Article de presse: Le raz de marée travailliste en Australie
Publié le 17/01/2022
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5 mars 1983 - C'est par un véritable raz de marée que le parti travailliste a, samedi 5 mars, mis fin à sept années de gouvernement conservateur sous Malcolm Fraser. Le Labor, avec à sa tête son nouveau chef, Bob Hawke, l'ancien président des syndicats, a gagné à sa cause 5,1 % de nouveaux électeurs et obtenu, au moins, vingt et un sièges supplémentaires. Ils ont toutefois échoué dans leur tentative d'enlever la majorité au Sénat; or celui-ci a le pouvoir de repousser les projets de dépenses, ce qui avait entraîné la chute du gouvernement travailliste de Whitlam en 1975.
Malcolm Fraser a reconnu sa défaite et a immédiatement démissionné de son poste de chef du parti libéral, qu'il détenait depuis 1975, ce qui lui avait permis de prendre la tête de la coalition avec le parti national. En se présentant comme le seul bouc émissaire de cette défaite, l'ancien premier ministre a tenté de réduire le dommage causé à son parti par la perte de près d'un tiers de ses députés.
Malcolm Fraser avait choisi d'organiser ces élections anticipées, il y a un mois, le 3 février, espérant tirer profit du mécontentement croissant au sein du parti travailliste contre son dirigeant d'alors, Bill Hayden. Mais le Labor sut jouer plus habilement : le même jour, Bill Hayden avait remis sa démission, avant même que Malcolm Fraser n'ait pu annoncer que la dissolution du Parlement avait été approuvée par le gouverneur général et avait été remplacé par Bob Hawke.
Non seulement, Malcolm Fraser ne pouvait plus tirer profit du désarroi du Labor, mais il entamait la campagne avec un bilan économique sombre, un retard dans les sondages d'au moins dix points face à l'homme politique le plus populaire du pays. Tous les ingrédients pour un désastre se trouvaient réunis.
Une fuite de capitaux d'environ 1 milliard de dollars australiens (1 dollar australien équivaut à 6,80 F) au cours de la semaine précédant le vote, causée par la crainte d'une victoire travailliste et d'une dévaluation, n'a pas sauvé les conservateurs. Bob Hawke avait déclaré catégoriquement qu'il ne dévaluerait pas et qu'une de ses premières tâches serait de restaurer la confiance dans le dollar. Par ailleurs, le chômage avait atteint le taux record de 10,1 %, l'inflation dépassait les 11 %, et les taux d'intérêt-même ceux, contrôlés, pour l'achat de logements et pour les P.M.I.-avaient crevé les plafonds.
Le passé de syndicaliste de Bob Hawke n'entama pas non plus la confiance des électeurs. Les arguments du gouvernement selon lesquels les syndicats auraient un droit de veto sur la politique du Labor ne résistèrent pas à la signature entre travaillistes et syndicats d'un accord sur les prix et les revenus. Les électeurs ont estimé que Bob Hawke avait plus de chance de contrôler la hausse des salaires en préservant la paix sociale que Malcolm Fraser avec son plan de blocage volontaire des revenus.
La victoire que Bob Hawke vient de remporter lui permettra de former le second gouvernement travailliste depuis la guerre. L'ampleur de son succès est telle qu'on peut penser qu'il a de bonnes chances de rester longtemps au pouvoir.
ANNE SUMMERS
Le Monde du 8 mars 1983
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