Article de presse: Le départ du général de Gaulle
Publié le 22/02/2012
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Mémoires, il révèle le rôle qu'il s'assigne dès le lendemain du 20 janvier 1946 : " Dans le chef tenu à l'écart, on continuait de voirune sorte de détenteur désigné de la souveraineté, un recours choisi d'avance.
" Il ne doute pas qu'il continue d'incarner lalégitimité et que le pays fera appel à lui pour peu qu'il se sente menacé de déchirement.
Retiré dans son village, le général tente,une première fois, de forcer le destin : le 16 juin 1946, à Bayeux, première sous-préfecture libérée deux ans plus tôt, il prononceun fameux discours sur ce que devraient être les institutions de la France et dont il ne pourra mettre en oeuvre les principes qu'en1958 avec la Constitution de la V e République.
Comment le chef de la France libre, le libérateur du territoire, en était-il si vite arrivé là? Une fois la victoire obtenue sur lenazisme, une fois effacées les compromissions de la collaboration avec l'ennemi, de Gaulle avait entrepris de rebâtir le pays.
De lerebâtir matériellement et politiquement.
Il avait donc restauré les partis politiques que le régime de Vichy et l'occupation du paysavaient supprimés.
Mais ce généreux rétablissement de la République et de la démocratie s'était bien vite accompagné de larésurrection des rivalités et des luttes d'influence entre les partis politiques en vue de conquérir la majorité dans les assembléesqu'il fallait élire et dans le but de partager le pouvoir politique.
Une Assemblée nationale constituante a été élue le 21 octobre1945, le même jour où, par référendum, de Gaulle demandait à la fois de dire " oui " au rejet de la Constitution de 1875 et " oui "à une Assemblée constituante aux pouvoirs limités dans le temps.
Le premier " oui " recueille 96 % des voix, et le second 66 %,les communistes et une partie des radicaux ayant voté " non " à la deuxième question.
Aux élections législatives, trois grandesforces se dégagent: les communistes, hostiles à de Gaulle, avec 160 sièges, les gaullistes avec le MRP, qui obtiennent 152députés, et les socialistes, qui ont 142 sièges.
Il y a aussi 30 membres de l'Union démocratique socialiste, mais la droite, avec 66sièges, et les radicaux, avec 29, s'effondrent.
Les socialistes, refusant le tête-à-tête que leur offrent les communistes pourgouverner-et en réalité pour renverser de Gaulle,-exigent une solution tripartite avec le MRP.
Le 13 novembre 1945, de Gaulleest élu chef du gouvernement à l'unanimité des 555 députés votants, et il forme un gouvernement MRP-socialistes-communistes.Cette manifestation d'unité sera sans lendemains durables.
Tout de suite, en effet, les divisions s'accentuent entre les partis, et de Gaulle se rend vite compte qu'il ne peut être " lechampion d'une République ordonnée et vigoureuse et l'adversaire de la confusion " qu'il voulait devenir.
Très vite, sa décision est prise: le 1 er janvier 1946, à l'Assemblée nationale, il doit s'opposer aux socialistes, qui demandent une réduction de 20 % des crédits militaires pour le budget de 1946.
Il y voit une manoeuvre partisane tendant à le placer sous latutelle des partis.
Au détour d'une phrase, il note: " Sans doute est-ce la dernière fois que je parle dans cette enceinte...
" Il écritdans ses Mémoires: " En quittant le Palais-Bourbon dans la soirée du 1 er janvier, mon départ se trouvait formellement décidé dans mon esprit.
" Afin de ne pas donner l'impression de partir sous l'empire de la colère ou de la dépression, de Gaulle prendpour la première fois depuis sept ans quelques vacances.
Il se retire du 6 au 14 janvier à l'Eden-Roc, près d'Antibes, avec safemme.
Avec elle, il lui arrive de plaisanter en disant: " Nous nous retirerons au Canada; je pêcherai des poissons et vous les ferezcuire.
" Méditant face à la mer, il décide de " quitter la barre en silence ".
Dès son retour, il prévient trois membres de songouvernement, MM.
Tixier, ministre de l'intérieur, Teitgen, ministre de la justice, et Michelet, ministre des armées.
Il annonceaussi la nouvelle aux commissaires de la République, et le lendemain, le dimanche 20 janvier à midi, à l'ensemble dugouvernement.
A Marly, de Gaulle reste silencieux.
Il organise son secrétariat.
Le 21 février, dans une lettre à son fils, il tire ainsi la morale decette crise: " Il faut choisir, et l'on ne peut être à la fois l'homme des grandes tempêtes et celui des basses combinaisons.
"
ANDRE PASSERON Mars 1985.
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