Article de presse: Liban, I. -1975-1976: chrétiens et palestiniens s'affrontent
Publié le 17/01/2022
Extrait du document
«
Ce ne sera évident que plus tard mais Damas bascule à ce moment en faveur des chrétiens, impose une trêve, qui durera deuxmois (mi-janvier, mi-mars 1976) et sera rompue par un coup d'Etat d'opérette, d'autant plus incongru qu'il s'insère dans une vraieguerre, dure, meurtrière, dévastatrice.
Le peu qui subsistait de l'armée et de l'Etat éclate : le président de la République, Soleiman Frangié, abandonne le palaisprésidentiel et se réfugie en terrain phalangiste-c'était alors l'union sacrée chez les chrétiens, la rupture n'interviendra qu'en 1978.Quant à l'armée, si elle se désintègre, du moins ne participe-t-elle pas aux combats, ou si peu, à travers l' " armée du Libanarabe ", fraction sans grande envergure qui rallie le camp " palestino-progressiste ", tandis que des officiers chrétiens aident lesmilices de leur communauté.
L'affrontement syro-palestinien
De la mi-mars à la mi-novembre, ce sont huit mois tragiques, la plus longue phase d'hostilités ininterrompues des dix ans deguerre, dont le foyer principal est Beyrouth, mais dont les convulsions secouent tout le Liban.
Avant que le front ne se stabilise etque les chrétiens ne regagnent du terrain avec le soutien de la Syrie, ils perdent pied de tous côtés.
A Beyrouth, de l'hôtel HolidayInn à l'immeuble Fattal-deux hauts lieux de la guerre,-leur recul n'excède pas 800 mètres.
Mais c'est le coeur de la cité qui meurt, ravagé par les combats, pillé et saccagé boutique après boutique, bureau après bureau,dans le sillage de l'avance des " palestino-progressistes " : la fin d'un monde.
Au nord aussi, les chrétiens lâchent prise au Koura.
Plus grave : leur sanctuaire de la montagne centrale est attaqué par le haut,par ces crêtes hautaines dont ils s'enorgueillissent et qui tombent entre les mains de leurs ennemis.
Entraînés par le chef druzeKamal Joumblatt, qui commet l'erreur de défier ouvertement les Syriens en voulant cueillir une victoire qu'il sent à portée de main,les Palestiniens s'enhardissent à proclamer que " la route de Jérusalem passe par Jounieh " (coeur du pays chrétien).
Autant dire,dans le contexte d'alors, par Damas...
Dès lors, le président Assad deviendra leur ennemi implacable-et le restera, même durant les longues années 1978-1982, où ilest contraint, par le traité de Camp David, à refaire alliance avec eux jusqu'à les éjecter enfin de la scène en 1983, ou, du moins,de les faire sortir du Liban et de Syrie.
Fermant les yeux sur les relations déjà étroites des milices chrétiennes avec Israël, la Syrie croise le fer avec les Palestiniens enjuin 1976, puis de nouveau à l'automne.
Les armes syriennes font couler le sang palestinien sans qu'à Damas le régime s'effondre,sans même qu'il soit affaibli.
L'URSS, sollicitée désespérément par la résistance palestinienne, laisse faire son allié syrien.
Remis en selle après que Damas eut inversé le cours de la guerre, les chrétiens renouent avec le succès au nord et, à Beyrouth,au camp de Tell-el-Zaatar, au prix il est vrai d'un effroyable massacre supplémentaire...
L'équilibre rétabli, et l'Arabie saoudite ayant convaincu les présidents Assad et Sadate d'arrêter leur épreuve de force-cardepuis un an et demi que dure la guerre au Liban, le chef de l'Etat égyptien y a constamment pris le contre-pied de Damas,-lasituation est mûre pour une pause, que l'on prend à l'époque pour la paix.
La caution arabe permet à la Syrie de transformer sonarmée au Liban en une Force arabe de dissuasion.
Entre-temps, le Liban a pu se doter d'un nouveau président, Elias Sarkis, qui hérite d'un non-pouvoir, homme seul s'il en futjamais à la tête d'un Etat qui n'existe plus.
Les Libanais apprennent, durant cette période noire entre toutes, que la guerre, outre les obus, les liquidations, les francs-tireurset les destructions qu'ils connaissaient déjà, c'est aussi l'électricité coupée, l'eau qui n'arrive plus aux immeubles, l'essence quidisparaît, l'aéroport, après le port, qui se ferme, avec, en prime, dans le secteur " palestino-progressiste ", le chaos et lebanditisme.
Par centaines de mille, ils fuient cette terre devenue brusquement hostile à la vie.
Pourtant, l'espoir est dans leur tête et leur coeur.
Démesuré, infondé, mais tellement réel que même ceux qui fuient emportentdes valises et dans ces valises la certitude qu'il y en a pour un mois ou deux.
Que les jeunes trouvent dans la guerre une raison devivre et y adhèrent, surtout du côté chrétien que les étudiants ne veulent plus rejoindre leurs universités à l'étranger, pour faire lecoup de feu.
Chez les chrétiens, c'est la patrie, la terre, que l'on défend avec un dévouement souvent sublime.
Chez les " palestino-progressistes ", c'est une cause..
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Article de presse: Renouer le dialogue entre Israéliens et Palestiniens
- Article de presse: Liban, IV.- 1983-1985 : la désintégration
- Article de presse: Liban, III.- 1982-1983: l'intervention israélienne
- Article de presse: Liban, II. -1977-1981: le jeu syrien
- Article de presse: Les réfugiés palestiniens