Article de presse: L'économie algérienne sur la voie du redressement
Publié le 17/01/2022
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23 octobre 1997 - " L'Algérie ne signera pas de nouvel accord avec le Fonds monétaire international [FMI]. " Dans un entretien accordé au Monde, mardi 21 octobre 1997, le ministre algérien des finances, Abdelkrim Harchaoui, a, pour la première fois, confirmé que son pays allait s'affranchir de la tutelle du Fonds au printemps 1998, à l'expiration des accords qui lient l'Algérie à l'institution financière internationale. Pour justifier cette décision à double tranchant, - le pays recouvre sa souveraineté mais se prive de facilités financières - , le ministre met en avant la " bonne santé " de l'Algérie. " Nous n'avons plus besoin de soutien pour rembourser notre dette extérieure. Les grands équilibres économiques sont rétablis et les recettes tirées de l'exportation des hydrocarbures vont augmenter les prochaines années " , affirme-t-il avant de préciser cependant que l'Algérie continuera à suivre une politique économique et financière de nature libérale inspirée par le FMI. " L'Algérie, dit-il, restera dans l'axe. "
Nommé à la tête du ministère des finances en septembre 1996, après avoir occupé celui du commerce, M. Harchaoui, quarante-sept ans, brosse de l'économie algérienne un tableau très positif. Le tassement des importations conjugué à la hausse des exportations de gaz et de pétrole, qui fournissent la quasi-totalité des recettes extérieures, ont permis de dégager un excédent confortable de la balance commerciale (4,6 milliards de dollars 27,6 milliards de francs à fin septembre, soit davantage que pour toute l'année 1996). La balance des paiements est également positive et les réserves de change n'ont jamais été aussi élevées de toute l'histoire du pays. " Nous en sommes à 7,5 milliards de dollars, soit plus de neuf mois d'importations. Nous terminerons l'année avec probablement 1 milliard supplémentaire " , souligne M. Harchaoui.
Chômage élevé
Pour justifier le maintien d'un tel niveau de devises, alors que le chômage massif des jeunes devrait inciter le gouvernement à relancer la production industrielle (hors hydrocarbures, elle commence tout juste à se stabiliser après une dizaine d'années de chute), le ministre avance une raison : la volonté algérienne d'être bien notée par la communauté financière internationale. " Notre dette extérieure atteint 32 milliards de dollars. Nos réserves sont là pour prouver que l'Algérie reste une bonne signature, un pays auquel on peut continuer à prêter de l'argent. Nos créanciers ont l'assurance d'être remboursés. " Une seconde raison milite en faveur de réserves de changes élevées : asseoir la convertibilité du dinar, la monnaie nationale, promise par le gouvernement.
M. Harchaoui prévoit pour 1998 une croissance du produit intérieur brut (PIB) de 5 %, chiffre qui, selon lui, aurait été atteint cette année si les résultats de l'agriculture n'avaient pas été affectés par la sécheresse. Pour s'en affranchir, le gouvernement a choisi de donner la priorité au secteur hydraulique dans le prochain budget, lequel sera excédentaire comme les deux précédents. Le logement (construction de 60 000 logements sociaux) et l'enseignement supérieur seront, selon M. Harchaoui, les deux autres principaux bénéficiaires de ce budget.
Même libérée de la tutelle du FMI, l'Algérie entend mener à bien un programme de privatisations, dont le retard n'est pas sans inquiéter le Fonds. " Près de 250 unités industrielles vont être cédées au privé, dont certaines de grande taille. Auparavant, les effectifs auront été réduits et les finances de ces établissements assainies. Nous mettrons sur le marché des entreprises viables, pas des canards boiteux " , assure le ministre. Une demi-douzaine d'entre elles seront cotées à la Bourse d'Alger, dont la réouverture, avec l'assistance des Canadiens, est prévue avant la fin de l'année. Elle sera implantée dans les locaux occupés par la Bourse d'Alger avant l'indépendance.
A l'égard de la France, qu'aucun accord financier ne lie plus à son pays, M. Harchaoui, élu député du Rassemblement national démocratique (RND), " le parti du président " aux législatives de juin, ne ménage pas ses critiques. La prime de risque réclamée par la Coface, l'organisme d'assurance-crédit, pour le commerce franco-algérien est, juge-t-il, " excessive " : " Elle renchérit les produits français de façon injustifiée et amène nos opérateurs à se tourner vers d'autres fournisseurs. " Le contentieux a d'autant moins de chance d'être réglé qu'aucune rencontre bilatérale, au grand regret de M. Harchaoui, n'est prévue avec son homologue français, Dominique Strauss-Kahn.
JEAN-PIERRE TUQUOI
Le Monde du 23 octobre 1997
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