Article de presse: Le nouveau départ de Kim Dae-jung
Publié le 17/01/2022
Extrait du document
«
civile).
Composés de lettres écrites à sa famille, ces Ecrits sont révélateurs de la pensée politique d'un homme lucide en dépit d'accents parfois messianiques pour commenter l'histoire de son pays et les grands événements mondiaux.
La vie de Kim Dae-jung est étroitement liée à l'histoire moderne de la Corée.
C'est sans doute ce qui lui confère une légitimitéhistorique dont ne bénéficie aucun autre politicien sud-coréen.
Une partie de l'opinion se méfie de lui : elle considère qu'il estdangereux pour ses engagements passés aux côtés des étudiants contestataires ou des ouvriers.
Kim Dae-jung est en réalité à lafois un dissident et un politicien coréen des plus traditionnels, jouant sur les clientèles et les rivalités régionales et régnant enautocrate sur son clan.
D'origine modeste, second fils d'un cultivateur sur une île au large du port de Mokpo (sud-ouest de la péninsule), il est né en1925.
Diplômé d'une école de commerce, il débuta comme petit entrepreneur.
Puis il se fit élire député en 1961.
Cet hommeaustère, qui commence sa journée à l'aube par une prière, était au début de sa carrière un redoutable orateur.
Le présidentsortant, Kim Young-sam, alors lui aussi un dissident, fit dès 1971 l'amère expérience des capacités de conviction de son rival :alors qu'il était assuré de devenir le candidat de l'opposition dans les élections présidentielles face à Park Chung-hee, il fut évincéau profit de l'autre Kim.
Devenu la " bête noire " de Park à la suite de cette présidentielle, Kim Dae-jung fut enlevé en août 1973 dans un hôtel deTokyo par les sbires du régime aidés par la pègre nipponne d'origine coréenne.
Alors que ses ravisseurs s'apprêtaient à le jeterdans la mer Jaune avec une pierre au cou, il fut sauvé par une intervention de Washington.
Il allait passer les années suivantesentre la prison, la résidence surveillée et un exil aux Etats-Unis.
" Park me haïssait et Chun essaya de me briser politiquement etpsychologiquement " , nous dit-il.
Park et Chun cherchèrent surtout à le discréditer en l'accusant d'avoir été communiste aulendemain de la guerre.
M.
Kim avait été arrêté en avril 1949 pour des " contacts suspects " avec le Parti coréen du travail, quiallait devenir par la suite le Parti des travailleurs en Corée du Nord.
L'accusation n'a jamais pu être prouvée mais, compte tenu del'instabilité politique qui précéda la guerre de Corée (1950-1953), elle n'a rien d'infamant : à la même époque, Park Chung-hee,alors jeune officier, n'avait-il pas été lui-même condamné à mort pour avoir appartenu à une cellule du Parti communiste ?
Par la suite, M.
Kim fit partie d'un mouvement où étaient représentés les mouvements de droite comme de gauche opposés audictateur de l'époque, Syngman Rhee, et devint un proche collaborateur du libéral Chang Myon qui fut porté au pouvoir par lesrévoltes étudiantes de 1960 et devint brièvement premier ministre : il devait être chassé du pouvoir neuf mois plus tard par leputsch de Park Chung-hee.
A la suite de l'assassinat de celui-ci, en octobre 1979, Kim Dae-jung revint sur le devant de la scène en cavalier seul : il nerenoua pas avec son parti qui était passé entre-temps sous la coupe de son rival, Kim Young-sam.
Condamné à mort poursédition en septembre 1980, il bénéficia, grâce une nouvelle fois à la pression de Washington, d'une remise de peine, commuéeen vingt ans de réclusion.
Puis, il fut autorisé à se rendre aux Etats-Unis.
Il en revint en février 1985 et fut placé en résidencesurveillée jusqu'à ce que les émeutes du printemps 1987 mettent fin au régime Chun.
Au cours de la campagne pour l'élection présidentielle de décembre 1987, la rivalité entre Kim Dae-jung et Kim Young-samfavorisa l'ex-général Roh Tae-woo.
Kim Dae-jung, qui arriva en troisième position, perdit plus qu'une bataille : une partie de sonprestige.
Beaucoup lui reprochant de s'être entêté à refuser un compromis avec l'autre Kim.
Au cours de la démocratisationentamée durant la présidence de Roh Tae-woo, Kim Dae-jung essaya de se démarquer des dissidents qui avaient été ses alliésnaturels dans la lutte contre la dictature.
Cette modération le coupa des étudiants et suscita la rancoeur des habitants deKwangju, la ville martyre de la dictature militaire, qui se sentirent abandonnés par ce " fils du pays " .
En 1990, le ralliement de son rival Kim Young-sam à la majorité permit la formation d'un parti " omnibus " qui, assurant unemajorité des deux tiers au gouvernement, rejeta Kim Dae-jung dans une situation purement oppositionnelle.
Afin que sa formationn'apparaisse pas comme le " parti d'un homme seul " , il rallia des opposants et forma le Parti démocrate qui, aux électionslégislatives de mars 1992, emportait 37,2 % des voix à Séoul.
En décembre de la même année, en se présentant une troisièmefois dans la course à la présidence, Kim Dae-jung livrait, à soixante-sept ans, ce que l'on pensait être sa dernière bataille.
Uneautre l'attendait, dont cette fois il allait sortir vainqueur.
" Devenir président n'est pas la seule manière d'être un grand homme pour son pays " , nous disait Kim Dae-jung en cetteamère soirée d'il y a cinq ans.
" Si l'on se souvient de moi comme d'un homme qui fut du côté du peuple, c'est sans doutel'essentiel.
" Derrière ce manoeuvrier de la politique se profile, toujours inopinément, l'homme des grandes causes.
On ne peutque souhaiter à la Corée, dont l'expérience de démocratie qui s'achève (Kim Young-sam fut le premier civil à accéder à laprésidence) ne fut guère concluante (scandales et banqueroute financière), que Kim Dae-jung demeure à la tête de l'Etat unhomme attaché aux valeurs dont il s'est constamment réclamé..
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Kim Dae-jung - biographie.
- Corée du Sud: les défis du président Kim Dae-jung
- Kim Dae-jung
- Article de presse: Le départ du général de Gaulle
- Article de presse: Au départ de France, convois pour la mort