par des Thaïlandais bombardent des villages nord-vietnamiens proches de la frontière du Laos. Une " stratégie de la provocation " fut mise en place. L'incident du golfe du Tonkin d'août 1964 n'en constitue qu'une des pièces on sait que dès le 25 juillet (il s'agit d'un projet parmi tant d'autres), le Conseil national de sécurité américain a prévu le bombardement de plusieurs objectifs au Nord par des vedettes lance-torpilles sans marque de nationalité. Le 30 juillet, un raid a lieu : les exécutants sont des Sudistes le commandant de l'opération s'appelle le général Westmoreland. Le 2 août, d'autres attaques sont lancées. Des navires américains croisent dans les parages finalement, le Maddox et le Turner-Joy sont attaqués par des vedettes nord-vietnamiennes. Immédiatement après, l'aviation américaine lance ses premiers raids officiels contre la RDV. L'opinion ne sait rien, sur le moment, des nombreux plans longuement mis au point dans le secret pour qu'une telle crise éclate le Congrès vote à Johnson une résolution lui donnant carte blanche au Vietnam. En septembre, de nombreuses îles du Nord sont attaquées par la marine. Au début du même mois, les dirigeants américains se sont mis d'accord pour déclencher, pour janvier ou février 1965, la campagne de raids systématiques contre la RDV. Il suffira de trouver un nouveau prétexte. En pleine campagne électorale, à l'automne de 1964, Lyndon Johnson se pose pourtant en " colombe " face au candidat républicain Barry Goldwater, partisan déclaré de la manière forte. Le président jure qu'il n'enverra pas son armée au Vietnam " dans un combat dont je pense qu'il concerne d'abord les jeunes Asiatiques ". L'Amérique est alors décidée à prendre directement en charge la guerre d'Indochine, les discussions entre frères ennemis laotiens l'agacent les chicanes entre Sud-Vietnamiens l'énervent; lorsque, en décembre 1964, des conflits opposent Khanh, Ky, d'autres officiers et le vieux M. Huong, l'ambassadeur américain convoque les éléments galonnés de ce monde remuant et, sur un ton de proconsul qui ne peut plus " gaspiller sa salive ", indique que ses interlocuteurs et protégés " n'ont rien compris ", provoquent une " pagaille terrible " et doivent se calmer. L'ambassadeur est là pour faire la guerre; il sait aussi qu'elle risque de devenir encore plus dure: selon des services de renseignements, de nombreux militants originaires du Sud sont rentrés chez eux pour combattre après un long séjour au Nord (il a duré dix ans). Le FNL anéantit fin décembre deux bataillons gouvernementaux aux portes de Saigon. Sa victoire est en vue, Washington va alors agir. JACQUES DECORNOY Le Monde du 25 janvier 1973

« C'est lui qui est bombardé le premier, dès mai 1964. On apprendra ensuite la vérité sur les actions des compagnies aériennes " privées " américaines liées à la CIA, celles-là mêmesqui furent utilisées contre la RDV en 1954-1955, elles-mêmes filles de l'aviation du général Chennault, un ancien de la guerrecontre le Japon, lié au lobby formosan de Washington.

On apprendra aussi l'importance de l'engagement américain lors desélections au Laos, ou bien encore au bord de la plaine des Jarres, celle de la base secrète de Long-Chen, ou bien encore laprogressive disparition du peuple méo, petit à petit massacré lors d'opérations pendant lesquelles des fusils M-16 sont confiés, aunom de la liberté, à des enfants de dix ans. Si les raids de mai 1964 contre la Laos sont presque tout de suite connus de l'opinion, il n'en va pas de même des projetsaméricains concernant le Vietnam.

Robert McNamara a remis à Lyndon Johnson, en décembre 1963, un rapport décrivant lasituation comme " très inquiétante ".

Le 22 janvier 1964, le général Maxwell Taylor, président du comité des chefs d'état-major, aconseillé des raids contre la RDV et la prise en charge directe de la guerre au Sud par les Américains. A partir de cette date, les experts militaires, dont l'amiral Felt, ne cessent de préparer les plans d'escalade contre le Nord,cependant que les experts politiques mettent au point des plans destinés à convaincre l'opinion du bien-fondé d'une telle stratégie.Lors d'une conférence à Honolulu, en juin, il est décidé d'agir avec violence afin de relever le moral défaillant des troupes durégime de Saigon. Un diplomate canadien est chargé d'alerter le premier ministre du Nord, Pham Van Dong, des dévastations que son pays risquede subir s'il ne compose pas avec les Américains. Bombardements sur le nord Le 1 er et le 2 août, des avions américains pilotés par des Thaïlandais bombardent des villages nord-vietnamiens proches de la frontière du Laos.

Une " stratégie de la provocation " fut mise en place. L'incident du golfe du Tonkin d'août 1964 n'en constitue qu'une des pièces on sait que dès le 25 juillet (il s'agit d'un projetparmi tant d'autres), le Conseil national de sécurité américain a prévu le bombardement de plusieurs objectifs au Nord par desvedettes lance-torpilles sans marque de nationalité.

Le 30 juillet, un raid a lieu : les exécutants sont des Sudistes le commandantde l'opération s'appelle le général Westmoreland.

Le 2 août, d'autres attaques sont lancées.

Des navires américains croisent dansles parages finalement, le Maddox et le Turner-Joy sont attaqués par des vedettes nord-vietnamiennes.

Immédiatement après,l'aviation américaine lance ses premiers raids officiels contre la RDV. L'opinion ne sait rien, sur le moment, des nombreux plans longuement mis au point dans le secret pour qu'une telle crise éclate le Congrès vote à Johnson une résolution lui donnant carte blanche au Vietnam.

En septembre, de nombreuses îles du Nord sontattaquées par la marine.

Au début du même mois, les dirigeants américains se sont mis d'accord pour déclencher, pour janvier oufévrier 1965, la campagne de raids systématiques contre la RDV.

Il suffira de trouver un nouveau prétexte. En pleine campagne électorale, à l'automne de 1964, Lyndon Johnson se pose pourtant en " colombe " face au candidatrépublicain Barry Goldwater, partisan déclaré de la manière forte.

Le président jure qu'il n'enverra pas son armée au Vietnam" dans un combat dont je pense qu'il concerne d'abord les jeunes Asiatiques ". L'Amérique est alors décidée à prendre directement en charge la guerre d'Indochine, les discussions entre frères ennemislaotiens l'agacent les chicanes entre Sud-Vietnamiens l'énervent; lorsque, en décembre 1964, des conflits opposent Khanh, Ky,d'autres officiers et le vieux M.

Huong, l'ambassadeur américain convoque les éléments galonnés de ce monde remuant et, sur unton de proconsul qui ne peut plus " gaspiller sa salive ", indique que ses interlocuteurs et protégés " n'ont rien compris ",provoquent une " pagaille terrible " et doivent se calmer. L'ambassadeur est là pour faire la guerre; il sait aussi qu'elle risque de devenir encore plus dure: selon des services derenseignements, de nombreux militants originaires du Sud sont rentrés chez eux pour combattre après un long séjour au Nord (il aduré dix ans).

Le FNL anéantit fin décembre deux bataillons gouvernementaux aux portes de Saigon.

Sa victoire est en vue,Washington va alors agir. JACQUES DECORNOY Le Monde du 25 janvier 1973. »

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