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Article de presse: La nouvelle vague

Publié le 22/02/2012

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16 juin 1959 - Au milieu des années 50, la qualité des films français est devenue, dans les genres éprouvés où elle s'exerce, une qualité standard, avec spécialisation des vedettes et dialogues écrits sur mesure pour elles (par Henri Jeanson, Michel Audiard et quelques autres). A côté de Claude Autant-Lara, Jacques Becker, Robert Bresson, René Clair, René Clément, Henri-Georges Clouzot, Max Ophüls, de solides techniciens, tels Christian-Jaque, Henri Decoin, Jean Delannoy, Henri Verneuil, sont les piliers de la production commerciale. En 1955, Luis Bunuel vient tourner, en France, Cela s'appelle l'aurore. Mais il ne reste pas. L'annonce d'un changement est, alors, dans l'air. Avec les Mauvaises Rencontres, son premier long métrage (le Rideau cramoisi, en 1952, était un moyen métrage), Alexandre Astruc représente, soutenu par les Cahiers du cinéma, le manifeste d'une nouvelle génération qui défend les auteurs indépendants du système de production traditionnel, comme Jean-Pierre Melville (Quand tu liras cette lettre, 1953, Bob le Flambeur, 1956). Réalisateur de courts métrages, Alain Resnais offre à la conscience humaine le film le plus bouleversant sur la déportation et les camps de la mort qu'on ait alors conçu, Nuit et brouillard (1956). Venu, lui aussi, du court métrage, Georges Franju apporte son fantastique social au long métrage (la Tête contre les murs, 1958 les Yeux sans visage, 1959). Mais les débutants les plus jeunes sont, d'abord, Michel Boisrond, Robert Hossein, Edouard Molinaro, Roger Vadim (qui, en 1956, avec Et Dieu créa la femme, lance Brigitte Bardot comme symbole sexuel des nouvelles moeurs), et Jean Valère, Louis Malle se révélant, en fin de compte, le plus brillant, le plus personnel (Ascenseur pour l'échafaud, 1957 les Amants, 1958 Zazie dans le métro, 1960 Vie privée, 1961). Ensuite viennent celle (Agnès Varda, dès 1954 avec la Pointe courte) et ceux qui vont opérer la révolution de la nouvelle vague. A l'ombre des Cahiers du cinéma, François Truffaut (les Mistons, court métrage, 1958, puis les Quatre Cents Coups, 1959, couronné au Festival de Cannes), Claude Chabrol (le Beau Serge et les Cousins en 1959), Jacques Doniol-Valcroze (l'Eau à la bouche, 1959), Eric Rohmer (le Signe du lion, 1959), Jacques Rivette (Paris nous appartient, 1958-1960) et, surtout, Jean-Luc Godard, dont A bout de souffle (1959) est une rupture catégorique avec tout académisme. Le bataillon des Cahiers du cinéma bouleverse les méthodes de production et les méthodes de tournage, lance de nouveaux acteurs (Belmondo, Brialy, Bernadette Lafont), change la notion de qualité par des films peu coûteux et faciles à rentabiliser. Certains producteurs s'en feront les pionniers. D'autres y verront un filon. Par ailleurs, Hiroshima mon amour (1958, scénario de Marguerite Duras) puis l'Année dernière à Marienbad (1961) imposent Alain Resnais. Agnès Varda réalise Cléo de 5 à 7 (1962), Jacques Demy, le grand poète de la nouvelle vague, Lola (1961) et la Baie des anges (1962). Chris Marker fait du documentaire un nouveau genre, tenant du carnet de voyage et de l'essai (Lettre de Sibérie, 1958 Description d'un combat, 1960). Jean Rouch, avec Moi un Noir (1958) et Chronique d'un été (1961), fait triompher le cinéma ethnographique. Tandis que Marcel Hanoun, après Une simple histoire (1957) et le Huitième Jour (1959), commence une carrière d'artiste maudit, Michel Deville affine son style de comédie psychologique (Ce soir ou jamais, 1960 Adorable menteuse, 1961 A cause d'une femme, 1962), et Claude Lelouch n'arrive pas encore à percer, au contraire de Philippe de Broca. Nécessaire, sans doute, la révolution de la nouvelle vague qui a catapulté Godard à la tête du cinéma moderne et permis à Chabrol, Truffaut et leurs amis de conquérir de solides positions sur lesquelles ils vont établir un nouveau système, a fait trop de ravages dans la profession. Après deux très grands films, la Traversée de Paris (1956) et En cas de malheur (1959), Autant-Lara ne s'en relèvera pas. Carné, relancé par le succès des Tricheurs (1958), tournera vaille que vaille. René Clément résistera mieux (Plein soleil, 1959 le Jour et l'Heure, 1962). Si Astruc, Melville et Roger Leenhardt, les précurseurs, trouvent la place qui devait leur appartenir, au début des années 60, bien des jeunes trop inexpérimentés paieront aussi cher que les " anciens " rejetés leurs espoirs chimériques. Et par la suite viendra, en quelque sorte, la contre-révolution. JEAN SICLIER Octobre 1985

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