Article de presse: La si longue patience du dalaï-lama
Publié le 22/02/2012
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pouvoirs politiques".
L'immense respect dont jouit le dalaï-lama chez ses compatriotes est cependant perçu par certains comme un frein à lapoursuite de la lutte : chez les jeunes et chez certains intellectuels appartenant à une génération qui n'a jamais connu le Tibet "del'intérieur", on sent parfois une certaine frustration, voire de la colère et de la déception, à l'égard des prises de position politiquesdu dalaï-lama.
Ce dernier, qui ne cesse d'appeler les Chinois au dialogue, a depuis longtemps renoncé à exiger l'indépendance duTibet.
Il serait prêt à accepter une autonomie du Tibet dans le cadre de la République populaire de Chine qui contrôlerait lesaffaires étrangères et les questions de défense du "Pays des neiges".
Prêchant de par le monde une non-violence de type gandhienne, le guide spirituel des Tibétains prône une "voie du milieu",condamnant la violence des armes et répétant à qui veut l'entendre que "la Chine est un grand pays avec lequel l'Occident se doitd'avoir de bonnes relations".
Pour lui, la priorité n'est pas politique, puisqu'il ne cesse de dénoncer le "génocide culturel" perpétrépar Pékin au Tibet occupé.
Une formulation qui en choque plus d'un, car c'est de génocide tout court qu'il faudrait parler àpropos de la situation qui prévaut depuis trente-huit ans sur le "Toit du monde".
En fait, les Chinois ont envahi le Tibet dès 1950,mais c'est à partir de 1959, quand la rébellion a éclaté à Lhassa, que le régime de Pékin a commencé sa politique de sinisation dupays.
La communauté tibétaine de souche risque désormais de se retrouver minoritaire face à l'ethnie Han, le groupe ethnique leplus important de l'empire du Milieu.
Trente-huit ans...
Yangchen Dolkar, trente ans, est née en Inde après l'invasion chinoise.
Elle est la secrétaire générale du"Congrès de jeunes" (Youth Congress), une organisation regroupant cinquante-sept branches régionales en Inde et qui a toujoursété un parti militant de la cause tibétaine.
Pour les gens de sa génération, la lutte de libération pour un pays dont elle ne connaîtque la culture a quelque chose de parfois désespérant.
"Je ne sais même pas si je verrai un jour mon pays, c'est vrai, concède, leslarmes aux yeux, cette militante décidée.
Oui, nous estimons que la ``voie moyenne`` [du dalaï-lama] est trop modérée.
Notrerespect pour Sa Sainteté ne nous empêche pas de camper fermement sur nos positions pour une indépendance totale du Tibet."
Yangchen rappelle la colère de ses collègues du "Youth Congress" après la violente répression chinoise contre les émeutes deLhassa en 1987 : "Nous étions frustrés.
Nous pensions prendre les armes contre les soldats chinois." Mais, aujourd'hui, saposition est plus modérée et en accord avec la position officielle du "gouvernement" : "Prendre les armes n'est pas une solution."
En tant que politique, la non-violence n'a donc pas donné les résultats que l'on pouvait en attendre : trente-huit ans plus tard, lesTibétains sont toujours en exil, et les Chinois restent sourds aux appels au dialogue lancés par le dalaï-lama.
En privé, même s'ilssavent qu'il n'y a sans doute pas d'autre choix, certains fonctionnaires confient être désabusés.
Même l'un des secrétairesparticuliers de Sa Sainteté, Kelsang Gyatsen, avoue sa "frustration" quand, lors de visites à l'étranger avec le chef de l'Eglisetibétaine, il rencontre des responsables de haut niveau du monde occidental : "Il faut plaider notre cause en permanence pouressayer de convaincre, mais on ne nous écoute pas." Et d'ajouter : "Culturellement, il est très difficile d'aller contre les désirs deSa Sainteté.
On sait qu'il rejettera toujours le choix de méthodes plus radicales [contre les Chinois].
Mais, aussi longtemps que sapolitique ne donne pas de résultats, il ne peut empêcher certains d'exiger l'indépendance totale [et non l'autonomie]."
Un tel aveu, dans la bouche même d'une personnalité très proche du dalaï-lama, montre bien qu'en dépit du prestige indéniablede Sa Sainteté la "deuxième génération" renâcle de plus en plus à accepter, en bloc, une politique qui n'a, finalement, jamais portéses fruits.
Même si, in fine, la majorité se rallie derrière le Prix Nobel de la paix, symbole vivant de la poursuite de la lutte et dontl'hyper-activité a conduit à considérablement médiatiser la cause du Tibet.
Les plus "durs" des "opposants" de McLeod Ganj ne critiquent d'ailleurs pas directement le dalaï-lama, mais plutôt la "clique"l'entourant.
Jamyan Norbu habite une petite maison isolée dans les brumes, non loin de la résidence du chef de l'Eglise tibétaine.Cet intellectuel a vécu les dernières heures de la rébellion des Khampas, quand ces Tibétains originaires de la province orientaledu Kham réputés pour leur valeur de guerriers attaquaient les troupes chinoises depuis leurs bases arrières du Mustang, auNépal.
"La politique de non-violence est un moyen pour l'Eglise de garder son pouvoir", accuse Jamyan Norbu, l'un desresponsables de l'association culturelle Amnya Machen, du nom d'une célèbre montagne du Tibet, mais qui est en fait uneorganisation très "politique" des "dissidents" de la communauté en exil.
"Les membres du gouvernement et tous ceux qui entourent le dalaï-lama vivent encore au Moyen Age.
Ils ne comprennent pasle monde moderne.
Ils ne réalisent pas que la Chine est un Etat-nation que les Tibétains ont combattu dans le passé, affirme cethistorien qui sillonne le monde et ses universités pour défendre la cause d'un militantisme tibétain.
Nous, les Tibétains, sommesdevenus ce que nous étions, dans le passé, parce que nous étions un empire combattant.
Entre 1912 et 1950, le treizième dalaï-lama avait mis sur pied une véritable armée.".
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