Article de presse: La chute de la monarchie irakienne
Publié le 17/01/2022
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A la radio, la Marseillaise alterne avec les communiqués militaires.
Quinze textes sont aussitôt diffusés par le Conseil de la révolution.
Ils annoncent, pour commencer, la constitution d'un Conseil de souveraineté de trois membres : un sunnite, le général NagibRoubaï un chiite, Mohamed Mahdi Koubba, ennemi traditionnel de la monarchie et un Kurde, Khali Naqchabandi.
Troisdécrets abrogent le régime monarchique, instaurent la République et désignent le général Al Azmah comme chef d'état-major.
Unautre communiqué annonce la composition du gouvernement, formé de sept militaires et de sept civils.
Le général Kassem cumuleles fonctions de premier ministre et de ministre de la défense, il est assisté du colonel Aref, vice-président du conseil et ministre del'intérieur.
Liquidations
" Aujourd'hui, il faut tuer ou être tué ", ne cesse de répéter la radio.
Ce 14 juillet 1958 est dans la tradition.
La foule déboulonne les statues du général anglais Maude, qui occupa Bagdad en1917, et du roi Fayçal Ier.
Elle met le feu à l'ambassade de Grande-Bretagne, tandis que l'armée protège l'ambassadeur et sescollaborateurs en les conduisant dans un hôtel.
Un ministre jordanien en visite est lynché et décapité : on l'a confondu avec unministre irakien.
" Liquidez les traîtres, les oppresseurs et les valets de l'impérialisme ! " hurle la radio, et la population de donnerla chasse aux ministres, qui ne devront la vie sauve qu'à l'armée.
Le général Kassem entre à Bagdad vers midi, après avoir libéréles détenus politiques de la prison de Baakouba.
Une inquiétude empoisonne toutefois la joie des officiers libres : Nouri Saïd, " l'ennemi de Dieu ", est toujours en liberté.Informé de la prise de la radio peu après 4 heures, il s'est enfui de chez lui, encore en pyjama, par le fond du jardin pendant queles militaires assiégeaient sa maison.
Vieux, malade, épuisé par les veilles, empêtré dans son déguisement de femme, il n'ira pas loin.
La nouvelle de sa présences'est répandue dans le quartier.
Son pantalon de pyjama-tenue exclusivement masculine-et ses chaussures le trahissent.
Desenfants le désignent du doigt en criant : " Nouri Saïd, Nouri Saïd...
" C'est la curée.
Il se met à courir comme un taureau dansl'arène.
Quand il voit surgir une jeep militaire, il comprend qu'il va recevoir l'estocade.
Il sort son revolver et se donne la mort.
Il est 13 heures.
Le corps de Nouri Saïd est transporté au ministère de la défense, où s'est installé Kassem.
Son fils, Sabah,court à la radio, qui a annoncé sa mort, pour demander où il peut récupérer la dépouille mortelle : il est abattu sur-le-champ.
Enville, l'excitation est à son comble.
Pour éviter une émeute, Kassem décrète le couvre-feu et ordonne à l'armée d'enterrersecrètement le père et le fils au cimetière d'Azamiya.
Le 20 juillet est créé le tribunal du peuple, que préside le colonel Fadel Mahdawi, le " colonel rouge ", que la presse françaiseappelle le " Fouquier-Tinville irakien " parce qu'il envoie allègrement à la potence, non pas tant les notables de l'ancien régimecomme Fadel Jamali et Nadim Pachachi, que les officiers nassériens et baasistes, dans lesquels Kassem voyait des rivauxpotentiels.
Derrière les congratulations entre Le Caire et Bagdad se profile déjà la brouille entre Nasser et Kassem, reflet d'uneancestrale rivalité semblable à celle qui a toujours opposé l'Irak et la Syrie.
Le 27, enfin, est promulguée une Constitution provisoire : elle remplace celle de 1924, d'inspiration britannique.
Elle proclame :" L'Etat irakien fait partie intégrante de la nation arabe " (art.
2), et emprunte à la Révolution de 1789 : " Le peuple est la sourcede tous pouvoirs ".
L'Irak, qui se retirera en 1959 du pacte de Bagdad, s'engage dans la voie du neutralisme et du non-alignement.
Il aura suffi de deux semaines pour que l'Etat change de visage.
Bagdad commence à devenir une vraie capitale,tandis que le pays entre dans un cycle révolutionnaire qui allait durer une décennie.
Par la suite, Kassem écarte Aref et s'appuie sur les communistes pour s'opposer aux nassériens et aux baasistes, dont quelquesmilliers seront tués en 1959 à Mossoul.
Lui-même est assassiné en 1963.
PAUL BALTA Le Monde du 11 juillet 1983.
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