Article de presse: L'Afrique noire française accède à l'indépendance
Publié le 22/02/2012
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Le 23 septembre 1958, onze territoires sur les douze des anciennes colonies d'Afrique-Occidentale française (AOF) et d'AEFacceptaient par référendum la Constitution de la V e République et consacraient, avec Madagascar, l'établissement de la Communauté.
Fondée sur d'indiscutables consentements populaires, elle se proposait non sans orgueil d'offrir en exemple unnouveau modèle d'organisation politique, à mi-chemin entre l'assujettissement et le séparatisme.
Par un " non " retentissant, laGuinée seule en déclinait les avantages.
Mais la victoire française cachait beaucoup d'équivoques.
La Communauté
Au Sénégal, au Soudan, l'occasion perdue d'un affranchissement définitif laissait certains nationalistes amers.
Peu sûrs de leurstroupes, Léopold Sedar Senghor et Modibo Keita n'avaient pas osé saisir les chances d'une sécession hasardeuse, par peurqu'un désaveu du suffrage universel ne les chassât du pouvoir, comme Djibo Bakary au Niger.
Tactiquement, l'épreuve électoraleconsolidait cependant le premier à Dakar et le second à Bamako.
Dès lors, cette indépendance qu'aucun des deux n'avait vouluconquérir isolément, pourquoi ne pas la réclamer ensemble?
Le nouveau dispositif constitutionnel leur en reconnaît le droit.
Associés dans l'éphémère Fédération du Mali, ils envisagèrent de l'utiliser.
Le général de Gaulle pouvait, sans doute, refuser derompre une union si vite remise en cause après sa naissance.
Avec presque tous ses collègues, Félix Houphouët-Boigny prêchaitla résistance.
Entre les deux clans, l'homme du 18 juin hésita six mois.
A la fin de 1959, il décida soudain non seulement d'offrir au Mali sa souveraineté pleine et entière, mais encore de la remettreaux autres jeunes Républiques autonomes, même si elles préféraient vivre en étroite association avec la métropole.
Des sentiments très mélangés déterminèrent sans doute cette réaction brutale.
Le générale ne souhaitait pas contraindre leSénégal et le Soudan à une rupture lorsque, en Guinée, Sekou Touré aménageait provisoirement plutôt bien la sienne avec lesoutien soviétique, sous peine d'étendre la contagion à d'autres territoires.
Dans cet esprit, les précipiter tous ensemble versl'indépendance préviendrait peut-être d'irréparables défections.
Certes, la réussite justifia le calcul.
Sous la superbe du choixprincier, il n'en trahissait pas moins une profonde impuissance.
Mais, enfin, quelques années plus tôt, les divisions vietnamiennes du général Giap submergeaient une garnison française dans lacuvette de Dien-Bien-Phu, et leur victoire avait paru sonner le glas des empires.
Peu après, le Maroc, la Tunisie, rejetaient le protectorat au terme d'une lutte sanglante.
Une expédition franco-britanniquelancée contre l'Egypte nassérienne échouait piteusement sur les bords du canal du Suez.
Depuis la fameuse conférence afro-asiatique réunie à Bandoung en 1955, des forces fatales aux anciens colonisateurs semblaient vraiment les balayer du monde.
Lasurvie même de la Guinée donnait l'impression qu'à chaque nouveau verdict les événements se retournaient contre eux par uneirrésistible volonté du sort.
Fasciné comme tant d'autres par ces événements, Léopold Sedar Senghor saluait en eux une " victoiremorale des peuples de couleur " annonciatrice d'un ordre nouveau.
Sous l'influence de la gauche anticolonialiste, des certitudes semblables à celle du dirigeant sénégalais envahissaient peu à peul'opinion métropolitaine, assiégeaient les hauts fonctionnaires, s'infiltraient jusqu'au conseil des ministres.
Avec son cortèged'horreurs, la guerre d'Algérie n'en finissait plus d'accumuler les cadavres.
Un fantôme hantait toutes les pensées : celui duguérillero inconnu, prêt à surgir du fond de n'importe quelle brousse, comme naguère au Tonkin ou encore, à l'époque, dans lesdjebels fiévreux du Constantinois.
Léopold Sedar Senghor et Modibo Keita n'envisagèrent sans doute jamais un quelconque recours aux violencesinsurrectionnelles.
Mais, depuis la révolte des Bamilékés, le sang coulait déjà au Cameroun.
La seule pensée qu'un nouveau frontpuisse s'ouvrir le long de tropiques remplissait la métropole d'épouvante.
De Gaulle n'évoqua jamais clairement cette hantise.
Ellen'en pesait pas moins sur ses réflexions et précipita l'Afrique noire vers cette indépendance encore jugée indésirable par la plupartde ses dirigeants deux ans plus tôt.
Quelle indépendance ?
Entre l'Afrique fidèle, vulnérable, d'Houphouët-Boigny et celle du lyrisme de Senghor, le général misa sur la seconde.
Bienentendu, l'anticolonialisme ambiant lui offrit tous les arguments possibles pour prétendre qu'il n'obéissait qu'au sens de l'histoire.Pendant un an ou deux, le maître de la V e République parla comme Jean-Paul Sartre.
Conduit en bon ordre, au nom de principes libéraux jusqu'alors détenus par la gauche, le repli débarrassait élégamment l'Hexagone de charges passées inaperçues dans.
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