Article de presse: Le traité de Moscou, changement de climat
Publié le 22/02/2012
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15-25 juillet 1963 - " La bombe atomique est trop dangereuse pour être abandonnée à un monde sans loi. " Ainsi s'exprimait, au soir d'Hiroshima, le président Truman. Mais il aura fallu près de dix-huit ans de guerre froide, de crises graves et de négociations interminables pour arriver à poser sur la voie de la réglementation internationale des armements nucléaires un premier jalon.
Ce jalon est modeste. Le traité paraphé à Moscou par MM. Harriman et Gromyko, et par lord Hailsham, n'engage pas ses signataires à grand-chose. Ceux-ci conservent, sans le moindre contrôle, des stocks capables de faire sauter plusieurs fois la planète. Ils ont tout loisir de les accroître encore. Nikita Khrouchtchev préfère laisser les Etats-Unis compléter leur déjà riche panoplie plutôt que de se prêter à une inspection réciproque sur place des explosions souterraines d'origine douteuse. Chacun des trois signataires a la possibilité de se retirer du traité, avec un préavis de trois mois, si tel ou tel événement, dont il est seul juge, l'y contraint. Enfin ni la France, qui est déjà entrée dans la course, ni la Chine, qui brûle de suivre son exemple, n'ont la moindre intention de s'associer au traité.
Disons que le traité de Moscou concrétise un changement de climat perceptible depuis quelque temps déjà. Plutôt qu'essayer de prendre une revanche de leur échec à Cuba, les Soviétiques reconnaissent la réalité d'un rapport des forces qui interdit à chacun des deux camps de songer à la victoire. Quiconque se remémore les minutes dramatiques que le monde à vécues il y a moins d'un an se félicitera de l'entente réalisée et priera le ciel qu'elle conduise à des règlements plus sérieux. En même temps, s'il a gardé le souvenir des événements antérieurs, il se gardera de trop d'optimisme. Pour le moment, encore une fois, c'est le climat qui a changé, et seulement le climat. Or il a déjà changé souvent dans le passé sans que l'amélioration persistât bien longtemps. On peut raisonnablement espérer qu'il en ira autrement cette fois. Faut-il pour autant, comme on y paraît décidé à Paris, se tenir sur la réserve et s'opposer à l'accord sous prétexte qu'il n'a d'autre effet que de semer l'illusion et consolider l'inégalité des " Grands " et des " Petits " ?
Le Monde du 27 juillet 1963
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