Article de presse: Les femmes premières victimes du remaniement

7 novembre 1995 - Sur treize ministres et secrétaires d'Etat quittant le gouvernement, huit sont des femmes. Elles ne sont plus que quatre sur les trente-deux membres du nouveau gouvernement, contre douze sur les quarante et un de la précédente équipe. Il ne reste plus que deux femmes ministres, contre trois auparavant. Nommée depuis moins d'un mois rapporteur général de l'observatoire de la parité, Roselyne Bachelot, député (RPR) de Maine-et-Loire, regrette cette situation. " C'est un recul ", explique celle qui dirige l'organisme chargé de recenser les inégalités entre les hommes et les femmes. " Certes, ajoute Mme Bachelot, il faut analyser la diminution du nombre de femmes ministres dans le cadre d'une équipe gouvernementale plus ramassée. Elles étaient particulièrement nombreuses parmi les secrétaires d'Etat dans le premier gouvernement d'Alain Juppé. Or il ne reste plus que cinq secrétaires d'Etat, dont deux femmes. " " Certaines femmes avaient été choisies pour féminiser l'équipe gouvernementale de manière artificielle, précise Mme Bachelot. Elles n'ont pas pu résister au remaniement, qui privilégie les professionnels de l'action publique. D'autres, en revanche, comme Elisabeth Hubert (...) et Colette Codaccioni (...)i, ont été sacrifiées pour les besoins d'une réforme de structures à la veille d'un grand débat sur la protection sociale. " Mais le député de Maine-et-Loire s'inquiète davantage du faible nombre de femmes à l'Assemblée nationale, " le réservoir naturel de ministres " : les femmes parlementaires en France ne sont que 5,5 %, la proportion la plus basse de toute l'Union européenne, à l'exception de la Grèce. L'ancien ministre socialiste Marie-Noëlle Lienemann regrette pour sa part que, " pour M. Juppé et M. Chirac, le renouveau et l'efficacité consistent essentiellement dans le renvoi des femmes du gouvernement ". Ségolène Royal, député (PS) des Deux-Sèvres, conclut que, " même si certaines manquaient d'expérience, elles n'ont pas fait plus de gaffes que les hommes ". En juin, la photographie officielle du gouvernement qui inaugurait le septennat de Jacques Chirac frappait par le nombre de silhouettes féminines. Le premier gouvernement d'Alain Juppé était le plus féminisé de la Ve République. Avec 28,6 % de femmes au sein de l'équipe gouvernementale, la France se classait au quatrième rang de l'Union européenne. Le cliché du deuxième gouvernement dirigé par M. Juppé sera beaucoup plus classique : la proportion de femmes est tombée à 12,90 %, soit un score inférieur de trois points à la moyenne européenne. MICHELE AULAGNON Le Monde du 9 novembre 1995