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Article de presse: Le domaine réservé du président

Publié le 22/02/2012

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21 février 1966 - La politique étrangère a dominé à ce point l'oeuvre et les préoccupations du général de Gaulle que l'on en était venu à croire-à tort d'ailleurs-que tout le reste, à commencer par les problèmes de l' " intendance ", n'existait pas à ses yeux. Il reste que la diplomatie fut toujours le vrai " domaine réservé " de l'action du chef de la France libre d'abord, du fondateur de la Ve République ensuite. Incarnation de l'Etat à l'intérieur comme à l'extérieur, de Gaulle fut avant tout un diplomate, le dernier, après Roosevelt, Staline, Churchill, Eisenhower et avec Mao Zedong, des grands " façonneurs du monde " du milieu du siècle. Existe-t-il un fil conducteur entre la difficile collaboration du temps de guerre avec les " Anglo-Saxons " et le retrait de l'OTAN en 1966, entre les tentatives d'annexion de la rive gauche du Rhin et le traité franco-allemand de 1963, entre les voyages à Moscou de 1944 et 1966 et les invectives antisoviétiques de 1963, entre le plan Fouchet, le refus de l'Europe supra-nationale et le veto à l'entrée de la Grande-Bretagne dans le Marché commun, entre les déclarations d'amitié à Israël et la suspension des envois d'armes à ce pays en 1967 ? Il en existe un, et un seul : en toutes circonstances le général de Gaulle a défendu avec une extraordinaire opiniâtreté ce qu'il considérait comme l'intérêt supérieur de la France, ses positions et son rôle dans le monde. En authentique nationaliste, en " patriote de son pays ", disait curieusement Khrouchtchev, il a cherché à rendre à la France sa grandeur passée, à la faire rentrer dans ce jeu planétaire dont la défaite l'avait chassée. Chimères, orgueil démesuré, machiavélisme, peu d'épithètes ont été épargnées à ce stratège sans mégatonnes, à ce diplomate qui préférait la proclamation, le refus tranché ou le " cadeau " sans contrepartie à la négociation et au marchandage. Jamais on n'a pu parler d'un manque de caractère ou de hauteur de vues, toutes qualités qu'on ne saurait considérer comme particulièrement répandues sur la planète depuis la dernière guerre. Le Monde du 12 novembre 1970

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