Article de presse: La seconde mort de Mobutu
Publié le 17/01/2022
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africaines ", d'ouvrir ses colonnes aux Congolais et de recruter un Joseph-Désiré Mobutu qui rêve de journalisme.
Le jeunehomme est encore dans l'armée et signe ses articles J.
de Banzy, un pseudonyme tiré de Banzyville, son terroir aux confins duCentrafrique, devenu Mobayi-Mbongo.
Il est libéré de ses obligations militaires le 31 décembre 1956 et intègre le comité derédaction des " Actualités africaines ".
C'est dans ce bureau, en juillet, qu'il rencontre pour la première fois Patrice Lumumba, unmilitant anticolonialiste qui créera deux ans plus tard le Mouvement national congolais (MNC).
Mobutu, qui vient d'effectuer son premier voyage en Europe, à l'occasion du Congrès de la presse coloniale, organisé en margede l'Exposition universelle de Bruxelles, adhère le 28 décembre 1958 au MNC de Lumumba.
Il retourne en Belgique en 1959suivre un stage professionnel auprès de l'Office de l'information et des relations publiques pour le Congo belge et le Rwanda-Urundi.
Il suit des cours à la maison de la presse de Bruxelles et s'inscrit à l'Institut supérieur d'études sociales.
Il participe, ausein de la délégation du MNC, à la Conférence de la Table ronde économique, financière et sociale, en avril-mai 1960, quiaboutira à l'indépendance.
De retour à Kinshasa le 10 juin, il est nommé, deux semaines plus tard, secrétaire d'Etat à la présidence du Conseil, chargé desquestions politiques et administratives dans le premier gouvernement constitué par Patrice Lumumba.
Le Congo devientindépendant le 30 juin 1960.
Un mois plus tard, le président de la République, Joseph Kasavubu, et le premier ministre luidemandent de calmer les casernes, où souffle un vent de mutineries.
L'ancien sergent prend du galon.
Il est nommé colonel et chefd'état-major de l'armée, le 8 juillet.
Jouant de la rivalité qui oppose le chef de l'Etat et le chef du gouvernement, le colonel Mobutu neutralise les hommes politiqueset met en place une équipe de technocrates, le Collège des commissaires généraux.
Il réussit en fait son premier coup d'Etat, le14 septembre 1960, qui n'avait pour but que l'élimination de Patrice Lumumba.
Celui-ci fuit vers Stanleyville (Kisangani), où setrouvent ses fidèles, mais il est arrêté, placé en résidence surveillée, incarcéré après une tentative d'évasion et livré, en janvier1961 à Elisabethville (Lubumbashi), aux partisans de son ennemi juré, le sécessionniste katangais Moïse Tshombé.
Le chantre dunationalisme congolais est affreusement torturé avant d'être assassiné, le 18 janvier, dans des circonstances qui n'ont toujours pasété élucidées.
Une chose est sûre, la CIA qui avait recruté Mobutu redoutait les liens que Lumumba était en train de tisser avec lecommunisme international.
Quelques jours plus tôt, le 7 janvier, Mobutu est " promu " général-major, commandant en chef de l'armée nationale.
Il rend lepouvoir aux civils en février, mais sa position à la tête de l'armée se renforce au fur et à mesure qu'il réorganise celle-ci.
Lesrelations entre le président Kasavubu et Moïse Tshombé, qui a succédé à Patrice Lumumba, se dégradent.
En octobre 1965, leprésident révoque son premier ministre.
Tshombé prend le chemin de l'exil.
Rien ne s'oppose plus à l'ambition de Mobutu.Lumumba est mort, Tshombé est à l'étranger : le général renverse Kasavubu le 24 novembre 1965.
Ce second coup d'Etatréussit.
Mobutu s'installe au pouvoir pour trois décennies.
Il n'imagine pas à ce moment-là que Laurent-Désiré Kabila, militantlumumbiste de la première heure, sortira un jour d'octobre 1996 des oubliettes de l'histoire pour le contraindre à son tour àprendre le chemin de l'exil...
Entre-temps, Mobutu aura fait pendre l'ex-chef du gouvernement, Evariste Kimba, et trois de ses ministres, en 1966, au termedu sinistre " procès de la Pentecôte ", à l'endroit précis où s'élève aujourd'hui le grand stade de Kinshasa, construit par lescoopérants chinois.
Il aura favorisé en 1967 l'enlèvement de Tshombé, organisé par la CIA.
Le chef de la sécession katangaisesuccombera mystérieusement à une crise cardiaque dans une prison algérienne.
Il se sera " débarrassé " de Pierre Mulele en1968, un compagnon de Lumumba, qui avait lancé une insurrection armée dans le Kwilu en 1964, après l'avoir attiré dans unpiège et fait torturer à mort par ses services.
Il est " élu " président de la République le 6 janvier 1966, et instaure en juin 1967 un régime de parti unique, après avoir créé leMouvement populaire de la révolution (MPR), qui deviendra plus tard le parti-Etat, dont tous les Zaïrois seront décrétés "membres de naissance ".
Le 30 octobre 1970, il est " réélu " à la tête du pays, et le sera régulièrement tous les sept ans.
Dix ansaprès l'indépendance, il lance la campagne d'" authenticité ", qui doit " nettoyer le pays des scories du colonialisme ", ettransforme le Congo-Kinshasa en Zaïre, en octobre 1971.
Les Zaïrois ne s'appellent plus " Monsieur ", mais " Citoyen ", et il n'est plus décent de se vêtir à l'occidentale.
Le costume-cravate est proscrit au profit de l'" abacost ", l'abréviation d'" à bas le costume ", une sorte de veste-tunique fermée jusqu'au colet portée sur un pantalon.
Les prénoms chrétiens sont africanisés.
Joseph-Désiré Mobutu devient Mobutu Sese Seko KukuNgbendu wa Zabanga, ce qui signifie en ngbandi, la langue de sa tribu : " le guerrier tout-puissant qui grâce à son endurance et àson inflexible volonté vole de victoire en victoire et sème la désolation sur son passage ".
Un nom qui peut être traduit de manièreplus triviale par un moins pompeux " l'invincible coq qui couvre toutes les poules de la basse-cour "..
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